Le COGEREN ne vient pas annuler ni supplanter - IUCN

Encadré 4: Ils viennent sauver nos gorilles… mais les sauver de quoi donc?
Je me rappelle même qu’un jour, le chef du village de Mpella, un vieillard rebelle et passionné au surnom de
Yankey, avait lancé au blanc ces mots: «Retourne à Paris et emmène tes éléphants avec toi, emporte les là bas
pour bien les protéger!» Nous tous étions persuadés que Yankey avait raison, mais nous tous savions également
que l’éléphant est notre bien car il vit sur nos terres, qu’il est notre richesse car nous le mangeons, qu’il est
notre fierté et notre patrimoine car il est un emblème et qu’il peut même attirer des visiteurs et nous rapporter
de l’argent.
Le projet Conkouati nous a fait souffrir et nous aussi, nous l’avons fait souffrir. Le directeur du projet, François,
notre cousin, un Vili comme beaucoup d’entre nous, s’époumonait à tenter de nous convaincre. Le blanc,
Christian, assis à côté de lui, ne comprenait pas tout ce qui se disait mais il semblait s’inquiéter de l’incompréhension
qui régnait entre nous. Ils sont venus et revenus de nombreuses fois et à chaque fois cela durait des
heures en palabres interminables. Cela s’est passé il y a quelques années. Je ne sais pas vraiment combien de
temps cela a prit, mais on a fini par se comprendre— incroyable! – et on a pu travailler ensemble.
Lorsque le blanc est parti, il nous a dit qu’il restait encore beaucoup à faire mais qu’un grand pas avait été fait
vers «la gestion durable des ressources naturelles» à Conkouati. Je suis d’accord qu’on a fait un long chemin
mais surtout je vois que nous, les habitants de Conkouati, avons aujourd’hui des règles de pêche, de chasse, et
de cueillette différentes d’avant, des règles qui ne protègent pas en premier lieu les ressources naturelles mais
qui nous protègent nous d’abord du pillage des ressources par les gens de l’extérieur et des abus des agents des
Eaux et Forêts.
Ce que je vois aussi c’est qu’à Conkouati, tous ces Comités, ces groupes de gens qui se sont mis ensemble et
toutes les discussions qu’ils ont eues, ont amélioré l’ambiance au village, ont créé des liens. Des tensions s’expriment
encore ici ou là mais notre façon de vivre et de penser est différente.
Et moi? Moi, je dois dire que je me sens plutôt fier d’avoir participé à l’organisation des accords et à plusieurs
réunions du COGEREN. La cogestion est notre initiative et je pense que ça vaut la peine de la défendre. Je ressens
un peu plus d’espoir pour l’avenir de notre vie et de celle de nos enfants. Cette fierté et cet espoir, c’est
peut être parce que nous avons maintenant une vision plus claire de notre avenir. Une vision que nous avons
bâtie ensemble, une vison que nous partageons… C’est drôle, je commence presque à penser comme le blanc du
projet!
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CADRER LE TRAVAIL
La première activité du projet est de clarifier les
problèmes et les opportunités pour préciser l’objectif
global du projet et élaborer un cadre interne
de travail. Cet objectif global vise “la conservation
de la biodiversité tout en satisfaisant les
besoins des populations vivant dans et autour de
la réserve”. Il est soutenu par des objectifs plus
spécifiques, des résultats à atteindre et des activités
à réaliser. La méthode de planification
adoptée est celle dite du «cadre logique». Ce
cadre, qui reste évolutif et qui est affiné plusieurs
fois au cours de l’exécution du projet permet
à l’équipe en place d’une part de focaliser
son attention sur des objectifs précis (exemple:
conservation prioritaire des espèces menacées
situées dans la réserve) et d’autre part de ne
pas trop dévier de ces objectifs sous la pression
de divers facteurs externes.
Un problème apparaît très tôt: l’insuffisance de
concertation des différents intervenants de
Conkouati avant le lancement du projet. Cela
doit être atténué par la recherche intense de
communication, de dialogue, et de participation
dès qu’elle s’avère possible.
CEESP Occasional Papers 2, Janvier 2004