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#Business | RH<br />
UN MANAGEMENT<br />
AGILE POUR OPÉRER<br />
SA TRANSFORMATION<br />
CULTURELLE PAR ALEXANDRE KEILMANN<br />
A quelques semaines de sa venue au Luxembourg et de sa participation<br />
au Gala HR One, Inès Leonarduzzi, analyste experte digitale au sein du<br />
Hub Institute et fondatrice de Women Inspiring Talks, nous présente<br />
sa vision d’un management qui s’est réinventé avec les attentes des<br />
nouvelles générations, mais également avec l’avènement du digital.<br />
Les esprits évoluent, les leaders s’adaptent mais fort heureusement,<br />
ils continuent à transmettre.<br />
Les nouvelles générations demandent plus de libertés, associées à plus de<br />
responsabilités. On parle quelque fois même de «purpose» ou mission. Vous êtes<br />
une fervente défenderesse du Mistake Management. Quels en sont les principales<br />
composantes ?<br />
Les nouvelles générations affichent en effet un rapport décomplexé à l’erreur.<br />
C’est un changement de paradigme énorme que les entreprises, notamment<br />
européennes, peinent encore à appréhender. Or, cette prise de conscience est<br />
clé et à plusieurs égards : d’abord d’un point de vue de la marque employeur,<br />
ensuite, d’un point de vue de la performance. Car la nouvelle génération sera<br />
épanouie, proche d’elle-même et performante ou ne sera pas. C’est un fait.<br />
Les middle et top management affichent la plupart du temps des craintes<br />
exacerbées quant à leur image de marque, leur rapport aux clients<br />
et prospects, le tout figeant la posture de l’entreprise dans son jus.<br />
Par crainte de se risquer à la mauvaise décision, l’immobilisme est<br />
tacitement décrété «par défaut» et entretenu.<br />
L’innovation peut être technologique, mais elle doit surtout<br />
être culturelle. Sinon ça n’a pas de sens. Et ce sens justement,<br />
est le «purpose» dont vous parlez : les jeunes générations<br />
ne feront pas l’impasse sur la quête de sens et l’agilité qu’il<br />
leur sera permise dans leurs métiers.<br />
Quant au positive mistake management, il s’agit d’un<br />
programme d’executive coaching que j’ai développé.<br />
Il consiste d’abord à changer son angle de vue sur l’erreur,<br />
redéfinir cette notion. Le travail de déconstruction mentale<br />
et de reconstruction est essentiel. Ce qui est ancré,<br />
souvent depuis l’enfance, n’est pas évident à déloger.<br />
La méthode mixe exercices, cas d’usages, échanges<br />
avec des entrepreneurs clé et des visites d’entreprises<br />
inspirantes où les CEO partagent leurs expériences.<br />
Une fois le nouvel environnement compris, tant<br />
dans sa substance que dans les opportunités qu’elle<br />
dégage, il s’agit de le structurer au sein de sa propre<br />
entreprise. Là, on creuse dans le psychologique et<br />
l’approche éducationnelle, le travail de leadership au<br />
sens propre parce qu’il est essentiel que le manager<br />
se sente valorisé, lui aussi, dans cette démarche.<br />
Enfin, on passe en mode projet. Pour que ce soit<br />
bien fait, il faut un cadre mais aussi des règles<br />
que nous élaborons ensemble sur la base d’une<br />
approche réflexive. Car le mistake management<br />
n’est pas la permission de tout casser dans la<br />
maison avec l’assurance qu’on ne se fera pas<br />
gronder. C’est davantage féliciter celui qui s’est<br />
jeté dans la piscine pour savoir comment il<br />
nageait, et lui lancer une bouée au besoin. Le<br />
positive mistake management, ça n’est ni plus<br />
ni moins un processus de dédramatisation et<br />
d’assouplissement. C’est très simple comme<br />
concept, mais ce n’est pas facile, j’en conviens.<br />
Une entreprise qui parvient à pratiquer ce<br />
management agile est une entreprise qui à priori,<br />
réussira toutes ces transformations culturelles.<br />
Il s’agit dès lors d’un changement de culture,<br />
plus que de management. Quelle est la place<br />
du digital et de ses outils qui redéfinissent<br />
également la culture d’entreprise ?<br />
C’est le digital qui a induit ce glissement<br />
générationnel. On a tendance à penser «outil»<br />
quand l’on parle du digital, il faudrait plutôt<br />
l’envisager comme une évolution culturelle.<br />
Être «digital minded» ne signifie pas être 12<br />
heures par jour sur ses réseaux sociaux. Cela<br />
signifie en avoir les attributs : la capacité à aller<br />
vite et être réactif, manier l’horizontalité car<br />
aujourd’hui le digital permet à n’importe qui,<br />
qu’on soit une adolescente du Ghana ou le PDG<br />
d’une grande entreprise, d’accéder aux mêmes<br />
connaissances. Le digital a réajusté les clivages<br />
sociaux à ce titre, forcé la transparence, le<br />
regard critique et notre capacité à être force de<br />
proposition. Le digital, donc le virtuel, a déployé<br />
notre propension à exister dans le réel. Et ces<br />
observations, vous les retrouvez dans les<br />
entreprises aujourd’hui.<br />
Les outils sont importants, on<br />
travaille toujours mieux bien<br />
équipés. Mais ceux-ci doivent<br />
faire sens et répondre à un enjeu<br />
bien stratégique. Workplace, par<br />
exemple, pour encenser les<br />
«mad skills» en interne,<br />
partager sa veille, lever les<br />
silos ou encore lancer des<br />
projets transverses. Mais ça<br />
ne revêt que peu d’intérêt<br />
si l’on explique pas l’enjeu<br />
d’un tel outil et si l’on<br />
emmène pas les salariés.<br />
<strong>BEAST</strong> MAGAZINE #8