Le Royaume d\'icare

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Pour un loup, un esprit de loutre est un atout indéniable.
Rejouer les parties des maîtres est une chose, analyser
avec l’un d’eux en est une autre. Itchkoff est méthodique,
cherchant à matérialiser des positions qu’il privilégient.
Feuerbach curieux, prêt à sonder les préjugés de son adversaire.
Boey évite les querelles directes et opte volontiers
pour des suites évasives. Ce qui frappe chez Reeves, c’est son
dynamisme. La question s’impose :
— Croyez-vous pouvoir gagner le tournoi, sir
— Vous m’en croyez capable
Amusé, Frank se rassoit confortablement. Il a pensé à
Steve, à cause du sir. Son entraînement terminé, son frère
était revenu à la maison revoir sa famille et ses amis avant
le départ pour l’Europe. Il disait mécaniquement « sir » aux
personnes plus âgées.
Après quelques secondes de réflexion, Nilsson répond :
— Vos calculs sont économiques, vos intuitions profondes.
Je manque d’expérience, c’est évident. Vous êtes calme et
confiant en votre jugement. C’est très différent d’être assis
en face d’un maître. Regarder des parties notées ne rend pas
compte de l’effort de volonté des joueurs. Des tigres de papier,
s’exclame John hors propos.
Sa trouvaille le fait sourire. Devant un Reeves perplexe, il
ajoute :
— Une expression chinoise dont je transforme le sens.
— Vous lisez le chinois!
— Non. Une traduction allemande. D’intéressants petits
manuscrits sur la Chine circulent en Allemagne.
— Parlez-vous français
— French Non. Vous le parlez