JOURNAL ASMAC No 5 - octobre 2018
Energie - Oncologie Médecine pharmaceutique Financement uniforme - oui, mais
Energie -
Oncologie
Médecine pharmaceutique
Financement uniforme - oui, mais
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POINT DE MIRE ÉNERGIE<br />
L’efficience des bancs de poissons<br />
Les bancs de poissons sont-ils capables d’économiser de l’énergie? Des chercheurs de l’EPF Zurich<br />
nous dévoilent la réponse. Ils ont simulé les systèmes de courants complexes sur le superordinateur<br />
«Piz Daint» et les ont associés à un algorithme de l’apprentissage par renforcement (Reinforcement<br />
Learning).<br />
Simone Ulmer, rédactrice Science et Technologie au Swiss National Supercomputing Centre (CSCS) 1<br />
Le comportement grégaire des poissons<br />
fascine autant les ingénieurs que les biologistes.<br />
Car les bancs de poissons se déplacent<br />
dans un environnement de courants<br />
rempli d’énergie mécanique créée<br />
par les mouvements des poissons. Des<br />
chercheurs du Computational Science &<br />
Engineering Lab (CSElab) de l’EPF Zurich<br />
ont pu répondre par oui à la question de<br />
savoir si les poissons ont un avantage<br />
énergétique à nager en bancs. De plus, ils<br />
ont obtenu des renseignements détaillés<br />
qui pourraient se répercuter sur l’efficacité<br />
énergétique des robots volants ou<br />
sous-marins.<br />
Simulation précise de la<br />
dynamique des fluides<br />
Dans leur étude, les scientifiques ont développé<br />
une simulation hautement détaillée<br />
du jeu complexe de poissons nageant<br />
et de leur environnement de courants.<br />
Jusqu’ici, les simulations de ce type<br />
étaient réalisées avec des modèles fortement<br />
simplifiés qui ne pouvaient calculer<br />
la dynamique des fluides des poissons<br />
que de façon imprécise. Le superordinateur<br />
«Piz Daint» au Swiss National Supercomputing<br />
Centre(CSCS) a pour la<br />
première fois permis des simulations selon<br />
les règles de l’art, plus poussées et<br />
sans simplifications.<br />
Simultanément, les chercheurs ont combiné<br />
les simulations réalistes des courants<br />
avec un algorithme de l’apprentissage par<br />
renforcement (Reinforcement Learning),<br />
un algorithme efficace issu de l’apprentissage<br />
automatisé. Les algorithmes d’apprentissage<br />
de ce genre étaient jusqu’ici<br />
utilisés dans les jeux informatiques tels<br />
que «Go» pour permettre à l’ordinateur<br />
de battre les joueurs.<br />
Le Reinforcement Learning dans des systèmes<br />
physiques complexes nécessite des<br />
milliers d’étapes d’approximation, raison<br />
pour laquelle il n’a encore jamais été employé<br />
pour de tels systèmes. L’algorithme<br />
rappelle le conditionnement pavlovien,<br />
disent les chercheurs du CSElab: les agents<br />
apprennent par la récompense à développer<br />
une stratégie optimale pour atteindre<br />
leur but.<br />
C’est ici que cet algorithme a été utilisé,<br />
pour entraîner les poissons à adopter une<br />
façon de nager optimale et leur permettre<br />
de décider de manière autonome comment<br />
réagir aux courants irréguliers de<br />
leurs congénères. «<strong>No</strong>us avons établi les<br />
conditions-cadres mathématiques et nous<br />
sommes contentés de fixer un objectif aux<br />
poissons, celui de nager le plus efficacement<br />
possible», déclare Guido <strong>No</strong>vati,<br />
doctorant au CSElab et développeur du<br />
logiciel utilisé pour les simulations. A<br />
notre surprise, les poissons ont nagé dans<br />
le flux tourbillonnaire des autres pour<br />
économiser de l’énergie, alors qu’ils auraient<br />
eu la possibilité de nager indépendamment<br />
les uns des autres.<br />
Apprendre de la<br />
visualisation<br />
Dans leurs simulations, les chercheurs<br />
observent, en deux et trois dimensions, le<br />
comportement de nage de jusqu’à trois<br />
poissons dans différentes configurations.<br />
Ils soulignent que de telles simulations<br />
n’ont jusqu’à présent jamais observé plus<br />
d’un poisson en trois dimensions. Ils ont<br />
analysé chaque détail de chaque tourbillon<br />
afin de comprendre le comportement<br />
des poissons.<br />
«Intuitivement, on suppose que les poissons<br />
évitent les zones turbulentes et<br />
nagent dans des régions plus calmes.<br />
Mais, au lieu de cela, ils nagent directement<br />
dans les tourbillons», explique<br />
Siddhartha Verma, postdoc au CSE lab.<br />
Verma et <strong>No</strong>vati ont réalisé, sous la direction<br />
du Professeur Petros Koumoutsakos<br />
de l’EPF Zurich, l’étude récemment publiée<br />
en ligne dans les Proceedings of the<br />
National Academy of Sciences (PNAS).<br />
Les chercheurs ont constaté que les poissons<br />
économisaient le plus d’énergie en<br />
nageant non pas, comme on le supposait<br />
Un suiveur interagit intelligemment avec le tourbillon provoqué par les deux poissons de<br />
tête, ce qui améliore sensiblement son efficience. (® CSElab/EPF Zurich)<br />
1 Cet article est paru pour la première fois le<br />
6 juin <strong>2018</strong> au Swiss National Supercomputing<br />
Centre (CSCS).<br />
38 VSAO <strong>JOURNAL</strong> <strong>ASMAC</strong> N° 5 Octobre <strong>2018</strong>