CES FREINS QUI PLOMBENT L'INDUSTRIE - FOOD MAGAZINE
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DroIT DE l’EnTrEPrISE<br />
Un tabou est levé<br />
Le harcèlement au travail<br />
Autrefois sujet tabou , le harcèlement sur le lieu de travail préoccupe<br />
davantage employeurs et employés , depuis l’intervention de la Loi<br />
65/1999 portant code de travail . En effet, le phénomène qui infestait<br />
l’entreprise sans pour autant susciter de la part du legislateur une<br />
quelconque protection pour les victimes, est désormais circonscrit<br />
. par la loi , au moins dans l’un de ses aspects<br />
L’article 40 du Code de Travail<br />
Malgré l’absence de statistiques fiables<br />
reflétant la réalité et l’ampleur du fléau , le<br />
législateur, sensible aux plaintes répétitives<br />
des salariés , a entendu leurs doléances<br />
pour innover en la matière .<br />
Avec les dispositions de l’article 40 de la<br />
Loi 65/1999 , le harcèlement sexuel est<br />
considéré comme une faute lourde , grave<br />
et inexcusable de l’employeur .<br />
La preuve du comportement fautif incombe<br />
à la victime : tous les moyens de<br />
preuve sont acceptés ( indices , présomptions<br />
, aveux , écrits , témoignages , … ).<br />
La difficulté peut néanmoins résider dans<br />
l’absence même de définition de la notion<br />
de harcèlement , difficulté qui donne plus<br />
de fil à retordre quant à la limite du comportement<br />
répréhensible .<br />
Devant un article 40 laconique , l’on peut<br />
se hasarder à appréhender le harcèlement<br />
comme des violences physiques , morales<br />
et psychologiques de nature à porter<br />
atteinte à la dignité , à l’honneur et à la<br />
liberté de l’employé pendant le travail et<br />
sur le lieu de son exécution.<br />
Un contenu encore plus large<br />
Si l’article 40 précité se limite au harcèlement<br />
sexuel , il va s’en dire que la<br />
notion de simple harcèlement peut revêtir<br />
plusieurs aspects dans son acception la<br />
plus large et porter préjudice moralement<br />
aux salariés .<br />
En notant que le Code de Travail ( Loi<br />
65/1999 ) ne fait aucune allusion au<br />
harcèlement moral , force est de constater<br />
que brimades , humiliations , discriminations,<br />
persécutions , agressivité sont autant<br />
de comportements dommageables subis<br />
en entreprise par ceux qui constituent sa<br />
première force de frappe .<br />
Ainsi , il n’en demeure pas moins que<br />
toute atteinte à la probité , à la moralité par<br />
des procédés répétitifs de longue durée dévalorisant<br />
la ou le salarié (e) est susceptible<br />
d’être qualifiée de harcèlement moral que<br />
le législateur doit intégrer dans le fameux<br />
article 40 .<br />
Il aurait été plus logique de considérer tout<br />
d’abord le harcèlement moral comme faute<br />
grave commise par l’employeur, à l’instar<br />
des législations étrangères ( française<br />
notamment ) pour étendre ultérieurement<br />
cette même qualification de comportement<br />
fautif au harcèlement sexuel .<br />
Sur ce point , nul n’ignore l’enfer de<br />
l’univers moderne de management avec<br />
ces basses œuvres d’isolement , de retrait<br />
de missions , de surcharge de travail , …<br />
dont sont victimes les salariés. Dès lors ,<br />
le harcèlement sous tous ses aspects reste<br />
punissable en droit du travail et ce d’autant<br />
plus que la législation pénale se charge<br />
aussi de réprimer l’autre dimension de<br />
cette faute grave , qu’est le harcèlement<br />
sexuel.<br />
La sanction :<br />
le licenciement abusif<br />
L’article 40 est on ne peut plus clair quant<br />
à la sanction :<br />
Le départ du salarié pour cause de harcèlement<br />
sexuel prouvé est considéré comme<br />
un licenciement abusif lui ouvrant droit à<br />
dommages-intérêts .<br />
En effet , le salarié victime est en droit<br />
de saisir les juridictions compétentes par<br />
l’enrôlement d’une requête introductive<br />
d’instance à l’encontre de l’employeur<br />
pour l’obtention des indemnisations lui<br />
revenant sur la base d’un mois et demi de<br />
salaire par année ou fraction d’année de<br />
travail , sans dépassement de 36 mois , le<br />
tout sans préjudice d’autres indemnités<br />
auxquelles il aurait droit , à l’exclusion<br />
Maître Aziz BENKIRANE<br />
Avocat à la Cour Suprême<br />
de celle de préavis car il s’agit de départ<br />
unilatéral.<br />
La jurisprudence n’a, semble-t-il, pas eu<br />
l’occasion de se prononcer sur ce point.<br />
Elle aura fort à s’inspirer de son homologue<br />
française qui n’hésite guère depuis<br />
2008 de considérer que l’existence de faits<br />
présumés de harcèlement invoqués par le<br />
salarié sont constitutifs de faute grave, à<br />
charge pour l’employeur de rapporter la<br />
preuve que ses agissements sont justifiés<br />
par des éléments étrangers à tout comportement<br />
fautif.<br />
Pour une charte de bonne conduite<br />
Longtemps galvaudée, la notion de harcèlement<br />
moral ou sexuel en milieu de travail<br />
reste , malgré la clarté des dispositions de<br />
l’article 40 , des plus fuyantes.<br />
Pour sortir de l’impasse juridico-jurisprudentielle<br />
, il est recommandé aux entreprises<br />
de se doter d’une charte de bonne<br />
conduite fédérant autour d’elle tous les<br />
salariés en faveur desquels les employeurs<br />
s’interdisent tel ou tel comportement dans<br />
les relations bilatérales de travail .<br />
Sans omettre également , sous contrôle<br />
des juges , d’élaborer conjointement le<br />
règlement intérieur pour y insérer les sanctions<br />
de tout harcèlement hiérarchique ou<br />
horizontal d’un salarié investi de fonction<br />
d’autorité sur un subalterne .<br />
Sur ce cas précis , il est considéré que le<br />
dirigeant d’entreprise est solidairement<br />
responsable avec l’auteur des faits de<br />
harcèlement , car il reste le seul engagé par<br />
une obligation de résultat consistant à<br />
prévenir toute attitude de ce genre de la<br />
part de ses salariés .Ce dispositif préventif<br />
est à même de permettre aux représentants<br />
du personnel d’apporter les explications<br />
convaincantes aux questions de leurs<br />
collaborateurs.<br />
<strong>FOOD</strong> <strong>MAGAZINE</strong> - N° 20 / Du 15 Mars au 15 Avril 2010 17