Civilité, incivilités - Revue des sciences sociales
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constate dans le palmarès <strong>des</strong> écoles d’ingénieurs<br />
16 donné par le magazine le Nouvel<br />
Économiste en avril 2000 que l’École<br />
Nationale <strong>des</strong> Télécommunications de<br />
Bretagne est placée dix-huitième sur les<br />
trente meilleures écoles alors que l’INT<br />
est quinzième. Les critères de choix entre<br />
l’INT et Télécoms Bretagne se révèlent<br />
donc très proches entre les élèves <strong>des</strong><br />
deux sexes.<br />
Pour finir, on relève que les filles<br />
sont moins nombreuses (22 %) proportionnellement<br />
aux garçons (44 %) à<br />
regretter de ne pas avoir intégré une autre<br />
école, dont ils et elles ont raté le concours.<br />
Ces écoles « regrettées » sont principalement<br />
les plus renommées telles que Centrale<br />
Paris, Télécoms Paris, les Mines de<br />
Paris, Sup’Optique, les Ponts et Chaussées<br />
et Polytechnique. Il semble donc que<br />
les étudiantes se satisfont plus facilement<br />
que les étudiants d’une bonne école<br />
comme l’INT mais non située tout de<br />
même au sommet de la pyramide ! Les<br />
filles sont sans doute moins portées que<br />
les garçons au rêve d’intégrer une de ces<br />
« très » gran<strong>des</strong> école d’ingénieurs.<br />
Conclusion ■<br />
Cette recherche menée auprès <strong>des</strong><br />
élèves de l’INT montre que l’orientation<br />
<strong>des</strong> filles vers une filière atypique pour<br />
leur sexe (celle <strong>des</strong> classes préparatoires<br />
scientifiques suivies d’une école d’ingénieurs)<br />
a été rendue possible par la<br />
conjonction de deux facteurs principaux :<br />
une excellence scolaire et un contexte<br />
familial et social particulier. Munies de<br />
« ces atouts supplémentaires », les filles<br />
apparaissent ensuite comme une population<br />
proche de la population masculine<br />
puisque nous avons relevé qu’elles<br />
avaient globalement avancé les mêmes<br />
raisons qu’eux pour leur choix d’orientation<br />
en classe préparatoire et pour l’INT.<br />
On peut supposer que les classes préparatoires<br />
ont un effet socialisant qui amène<br />
les élèves <strong>des</strong> deux sexes à tendre vers <strong>des</strong><br />
objectifs proches de formation ultérieure.<br />
On constate néanmoins que l’attrait<br />
pour l’INT a été un peu plus précoce chez<br />
les filles que chez les garçons et qu’elles<br />
sont plus satisfaites qu’eux d’y poursuivre<br />
leur formation. On peut penser que<br />
l’éducation familiale et scolaire reçue<br />
par les unes et par les autres amène moins<br />
les filles que les garçons à avoir <strong>des</strong> projets<br />
professionnels ambitieux et donc à<br />
avoir pour but de décrocher « le rêve <strong>des</strong><br />
familles » (P. Bourdieu, 1993).<br />
Bibliographie<br />
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1989.<br />
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», Didalskaia, supplément au n° 3,<br />
1994.<br />
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FERRAND M., IMBERT F., MARRY C.,<br />
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L’exemple <strong>des</strong> normaliennes scientifiques<br />
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Analyse <strong>des</strong> déterminants <strong>des</strong> choix d’une<br />
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sexe, Thèse de doctorat Sciences de<br />
l’Education (NR), Université de Bourgogne,<br />
1999.<br />
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LAURENS JP. La réussite scolaire: une histoire<br />
de lignée familiale. Etude sociologique <strong>des</strong><br />
trajectoires scolaires et <strong>sociales</strong> d’enfants<br />
d’ouvriers en mobilité sociale ascendante.<br />
Le comment et le pourquoi, les facteurs et les<br />
logiques de la réussite scolaire en milieu<br />
populaire, Thèse de doctorat de sociologie,<br />
Université de Toulouse le Mirail, 1990.<br />
MARRY C., « Les ingénieurs : une profession<br />
encore plus masculine en Allemagne qu’en<br />
France ? », L’orientation scolaire et professionnelle,<br />
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polytechniciennes ? », Cahiers du Mage,<br />
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PIGEYRE F., Socialisation différentielle <strong>des</strong><br />
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et sociale », <strong>Revue</strong> française de pédagogie,<br />
n° 96, juillet – août – septembre<br />
1991.<br />
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à l’École Nationale <strong>des</strong> Ponts et<br />
Chaussées: les déterminants d’une orientation<br />
sexuellement atypique, mémoire de<br />
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TERRAIL JP., « De quelques histoires de transfuge<br />
», Société Française, n° 17, octobrenovembre<br />
- décembre 1985.<br />
Notes<br />
1. Depuis la réforme <strong>des</strong> classes préparatoires<br />
scientifiques en 1995, les classes préparatoires<br />
scientifiques proposent en première<br />
année 3 filières : MPSI (maths - physique -<br />
<strong>sciences</strong> de l’ingénieur), PCSI (physique –<br />
chimie - <strong>sciences</strong> de l’ingénieur) et PTSI<br />
(physique – technologie – <strong>sciences</strong> de l’ingénieur).<br />
Les élèves de terminale doivent<br />
donc choisir une de ces trois filières dès<br />
le dépôt de leur dossier de candidature.<br />
En deuxième année, en fonction de l’option<br />
choisie au cours de la classe de<br />
mathématiques supérieures et de leurs<br />
résultats scolaires, les étudiant(e)s s’orientent<br />
soit en classe MP (maths-physique),<br />
soit en classe PC (physique-chimie), soit en<br />
classe PT (physique – technologie), soit en<br />
classe PSI (physique-<strong>sciences</strong> de l’ingénieur).<br />
2. Ont été retenues les personnes ayant commencé<br />
ou achevé une formation scientifique<br />
universitaire ou en écoles d’ingénieurs.<br />
3. Par exemple, en 1992/93, 33,7 % <strong>des</strong> filles<br />
avaient 20 ans ou moins contre 26 % <strong>des</strong><br />
garçons en première année; en 1997/98,<br />
30,5 % <strong>des</strong> filles contre 24,3 % de garçons.<br />
4. Ce concours concerne 17 écoles dont Centrale<br />
Paris, Lille, Lyon et Nantes, Supélec<br />
Paris et Sup’Optique…<br />
5. Ce concours concerne 8 écoles: l’École<br />
Nationale <strong>des</strong> Ponts et Chaussées, l’École<br />
Nationale Supérieure <strong>des</strong> Mines de Paris, les<br />
Mines de St-Étienne, les Mines de Nancy,<br />
Les Écoles nationales Supérieures <strong>des</strong> Télécommunications<br />
de Paris et de Bretagne,<br />
Sup’Aéro Toulouse et l’École Nationale<br />
Supérieure <strong>des</strong> Techniques Avancées.<br />
6. Le concours ENSAM regroupe les 7 Écoles<br />
Nationales Supérieures <strong>des</strong> Arts et Métiers<br />
(Aix-en-Provence, Angers, Bordeaux, Châlons-sur-Marne,<br />
Cluny, Lille, Metz ; Paris<br />
regroupant tous les étudiants de dernière<br />
année ENSAM) et 7 autres écoles dont l’École<br />
Nationale Supérieure <strong>des</strong> Arts et Industries<br />
de Strasbourg, l’École Nationale Supérieure<br />
de Céramique Industrielle, l’École<br />
Nationale Supérieure de l’Electronique…<br />
7. L’École Spéciale <strong>des</strong> Travaux Publics du<br />
Bâtiment et de l’Industrie, l’École Nationale<br />
<strong>des</strong> Sciences Géographiques, l’École Nationale<br />
<strong>des</strong> Travaux Maritimes, l’École Nationale<br />
<strong>des</strong> Travaux Publics de l’État.<br />
8. Par exemple : l’École de l’Air, l’École<br />
Nationale de l’Aviation Civile…<br />
9. En moyenne, les élèves en classe de mathématiques<br />
spéciales présentent 4 ou 5<br />
concours. Lors de l’inscription, les candidat(e)s<br />
peuvent opter pour une ou plusieurs<br />
écoles de chaque concours.<br />
10. Selon le palmarès <strong>des</strong> écoles d’ingénieurs<br />
du magazine « le Nouvel Economiste »,<br />
spécial gran<strong>des</strong> écoles, n°1143 du 21 avril<br />
2000, l’INT atteint la quinzième place sur<br />
les trente meilleures écoles ; l’École nationale<br />
Supérieure <strong>des</strong> télécommunications<br />
de Paris, la huitième place et l’École Nationale<br />
<strong>des</strong> télécommunications de Bretagne,<br />
la dix-huitième place (classement effectué<br />
à partir d’un sondage Ipsos auprès de responsables<br />
du recrutement au sein <strong>des</strong> 2000<br />
premières entreprises françaises).<br />
11. Par exemple: en 1992, 17,3 % de filles classées<br />
et 30,7 % d’intégrées ; en 1999, 21 %<br />
de filles classées et 22,3 % d’intégrées.<br />
12. Seulement 1 fille admise sur 14 et 1 garçon<br />
sur 34 ne sont pas rentrés à l’INT.<br />
13. La classe de mathématiques spéciales peut<br />
être redoublé en cas de non-réussite aux différents<br />
concours passés ou pour tenter une<br />
deuxième fois l’école la plus prisée.<br />
14. Polytechnique, École Supérieure <strong>des</strong> Travaux<br />
Publics, Concours Polytechniques.<br />
15. Polytechnique, Mines – Ponts – Télécoms,<br />
Arts et Métiers, ENS, Centrale – Supélec.<br />
16. Classement effectué à partir d’un sondage<br />
Ipsos auprès de responsables du recrutement<br />
au sein <strong>des</strong> 2000 premières entreprises<br />
françaises et publié dans le Nouvel Économiste,<br />
spécial gran<strong>des</strong> écoles, n°1143 du 21<br />
avril 2000.<br />
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