annexes (pdf) - Thomas Piketty - Ens
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Annexe J 769<br />
La loi du 3 août 1926, là encore de la même façon que pour l’impôt sur le revenu, tenta de ramener les<br />
taux supérieurs à des niveaux « raisonnables » : les taux de la taxe successorale furent maintenus en l’état,<br />
mais les barèmes de l’impôt sur les successions furent allégés, avec un taux supérieur en ligne directe au 1 er<br />
degré ramené à 7,8 % (au lieu de 17 %). De plus et surtout, la loi du 3 août 1926 institua un « taux maximal<br />
» d’imposition afin de limiter l’impôt dû par les successions les plus importantes : en ligne directe, le<br />
taux effectif obtenu en combinant la taxe successorale et l’impôt sur les successions ne devait en aucun cas<br />
dépasser 25 % de l’actif net de la succession 1 .<br />
Le champ d’application de la taxe successorale fut réduit au cours des années suivantes : par exemple, la<br />
loi du 29 décembre 1929 en exempta toutes les successions avec au moins 2 enfants (et non plus au moins 4<br />
enfants). Puis le décret-loi du 11 juillet 1934 supprima définitivement la taxe successorale, qui s’est donc<br />
appliquée de 1917 à 1934. Cette suppression ne signifiait cependant pas que les successions concernées<br />
bénéficiaient d’un allégement d’impôt correspondant, car les taux de la taxe successorale furent en réalité<br />
intégrés aux barèmes de l’impôt sur les successions : le décret-loi du 11 juillet 1934 procéda à une refonte<br />
générale des barèmes, qui variaient désormais non seulement en fonction du degré de parenté mais en fonction<br />
du nombre d’enfants représentés. En ligne directe au 1 er degré, le taux marginal supérieur, qui<br />
s’appliquait toujours aux fractions de parts successorales supérieures à 50 millions de francs, était de 15 %<br />
pour les successions avec au moins 2 enfants, et de 28 % pour les successions avec 1 enfant.<br />
La loi du 31 décembre 1936 décida de relever très fortement l’ensemble de ces taux, et notamment les<br />
taux les plus élevés : une tranche concernant les parts successorales supérieures à 150 millions de francs fut<br />
créée, et le taux marginal supérieur applicable en ligne directe au premier degré et aux fractions de parts supérieures<br />
à 150 millions de francs fut fixé à 40 % pour les successions avec au moins 2 enfants et à 60 %<br />
pour les successions avec 1 enfant 2 . Il faut toutefois noter que le décret-loi du 11 juillet 1934 et la loi du 31<br />
décembre 1936 avaient maintenu le système de « taux maximal » institué par la loi du 3 août 1926 : en<br />
ligne directe, le montant total de l’impôt dû ne devait en aucun cas dépasser 25 % de l’actif net de la<br />
succession 3 . Puis les taux supérieurs des barèmes fixés par la loi du 31 décembre 1936 furent à nouveau<br />
relevés par le décret-loi du 29 juillet 1939, avant d’être légèrement abaissés par la loi 9 novembre 1940, qui<br />
en profita pour réduire le « taux maximal » applicable aux successions en ligne directe avec au moins 3 enfants,<br />
tout en relevant le « taux maximal » applicable aux successions en ligne directe avec 1 enfant, qui<br />
passa à 30 % 4 .<br />
Au final, il est extrêmement difficile d’estimer de façon précise le niveau des taux moyens d’imposition<br />
qui se sont appliqués aux différents fractiles de grosses successions de l’entre-deux-guerres. La législation<br />
et les taux d’imposition n’ont cessé d’être révisés, et les taux réellement appliqués dépendaient de façon<br />
extrêmement fine de la configuration familiale considérée, davantage encore que lors des autres périodes.<br />
Sur la base des informations législatives données plus haut et des estimations du niveau des fractiles de<br />
successions indiquées sur le tableau J-5, on peut cependant estimer de façon approximative que les lois du<br />
31 juillet 1917 et du 25 juin 1920 ont porté le taux moyen d’imposition infligé aux successions en ligne directe<br />
du fractile P99,99-100 à un niveau de l’ordre de 30-35 %, et que ce taux moyen d’imposition n’est<br />
jamais redescendu au-dessous d’un niveau plancher de l’ordre de 20-25 % au cours des années 1920-1930.<br />
Par comparaison à la situation en vigueur à la veille de la Première Guerre mondiale, où le taux moyen<br />
d’imposition correspondant ne dépassait guère les 5 % (au maximum), on peut donc estimer que la pression<br />
fiscale pesant sur les très gros patrimoines transmis par héritage a été multiplié par un facteur de l’ordre de 5.<br />
3.3. Les taux d’imposition appliqués depuis la Seconde Guerre mondiale<br />
A la fin des années des années 1940, les taux de l’impôt sur les successions étaient très proches de ceux<br />
qui étaient en vigueur à la fin des années 1930 : les taux marginaux « officiels » des barèmes applicables en<br />
ligne directe montaient jusqu’à des niveaux de l’ordre de 60-70 % pour les fractions de parts successorales<br />
1. Le « taux maximal » fixé par la loi du 3 août 1926 était de 25 % pour les successions en ligne directe et entre époux, de 35 %<br />
en ligne collatérale et de 40 % entre non-parents (et entre parents au-delà du 4 e degré).<br />
2. Le taux marginal supérieur applicable aux successions entre non-parents le niveau de 80 % auquel l’avait porté la loi du 25<br />
juin 1920.<br />
3. Notons toutefois que si le décret-loi du 11 juillet 1934 avait maintenu l’ensemble des « taux maximaux » (25 %, 35 % et<br />
40 %) fixés par la loi du 3 août 1926, la loi du 31 décembre 1936 décida uniquement de maintenir le « taux maximal » de 25 % : le<br />
« taux maximal » passa à 40 % pour les successions en ligne collatérale et à 50 % pour les successions entre non-parents (et entre<br />
parents au-delà du 4 e degré).<br />
4. Le décret-loi du 29 juillet 1939 porta à 70 % le taux marginal supérieur applicable en ligne directe, puis la loi du 9 novembre<br />
1940 l’abaissa à 44 % pour les successions avec au moins 3 enfants, 52 % pour les successions avec 2 enfants et 66 % pour les<br />
successions avec 1 enfant ; le « taux maximal » d’imposition était fixé à 20 % pour les successions avec au moins 3 enfants, 25 %<br />
pour les successions avec 2 enfants et 30 % pour les successions avec 1 enfant (par contre, la loi du 9 novembre 1940 les « taux<br />
maximaux » de 40 % en ligne collatérale et de 50 % entre non-parents (et entre parents au-delà du 4 e degré) fixés par la loi du 31 décembre<br />
1936).