— 52 —— Non, non, non, maman, nous n'avons jamais ditque tu t'appelais Dame Kélément 1— Cirique ! ô cirique, est-ce toi qui as dis que je m'appelaisDame Kélément ?Alors le cirique leva les yeux, brandit ses pinces jauneset cria :— Oui, oui, vilaine vieille ! Oui, vieille sorcière !Oui, vieille malédiction 1 Oui, c'est moi qui ai dit que tut'appelais Dame Kélément.Dès qu'elle entendit ces paroles, elle se mit à trépignersi fort sur le sol, que le Diable l'entendit et ouvrit un grandtrou à ses pieds. Et elle s'y précipita, la tête la première.Et la terre se referma sur elle. Et, deux jours plus tard,à cet endroit même, avait poussé une touffe de l'arbustequ'on nomme l'arrête nègre, de l'arbuste qui est tout enépines !Or, pendant que tout ceci se passait, le serpent s'étaittransformé en homme, car c'était la méchante vieillesorcière qui l'avait changé en reptile. Et il prit la petitefille par la main et la ramena à sa mère.Mais le lendemain, ils revinrent fouiller la case deDame Kélément.Ils y trouvèrent sept tonneaux remplis d'ossements
— 53 —humains et aussi beaucoup d'or et d'argent, plus qu'il n'enfallait pour que la petite fille devînt très riche. Et lorsqu'ellese maria, elle eut la plus belle noce qu'on eûtjamais vue dans ce pays ! ...Les visites que Mayotte faisait, chaque matin, avec<strong>Youma</strong> à la rivière, lui avaient permis d'imaginer tous îesdécors de la dernière partie de cette sotte petite histoire.Et elle fut si fort enchantée qu'elle obligea sa bonne à lalui répéter plusieurs fois. Elle avait vu les écrevisses sortirleurs têtes des flaques d'eau ; elle avait attrapé les titiridans ses petites mains, elle connaissait de vue la loche, letêtard, la matavalé, le zhabitant, le dormeur et le cirique.Elle connaissait aussi,grâce à de douloureuses expériences,l'arrêle nègre. Elle se disait que Dame Kélément devaitressembler à la vieille Tanga, quand celle-ci était en colère; et la petite fille qui perdit son chemin dans les boisétait sans doute l'image de certaine petite négresse queTanga grondait souvent et qui se mettait à pleurei d'unefaçon tout à fait extraordinaire : Aïe-yaië-yaië-yaië-yaiëyaië-yaië!
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XIVLa rue se remplit d'un lourd mur
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