PETIT JOURNAL DE PRINTEMPS KABYLE Mai 2006
PETIT JOURNAL DE PRINTEMPS KABYLE Mai 2006
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pour nous prendre à témoin de toutes ses misères.<br />
Nous voici à Baïnem. La cité est envahie de végétation, particulièrement l’immeuble de<br />
Boussad, dont les murs sont recouverts, jusqu’à la terrasse, de plantes grimpantes. Il y a de la vigne<br />
au-dessus de la porte d’entrée. La salle à manger est devenue la chambre nuptiale pour le futur jeune<br />
couple, El Houcine et Tala, qui se marieront le 24 mai. Le lit est immense, eu égard aux dimensions<br />
d’El Houcine. Il manque le matelas qui doit arriver avec le trousseau de la mariée, le 12 mai.<br />
L’armoire qu’El Houcine a choisie est assortie au lit en termes de taille avec au moins trois miroirs.<br />
C’est l’ancienne chambre des enfants qui est devenu le séjour.<br />
Pendant que Boussad s’occupe de la réparation de son véhicule, nous allons visiter le magasin<br />
où Katalin travaille, à 150 mètres de chez eux. Il est ouvert depuis quatre mois et propose des<br />
colifichets importés. Pour préparer le mariage, elle a pris un mois de congé. Au retour, nous passons<br />
par le tir au pigeon de Baïnem, plus ou moins désaffecté, mais dont le site est très beau, large<br />
esplanade au bord de la falaise dominant la mer. Derrière, les maisons dégringolent en cascade des<br />
hauteurs abruptes et tout à fait en haut, tache verte sous un ciel sans nuage, la forêt de Baïnem. Un<br />
soleil éclatant sur une eau bleu foncé et un vent qui vous fouette le visage.<br />
De retour à l’appartement, Katalin prépare des « msemen3 », fourrés à la chukchuka (appelés<br />
« m’hadjeb » en arabe) tout en décrivant les préparatifs du mariage. Le 23 mai, une « délégation »<br />
partira à Akbou pour chercher la mariée. Je demande si le cortège sera imposant. « Non, me répond<br />
Katalin, parce que c’est dangereux. » Devant mon air interrogatif, elle me rassure : « pas ce que tu<br />
crois, c’est la route qui est dangereuse, les accidents de voiture, alors on limite le cortège à quelques<br />
véhicules ».<br />
L’auto est revenue, réparée, prête à nous conduire demain en Kabylie. El Houcine arrive vers<br />
21 heures de son chantier de Boudouaou, ressort pour me ramener un téléphone portable qui me<br />
servira ici et nous passons à table. On ne tardera pas à aller dormir, la journée a été bien remplie.<br />
Mercredi 3 mai<br />
Petit Journal de printemps kabyle – <strong>Mai</strong> <strong>2006</strong><br />
Nous prenons la route. A nouveau, traversée d’Alger, dans l’autre sens. La moutonnière est<br />
encombrée sur la voie opposée. Boussad me dit qu’on ne peut pas prévoir quand elle est<br />
embouteillée, cela peut survenir à tout moment. Pour aller sur la Kabylie, le trafic est fluide et on ne<br />
traverse plus aucune agglomération, même Tizi Ouzou est évitable à présent, c’est la première fois<br />
que j’emprunte la bretelle de contournement. C’est plus long en distance mais on ne s’énerve plus<br />
dans les embouteillages du centre ville. En fait, je me trompe, il y a une ville qu’on traverse encore,<br />
c’est Si Moussa. Ce nom me renvoie automatiquement à Moussa, l’un des « quatre » de la bande que<br />
formaient Fatiha, Sofiane, Abdallah et lui-même, au lycée puis à l’école de commerce. Moussa est<br />
mort en 1977 ou 78, dans un accident de voiture à Si Moussa, alors qu’il rentrait de Blida où il était<br />
appelé sous les drapeaux. C’est ce que j’avais appris à l’époque de la bouche de Sofiane. En 2004,<br />
sur les conseils de François, je suis allé manger un couscous kabyle dans un restaurant de son<br />
quartier, dans le XIe. A discuter avec le serveur, je me suis aperçu qu’il était de Tizi Rached, le<br />
3 Msemen : sorte de crêpe feuilletée cuite sur un plat en terre