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— Il ne veut plus de moi, répondit Hester tristement.<br />
— En êtes-vous <strong>ce</strong>rtaine ? Vous l’a-t-il affirmé, ou est-<strong>ce</strong> encore le fruit de votre<br />
imagination ?<br />
— Il pense que j’ai tué ma mère.<br />
— Oh ! murmura Philip.<br />
Il se tut pendant un instant, puis, d’une voix calme, demanda :<br />
— Est-<strong>ce</strong> vrai ?<br />
Un léger tressaillement, et elle se rapprocha de lui :<br />
— À quoi rime <strong>ce</strong>tte question ?<br />
— Je pensais qu’il serait opportun de le savoir. Entre nous, évidemment. Il n’est nullement<br />
question d’alerter la poli<strong>ce</strong>.<br />
— Si je l’avais tuée, croyez-vous vraiment que je l’avouerais ?<br />
— J’admets qu’il serait plus avisé de vous taire.<br />
— Donald m’a donné à entendre que j’avais commis le crime, ajoutant que, si je me<br />
confiais à lui, tout s’arrangerait : nous nous marierions ; il prendrait soin de moi, et le drame<br />
serait oublié.<br />
Philip se prit à siffloter.<br />
— Hum ! Hum ! murmura-t-il ensuite, les yeux fixés sur le plafond.<br />
Déjà Hester ajoutait :<br />
— À quoi bon lui parler ? Il ne me croirait pas.<br />
— Il le devrait, si vous êtes franche.<br />
— Eh bien ! je ne l’ai pas tuée ! Vous m’entendez : je ne l’ai pas tuée !… Voilà qui n’est<br />
pas très convaincant, je suppose ?<br />
— La vérité ne convainc pas toujours, hélas !<br />
— Le fait est que nous ne savons rien, que nous nous regardons tous dans le blanc des<br />
yeux. Mary m’observe, ainsi que Kirsten. Celle-ci s’effor<strong>ce</strong> tellement de me protéger que je<br />
suis persuadée qu’elle me croit coupable. Quelle chan<strong>ce</strong> ai-je ? Il v<strong>au</strong>drait mieux que je me<br />
jette dans le vide !<br />
— Pour l’amour du Ciel, Hester !<br />
— Ai-je le choix ? J’ai tout perdu. Comment vivre ainsi ?… Après tout, peut-être l’ai-je<br />
vraiment tuée, et c’est le remords qui me ronge ! La seule délivran<strong>ce</strong>…<br />
— Allons ! Ne perdez pas la tête !<br />
Philip étendit un bras et l’attira à lui. Elle tomba presque sur son f<strong>au</strong>teuil et,<br />
spontanément, il l’embrassa.<br />
— Ce dont vous avez besoin, ma chère, c’est d’un mari ! dit-il ensuite. Mais pas d’un<br />
pédant comme <strong>ce</strong> Donald Craig, farci de psychiatrie et de jargon médical. Certes, vous êtes<br />
une sotte, Hester, mais quel charme se dégage de vous !<br />
D’instinct, Philip se tourna vers la porte ; elle était ouverte et Mary Durrant se tenait sur<br />
le seuil. Trop tard, Hester parvint à se redresser, tandis que l’invalide adressait un timide<br />
sourire à sa femme.<br />
— J’essayais de réconforter Hester, lui dit-il quelque peu décon<strong>ce</strong>rté.<br />
— Vraiment ! répondit-elle simplement.<br />
Elle déposa simplement le plate<strong>au</strong> du déjeuner sur une petite table qu’elle rapprocha du<br />
f<strong>au</strong>teuil de Philip, sans un regard pour Hester dont les yeux se portaient tour à tour sur<br />
chacun d’eux.