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PETIT JOURNAL DE PRINTEMPS KABYLE Mai 2006

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Petit Journal de printemps kabyle – <strong>Mai</strong> <strong>2006</strong><br />

pas de douche dans la villa, j’ai fait installer un pommeau dans l’évier de la cuisine, sur lequel je<br />

grimpais pour me laver ! Pour me décrasser plus à fond, j’avais déniché le hammam de Aïn Benian, la<br />

localité voisine, distante d’un kilomètre à peine. C’est là que j’ai fait connaissance avec Hakim et son<br />

cousin Nassim et nous avons souvent passé des soirées ensemble au cours de cette première année.<br />

C’est Hakim qui m’a fait découvrir la musique kabyle.<br />

Au bout d’un an, nous avons été contraints de déménager et j’ai quelque peu perdu le contact<br />

avec Guyotville. En 1990, je me décide à rechercher Hakim. 1990, ce sont les élections municipales,<br />

remportées par le F.I.S42., et la montée en puissance de ce parti. Je retrouve Hakim, marié, père de<br />

famille, notable installé, vêtu d’une gandoura et portant barbe. Il me revoit cependant sans trop de<br />

gêne ; nous évoquons, un peu, les bons moments du passé. L’ambiance est lourde. Vient à passer le<br />

cousin Nassim et j’ai eu l’une des plus désagréables impressions de ma vie : celle d’être transparent,<br />

inexistant, un non-être, face à un regard absolument vide d’expression, une bouche fermée, ne<br />

laissant échapper que quelques mots en arabe pour dire à Hakim : « Je n’ai jamais rencontré cet<br />

homme ». Depuis seize ans, ce regard mort reste gravé dans ma mémoire.<br />

J’ai revu Hakim l’an passé et les retrouvailles furent vraiment cordiales, il m’a présenté toute<br />

sa famille, sa vieille maman. Pas revu Nassim et pas posé de question.<br />

Cette année, je retourne donc voir mon copain avec grand plaisir et sans appréhension. Je<br />

prends le bus à Baïnem et les arrêts se succèdent : « Falaise », « Saint Cloud ». Je descends à l’arrêt<br />

du centre d’Aïn Benian et me dirige à l’instinct vers la demeure de Hakim. Arrivé à la boutique, je<br />

passe la tête et je demande : « Mon frère, tu as des pièces pour réparer un frigidaire ? » Surprise de<br />

sa part, il me savait de retour au pays mais ignorait le moment exact de ma venue. Et quelques<br />

instants plus tard, je vois déboucher quelqu’un qu’il me présente comme son cousin Nassim : « Tu te<br />

souviens d’Eric ? » Et …. le visage de Nassim s’épanouit en un large sourire, on tombe dans les bras<br />

l’un de l’autre. Alors ?? Mystère. Qui était le Nassim de 1990 ? Le Nassim de <strong>2006</strong> se rappelle<br />

l’Eric de 1975, pas celui de 1990… Je serais prêt à mettre ma main au feu qu’il s’agit de la même<br />

personne. Le principal est que tout nuage est à présent dissipé.<br />

Après son départ, Hakim me confirme que son cousin était très proche du FIS à l’époque. Il<br />

me dit même : « En 1990, franchement, quand je t’ai vu arriver, j’ai trouvé que c’était courageux »<br />

Aujourd’hui, décidément, est un jour faste : Bilal, le cadet de Hakim est triomphant, il vient<br />

de passer brillamment son permis de conduire, du premier coup. Heureusement qu’il en est ainsi, j’ai<br />

l’impression que ma venue a porté chance, j’aurais été désolé du contraire. Quant à Mohamed, l’aîné,<br />

24 ans, il me propose un tour de scooter, jusqu’à El Djemila, histoire de revoir ma première demeure.<br />

Elle a bien triste mine, c’est la seule à ne pas avoir été restaurée, tandis que le petit port a fait peau<br />

neuve, considérablement agrandi, enjolivé, avec une jetée plus longue et de nouveaux restaurants qui<br />

concurrencent Sauveur, où, le temps du week-end, afflue la même foule d’Algérois qu’antan. En<br />

quittant Aïn Benian, je promets de nous revoir la semaine prochaine43 ; cette fois-ci ce sera pour un<br />

repas organisé entre vieux copains, avec Nassim retrouvé.<br />

Ce soir nous dînons dans une villa sur les hauteurs d’Alger, chemin des Glycines. C’est le<br />

quartier des ambassades, celle des U.S.A est un véritable camp retranché. Il n’existe pas de trottoir<br />

42 Front Islamique du Salut<br />

43 promesse non tenue, pour cause de timing extrêmement serré…

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