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PETIT JOURNAL DE PRINTEMPS KABYLE Mai 2006

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précaire mais on ne s’y réfugie pas systématiquement, d’autres optent pour une laïcité à tout crin<br />

afin de protester contre une société qu’ils jugent bloquée.<br />

Faire des études de berbère pour l’enseigner à son tour ne donne pas l’assurance d’un poste<br />

et être affecté loin de chez soi a tout du cadeau empoisonné : pas de logement, pas de repas, des frais<br />

de transport, tout grève si lourdement le budget que l’on est dissuadé d’accepter une affectation.<br />

Une de mes rencontres fut un retraité, père tranquille à l’allure débonnaire, ayant vécu une<br />

mésaventure peu commune, qui vous fera réfléchir avant de choisir un associé : notre homme s’était<br />

porté acquéreur dans le Nord (de la France), en association avec un autre, pourtant kabyle lui aussi,<br />

comme quoi…, d’un petit hôtel restaurant ; cet établissement a bien marché, un certain temps,<br />

jusqu’à ce qu’il s’aperçoive que son compère, indélicat, faisait des détournements et compromettait<br />

l’avenir de l’entreprise. Voulant se désengager, il demande sa part, mais en pure perte. Il porte<br />

plainte, va en justice, se heurte à un mur. En désespoir de cause, il menace l’escroc de l’ultime<br />

sanction, espérant l’impressionner, mais face à son refus, il se voit contraint de passer à l’acte, sous<br />

peine de perdre la face, et lui tire un certain nombre de balles dans le corps, sans espoir de rémission,<br />

ni de remboursement, d’ailleurs… Condamné à cinq ans de prison, il n’en fait que trois à condition<br />

de ne plus remettre les pieds sur le sol français. Depuis il a refait sa vie et tenté d’oublier ce mauvais<br />

rêve. Il me fait admirer paisiblement le coucher de soleil sur le barrage de Tikobaïne.<br />

Toutes ces confidences, je les ai recueillies en une soirée, auprès d’inconnus, et sans les<br />

solliciter…<br />

Dimanche 21 mai<br />

Petit Journal de printemps kabyle – <strong>Mai</strong> <strong>2006</strong><br />

Le matin, entre 7h30 et 8h30, la route de Tikobaïne à Tizi Ouzou, qui croise celle de Tigzirtsur-mer<br />

au niveau du pont sur le Sebaou, est complètement embouteillée ; des milliers de véhicules,<br />

particuliers et fourgons, affluent vers la capitale de la Grande Kabylie pour acheminer leurs<br />

passagers vers leur lieu de travail. Si Tizi est surpeuplée et présente les caractéristiques d’une ville<br />

champignon, toutes les communes avoisinantes sont également en plein essor et voient leur<br />

population croître, contrairement aux villages qui ceignent le Djurdjura et dépendent des communes<br />

d’Ibudraren, Ouacifs, Maatkas, Mechtras, Boghni. Il y a deux rythmes de développement en<br />

Kabylie.<br />

Après un petit décrassage à mon hammam, je retrouve Farouk, le frère de Sofiane, devant la<br />

gare des fourgons. C’est le moment de mettre à exécution ma surprise : aller accueillir, à l’aéroport,<br />

Sofiane, « un ami de trente ans », mais un vrai, qui vient de Paris pour passer une semaine au village<br />

avec sa femme, Ourida, afin de meubler la maison qu’il vient d’achever de faire bâtir. Farouk conduit<br />

le véhicule que Sofiane a rapporté récemment, et son immatriculation remonte à la veille. Malgré<br />

qu’il soit très spacieux, il sera bondé tout à l’heure, car nous sommes cinq adultes et l’aînée de<br />

Farouk, 5 ans, en plus d’une montagne de bagages. Sofiane, toujours serviable (trop ?) s’est proposé<br />

de déposer à Tizi Ouzou une femme originaire de son village, venue voir ses enfants. Nous sommes<br />

tout heureux de nous retrouver et je réussis même à citer, à une exception près, dans l’ordre, les<br />

douze frères et sœurs de Sofiane, que je connais tous.<br />

Nous entamons la longue succession des villages des Beni Douala perchés sur les crêtes, l’une

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