Forêts à caractère naturel
Forêts à caractère naturel
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Autres perspectives pour les gestionnaires<br />
Faut-il supprimer les arbres morts sous prétexte qu’ils constituent<br />
des foyers potentiels de pullulation de scolytes ? Rappelons tout<br />
d’abord quelles sont les essences forestières concernées. Les dégâts<br />
(par un comportement de ravageur primaire) occasionnés <strong>à</strong> des pins<br />
ont été constatés en France pour la première fois en 2001 et font<br />
suite <strong>à</strong> la tempête de 1999. Ils ont donc un <strong>caractère</strong> exceptionnel.<br />
Sur le sapin, l’intensité des dégâts est liée <strong>à</strong> l’état sanitaire des<br />
arbres (stress hydrique en cas de sécheresse). L’absence de dégâts<br />
importants sur sapins en 2001 (printemps humide) malgré les<br />
grandes quantités de bois mort au sol nous indique ainsi qu’il n’est<br />
pas nécessaire de supprimer les sapins morts pour lutter contre le<br />
scolyte du sapin, l’utilisation d’essences et d’écotypes adaptés aux<br />
conditions stationnelles est une mesure plus opportune. Les<br />
pessières sont les forêts les plus touchées par les scolytes. Dans les<br />
cas graves, plusieurs milliers d’hectares peuvent être touchés. Mais<br />
bien que certains scolytes puissent se disperser sur près de 5 km<br />
autour de leur zone de reproduction, les dégâts occasionnés aux<br />
arbres vivants sont rarement constatés <strong>à</strong> plus de quelques centaines<br />
de mètres des foyers de pullulation. Le maintien des épicéas morts<br />
dans une réserve forestière intégrale ne pose donc aucun problème<br />
sanitaire si aucune pessière exploitée ne se trouve <strong>à</strong> proximité. Dans<br />
le cas contraire, il conviendra de délimiter une zone tampon dans<br />
laquelle les scolytes seront combattus ou les épicéas remplacés (lors<br />
du prochain plan d’aménagement forestier).<br />
Notons que les zones de stockage de bois peuvent constituer des<br />
sources de pullulation bien plus dangereuses que les arbres morts<br />
disséminés en forêt. Enfin, n’oublions pas non plus que si les forêts <strong>à</strong><br />
<strong>caractère</strong> <strong>naturel</strong> sont souvent montrées du doigt pour les risques<br />
qu’elles font encourir aux forêts de production, l’inverse est également<br />
vrai. Suite <strong>à</strong> des dégâts de tempête dans des plantations d’épicéas, les<br />
pullulations de scolytes se sont parfois également propagées depuis<br />
ces forêts de production vers les réserves intégrales mitoyennes.<br />
Il convient donc de rester objectif quant aux risques réels de<br />
pullulation d’insectes ravageurs <strong>à</strong> partir de réserves intégrales. Les<br />
scolytes pouvant se comporter comme des ravageurs primaires<br />
représentent souvent moins d’un pour-cent du nombre total de<br />
scolytes 121 et en l’absence d’une forte perturbation (comme la tempête<br />
exceptionnelle de 1999 ou un affaiblissement chronique des<br />
peuplements par des pluies acides), leur impact sur les forêts de<br />
production est quasi nul. Leur habitat de prédilection étant les arbres<br />
mourants ou fraîchement mort (avant que le phloème* ne soit sec), ce<br />
n’est qu’en cas de mort massive des arbres que les scolytes vont<br />
pouvoir pulluler mais la quantité de bois mort dans une forêt <strong>à</strong><br />
<strong>caractère</strong> <strong>naturel</strong> n’est pas un facteur de risque 120 . Ce bois étant<br />
accumulé sur de longues périodes et étant constamment renouvelé, la<br />
proportion de bois mort «récent» (moins de 2 ans) est habituellement<br />
relativement faible. Certains scolytes (habitant souches et autres<br />
résidus d’exploitation) sont d’ailleurs plus abondants dans les forêts<br />
exploitées que dans les forêts <strong>à</strong> <strong>caractère</strong> <strong>naturel</strong> 120 .<br />
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Pic tridactyle (Photo : Arnaud Hurstel).<br />
LE PROBLÈME DES SCOLYTES DANS<br />
LE PARC NATIONAL DE BAVIÈRE (D).<br />
Plus de la moitié des 24.250 ha de ce parc<br />
est classée en réserve intégrale et une<br />
grande partie des épicéas, affaiblis notamment<br />
par les pluies acides, sont attaqués<br />
par des scolytes. La vocation du Parc<br />
National étant la restauration d’une grande<br />
forêt <strong>à</strong> <strong>caractère</strong> <strong>naturel</strong> (voir § 4.1), les<br />
arbres morts et mourants sont laissés sur<br />
place et servent notamment d’habitat au<br />
pic tridactyle, espèce rare et emblématique<br />
des forêts <strong>naturel</strong>les européennes<br />
qui atteint l<strong>à</strong> de très fortes densités. La<br />
lutte contre les scolytes n’a lieu que dans<br />
le périmètre (bande de 500 m ou plus)<br />
extérieur du Parc National (sur une superficie<br />
de 3.500 ha en 1998) afin de limiter<br />
leurs dégâts dans les forêts exploitées<br />
environnantes<br />
Réserve forestière intégrale dans le Parc national de<br />
Bavière (Photo : Arnaud Hurstel).<br />
Autres perspectives pour les gestionnaires<br />
6.1.3 Les arbres dangereux<br />
Un autre problème récurrent est celui du risque lié <strong>à</strong> la chute<br />
d’arbres ou de branches mortes.<br />
Bien que les accidents soient extrêmement rares, on considère, <strong>à</strong><br />
juste titre, que la chute de bois mort est susceptible de causer de<br />
graves accidents. Dès lors, pour limiter leur responsabilité,<br />
propriétaires et gestionnaires forestiers ont tendance <strong>à</strong> vouloir<br />
éliminer tous les arbres «<strong>à</strong> risque» (morts, malades, creux ou mal<br />
formés) de part et d’autre des sentiers et chemins forestiers sur une<br />
largeur équivalente <strong>à</strong> la hauteur du peuplement. Si l’impact de ces<br />
mesures est négligeable dans les grands massifs forestiers peu<br />
desservis, il n’en est pas de même dans les forêts périurbaines. Dans<br />
certaines forêts de la ville de Strasbourg par exemple, l’objectif du<br />
gestionnaire est de restaurer des forêts <strong>à</strong> forte naturalité mais le<br />
réseau de sentiers, chemins et parcours sportifs est si dense que la<br />
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