Le Royaume d\'icare

une réception essuie la fusillade de rebelles Boers infiltrés
en territoire anglais.
— La mission n’est pas sans périls, avait souligné l’attaché
au ministère. N’oubliez jamais que les Anglais aiment les
hommes qui ont du cran.
La mort aussi. On renvoie les enfants en Angleterre où,
sans parents proches, ils sont placés en famille d’accueil.
Famille riche toutefois, Borj Nilsson laisse à la gestion d’un
homme compétent un pécule non négligeable. Ledit avocat
parle aussi bien français et allemand qu’anglais. Son père a
anglicisé son nom en émigrant via la France. L’homme de
loi voit dans le malheur des enfants Nilsson l’opportunité
de sa vie, s’installer à Paris. En une année, grâce à quelques
entourloupettes légales que permet l’absence de collatéraux,
l’avocat liquide le fonds Nilsson. Les enfants échouent dans
les bras de l’assistance publique, un panier troué.
Un éclair frappe au loin. La pluie reprend. Le temps est un
cours d’eau. Plusieurs le combattent à contre-courant et piétinent.
D’autres comprennent qu’il n’y a pas de dérive; tous les
cours mènent à l’océan, la source, début sans commencement,
chaos mer de l’ordre.
Quelqu’un retient John qu’il a heurté, absorbé. L’encre
de tous les textes écrits pourrait emplir un petit lac Dégoulinant,
il contourne des marins affairés à leurs cordages et
entre. Allez, suis ton fil, mate l’eau.
Paquebot Majestic, à deux cent kilomètres
des côtes françaises, en direction du Havre, sept
heures quarante et une, heure de Paris.
Accoudée à la rampe qui surplombe le premier pont du
navire, Jill, fin trentaine et de poitrine modeste, grande
même pour une Américaine, accueille la caresse du vent sur
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