Art 03 /Gentrification etimmigrationchoisie dans noscampagnes :la place del’Habitat LégerClément DAVID,regard d’un acteur local,avril 2012Aujourd’hui, certains villages, certains cantonsvoire certains secteurs voient émergerde nouvelles populations, de nouvelles pratiquesculturelles et touristiques, des phénomènes demise en valeur du patrimoine, d’esthétisation...Ces éléments sont les premiers indices de la montéed’un processus qu’il est facile de qualifier de«gentrification rurale». Ce terme désigne, dans unespace donné, le remplacement d’une populationpauvre par une autre plus aisée (la gentry) ainsi quela modification de l’habitat et la forte hausse desprix de l’immobilier. La gentrification constitueà l’origine un objet typiquement urbain. Mais lesnouveaux modes d’information, de communication,de transport et de consommation ont gomméen grande partie la frontière entre urbain et rural.Lorsqu’il s’agit de poser sur la table la questionde l’urbanisme et du partage du territoire, ilsemble impossible de faire l’impasse sur la questionde l’intérêt général et des priorités collectives.Pourtant, il devient très commun en Francede traiter de la question des pauvres et des étrangersavec des propos du type «hors de chez nous»ou des faux débats tels que «la lutte contre lafraude sociale». Les victimes d’un système inégalitairefinissent par être accusées d’être les fautifsde la crise que nous traversons.Nous ne nous posons pas assez les questions quinous permettraient d’analyser la situation, d’éviterla catastrophe sociale et de sortir de ce qui a l’aird’être une impasse. Le point de vue de cette analyseest plutôt de penser qu’aujourd’hui, les individusqui ont convenu de former une société ne sont paslibres de choisir dans quelle société ils souhaitentvivre et que la problématique foncière est au cœurdu débat. La question du patrimoine communnon privatisable qui permet de satisfaire aux besoinshumains tel que la terre, l’eau, l’air, les outilsde production, la culture (la liste n’est pas exhaustive)et la question de nécessité (logement, nourriture,cadre de vie, etc.) ont été abandonnées auprofit de la propriété lucrative grâce à un systèmelibéral sans limites. En fin de compte, nous vivonsavec une forme d’économie où l’argent est devenuplus libre que les individus et ce mécanisme nousimpose des fonctionnements que nous sommesbeaucoup trop à accepter comme s’il s’agissaitd’une fatalité climatique. Ces fonctionnementssont profitables à certains mais, pour la très grandemajorité, les conséquences sont désastreuses. Je nepeux m’empêcher de penser à ce bon vieux Marxqui écrivait dans «l’idéologie allemande» en 1845 :«Toute classe qui aspire à la domination doit conquérirle pouvoir politique pour représenter à son tour sonintérêt propre comme étant l’intérêt général». Et si onse mettait un jour à aménager l’espace en pensantà tout le monde...De plus, l’espace rural, s’il souhaite conserverses services (écoles, postes, administrations,transports publics...), doit rapidement remettre leshabitants au centre de ses priorités. Aujourd’hui,il tend à devenir de plus en plus partitionné entrele résidentiel de loisir, le rural-récréatif en quête deniche environnementale préservée et le «ruraldortoir»pour les travailleurs urbains.L’habitat léger, dans ce contexte, a une placequ’il n’est plus possible d’ignorer. Il concerne plusieurscentaines de milliers de personnes, toutescatégories sociales et juridiques confondues.Même s’il n’est pas totalement nouveau, cet engouementest un signe d’une société en mutationet n’est pas complètement indépendant de la crise.Il devient urgent de tenir compte de ce phénomèneet de l’accompagner.133
ContexteLes données INSEE indiquent, dans de nombreuseszones rurales, un solde migratoire ànouveau positif dès les années 1980, et la représentationde la ruralité a changé, substituant à la«dure rusticité de la campagne» des valeurs positivesde «bien-être authentique».En dehors des propriétaires immobiliers quiont un intérêt direct à apporter une plus-value àleur patrimoine, le phénomène de gentrificationn’est que très rarement l’œuvre consciente dechacun des particuliers qui l’alimente.La population des gentrifieurs en milieu rural esttrès particulière. Ils sont souvent plus diplômés etglobalement plus aisés que les populations préalablementen place, sans pour autant être très “riches”.· Le caractère préservé attire de nombreux touristesconsommateurs de résidences secondaires. Le marchédu résidentiel secondaire est florissant (+45% en 15ans) avec un investissement fortement spéculatif.· Certains, la retraite venant, se sont installés àl’année pour devenir d’authentiques gentrifieurs.· Les mutations semblent aussi, à de nombreuxégards, relever plutôt d’une forte présencede jeunes diplômés, d’artistes, d’employés du secteurculturel, qui œuvrent entre autre à l’esthétisationet à la patrimonialisation.· Ces mutations mettent aussi parfois en jeu des«super gentrifieurs» appartenant à la grande bourgeoisieintellectuelle : familles héritières d’artistesde renommée mondiale, éditeurs parisiens, ouproducteurs dans l’audiovisuel par exemple.Nous assistons également à un autre phénomène: la crise de l’emploi et du logement, la peurde la régression sociale et de l’exclusion poussentles individus à privilégier le mode d’habiter ruralqui représente, en tout cas dans l’imaginaire, unterritoire où l’on peut vivre modestement avec lesavantages de la nature et de la solidarité. La mobilitégéographique est de plus en plus un moyen réelou rêvé d’échapper à l’exclusion, les communes ruralesdevenant terres d’accueil pour exclus citadins.1- Donnée agrégeant : 21 038 communes de moins de 500habitants, 10 912 de 500 à 2000 habitants, 1 993 de 2000à 3 500 habitants, chiffres cités in « Les finances des communesde moins de 10 000 habitants », Ministère de l’intérieuret de l’aménagement des territoires, collection Statistiqueset finances locales, 2003.134Différentes causesBeaucoup ont compris combien ils pouvaientprofiter de l’augmentation exponentielledu cours de l’immobilier pour vendre un arpentde terre ou une ruine dans les collines dixfois plus cher qu’ils ne l’auraient fait quinze ansauparavant. Ils sont par contre peu nombreux à«améliorer» leur bien, laissant aux acquéreurs lesoin de s’en occuper. Nous atteignons aussi unfort taux de logements indignes en relation avecle fort taux de propriétaires occupant leur bien.· La loi de Solidarité et Renouvellement UrbainSRU 2000 a entériné le principe de mixité sociale.Par contre, elle ignore les dynamiques sociales etculturelles des campagnes qui devraient accompagnerles débats sur l’«aménagement» des territoires.Béatrice Mesini (chercheuse au CNRS) écrit à cesujet : «La diversité de l’habitat reste lettre morte, invisibiliséeau cas par cas dans du droit dérogatoire, fortementreléguée en termes de territoires et de populations«cibles» de l’action publique. En limitant l’objectif de20% de logements sociaux aux communes de plus de3500 habitants, la loi SRU a provoqué une rupturede l’équité territoriale et de la cohésion sociale entre lesvilles et les campagnes. Outre le renforcement du processusde ségrégation par polarisation de l’habitat socialen milieu urbain et péri-urbain, le dispositif laissetotalement en dehors de «l’effort national en faveur dulogement social» quelques 33 943 communes ruralesdes 36 782 communes françaises 1 .»Nous sommes également bien obligés deconstater que les principales ressources des collectivitéssont les «droits de mutation». Ils recouvrentles impositions indirectes perçues à l’occasion dela publication d’une opération au fichier immobilier.Elles sont versées au département et à la commune.Afin de compenser la suppression de la taxeprofessionnelle, la part qui précédemment revenaità l’État a été transférée au département depuisle premier janvier 2011. En 2010, leur assiette s’estmontée à 285 milliards d’euros et leur produit à 9,9milliards d’euros (une paille !). La forte croissancede cette ressource fiscale depuis 2000 a contribuéau financement des dépenses sociales prisesen charge par les collectivités locales (RSA, personnesâgées, handicap) et transférées par l’Étatdans le cadre de la décentralisation. Pour parlersimple, les collectivités sont dans l’obligation financièrede favoriser la plus-value des biens immobilierspour arriver à payer, entre autres, les aidessociales aux plus démunis. Tous les ingrédientssont là pour avoir envie de chasser les pauvres, réputéspour être les fautifs de la dévaluation immobilière.Eh oui, la présence de pauvres suffit à diminuerla pression foncière. Il est difficile de soutenirqu’il faille éliminer cette taxe au nom du principede solidarité, si celle-ci n’est pas remplacée. C’estpourtant cela même que propose l’UMP lors de lacampagne électorale de 2012.
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