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Texte complet - Université de Liège

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Introduction au système <strong>de</strong> nomination <strong>de</strong>s serpents en grec ancien<br />

tofaune grecque (Bodson 2009 : 91-104). La<br />

<strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> la notice, qui se distingue<br />

en outre par la signature-acrostiche (345-353)<br />

du poète (voir Jacques 2002 : LXXI), relate la<br />

légen<strong>de</strong> explicative <strong>de</strong> la mue <strong>de</strong>s serpents et <strong>de</strong><br />

l’étymologie <strong>de</strong> l’ophionyme dipsas 67 . L’acteur<br />

principal <strong>de</strong> cet « immémorial muthos » (343) 68 ,<br />

qui se passe dans un endroit indéterminé, est un<br />

ophidien jusque-là anonyme et dont il n’est pas<br />

dit qu’il est déjà venimeux lorsque commence la<br />

scène 69 . Il est le gardien d’une fontaine aux eaux<br />

<strong>de</strong> laquelle voudrait s’abreuver l’âne chargé d’un<br />

ca<strong>de</strong>au <strong>de</strong> Zeus aux humains : l’éternelle jeunesse.<br />

Le serpent exige <strong>de</strong> recevoir celle-ci avant<br />

d’accé<strong>de</strong>r à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’âne. Il est ainsi l’archétype<br />

<strong>de</strong>s reptiles (herpeta) 70 qui « toujours<br />

désormais jettent leur vieille peau (gēraleon …<br />

67. Voir scholie Nicandre, Ther., 343-354 (Crugnola 1971 : 149,<br />

l. 21-150, l. 13). Dans la première partie <strong>de</strong> la scholie (p. 149,<br />

l. 8-21 ; ci-<strong>de</strong>ssous, 2.1.3.2.1 : « Locomotion »), l’aition concerne<br />

la locomotion lente <strong>de</strong>s dipsa<strong>de</strong>s (voir aussi p. 154, l. 20-21 :<br />

schol. 357a), avec référence à Sophocle (fr. 362 [Radt 1977 :<br />

326]) ; Élien, Le propre <strong>de</strong>s animaux, VI, 51, avec référence au<br />

poète lyrique Ibycos (fr. 61 [Page 1962 : 168, n° 342]), aux tragiques<br />

Sophocle (réf. ci-avant) et Aristias (9 F 8 [Snell 1971 :<br />

67]), aux comiques Deinolochos (fr. 8 [Kassel & Austin, I, 2001 :<br />

181]) et Apollophanès (fr. 9 [Kassel & Austin, II, 1991 : 522]).<br />

Eutecnios, Paraphrasis 334-358 (Papathomopoulos 1976 : 20,<br />

l. 22-21, l. 16). Voir Jacques 2002 : 120-122, n. 32-34, selon qui<br />

Nicandre serait la source d’Élien ; cf. Magnelli 2010 : 215-216.<br />

68. Comparer dans la tradition babylonienne : Épopée <strong>de</strong><br />

Gilgamesh, Tablette XI (George, I, 2003 : 722-723, ll. 305-307 ;<br />

cf. II, 2003 : 895-897). Deonna 1956 : étu<strong>de</strong> du muthos grec à<br />

la lumière <strong>de</strong>s traditions <strong>de</strong>s peuples antiques et mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong>s<br />

différents continents (mythologie <strong>de</strong> l’âne au Proche-Orient et<br />

en Afrique), l’origine <strong>de</strong>s récits <strong>de</strong> Nicandre et d’Élien <strong>de</strong>meurant<br />

incertaine (p. 340 : méprise sur Lucain, Pharsale, IX, 610 et, <strong>de</strong><br />

là, sur le sens passif attribué à l’ophionyme ; sur le sens actif, voir<br />

ci-après, n. 74 : Raschle, Wick). Comme précé<strong>de</strong>mment pour<br />

Grévin (cf. ci-<strong>de</strong>ssous, 2.2.1) et Kádár (cf. ci-<strong>de</strong>ssous, 2.2.2), dipsas<br />

chez Nicandre est passif (« thirsty ») pour Reeve (1996/1997 : 246).<br />

69. Nicandre, Ther., 351 et 357 : « ‘bête sauvage (dangereuse<br />

par son venin)’ » (thēra, thēr) ; schol. Nic., Ther., 343-<br />

354 (Crugnola 1971 : 149, l. 13, 17, 18-150, l. 6, 8, 9) :<br />

« serpent(s) » (ophis, opheis) ; Élien, Le propre <strong>de</strong>s animaux,<br />

VI, 51 : « serpent » (ophis) ; Eutecnios, Paraphrasis 334-<br />

358 (Papathomopoulos 1976 : 21, l. 4-5, 6, 8, 10, 14) : « ‘bête(s)<br />

sauvage(s) (dangereuse[s] par son, leur venin)’ » (thērion, thēria).<br />

70. « Reptiles » au sens <strong>de</strong> « serpents » : voir Bodson 2009 : 55,<br />

n. 13 ; 61-62 (le terme est absent <strong>de</strong>s grands traités « zoo- et<br />

biologiques » aristotéliciens ; Bodson 1990a ; 2004b ; à paraître).<br />

phloon) » (355) et « restent presque toujours<br />

jeunes » 71 , tandis que les humains endurent à<br />

jamais l’épreuve <strong>de</strong> la vieillesse (gēras). De surcroît,<br />

il s’empare du mal dont souffrait l’âne<br />

non pour en subir lui-même les tourments,<br />

mais pour l’instiller en venin aux victimes <strong>de</strong> ses<br />

morsures 72 . Il se fait ainsi vipère et le symptôme<br />

diagnostique principal <strong>de</strong> sa morsure, à l’avis<br />

<strong>de</strong>s Grecs, justifie le nom dipsas sous lequel il<br />

sera dorénavant connu 73 .<br />

Ceux <strong>de</strong>s auteurs qui, par la suite, — à partir<br />

<strong>de</strong> Lucain 74 —, localisent explicitement<br />

une « assoiffante » la placent « dans les pays<br />

chauds » (du sud <strong>de</strong> la Méditerranée) 75 . Plusieurs<br />

la situent en Libua (c’est-à-dire d’abord<br />

l’actuelle Libye, puis l’Afrique du Nord) 76 ,<br />

71. Scholie a Nicandre, Ther., 355 (Crugnola 1971 : 154, l. 13-14) ;<br />

cf. Eutecnios, Paraphrasis 334-358 (Papathomopoulos 1976 : 21, l.<br />

10-13). Gēras « vieillesse » est le plus usuel <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong> l’exuvie (cf.,<br />

par exemple, Aristote, HA, V, 17, 549b26 ; Nicandre, Ther., 31).<br />

72. Nicandre, Ther., 357-358 ; schol. 343-354 (Crugnola 1971 :<br />

149, l. 20-21 ; 150, l. 9-11) ; Arétée <strong>de</strong> Cappadoce, De causis,<br />

IV, 2, 5 (Hu<strong>de</strong>, 1958 : 66, l. 20-21), avec ophionyme apposé<br />

— en première position — à la locution to herpeton thērion « le<br />

reptile ‘bête sauvage (dangereuse par son venin)’ », dont le second<br />

substantif, lui aussi apposé, circonscrit le premier (cf. ci-avant,<br />

n. 56 : Kühner & Gerth). Voir ci-<strong>de</strong>ssous, 2.1.3.2.2.<br />

73. Schol. c Nicandre, Ther., 357 (Crugnola 1971 : 155, l. 3) ;<br />

cf. ci-<strong>de</strong>ssus, 2.1.1, n. 46 (schol. Lycophron).<br />

74. Lucain, Pharsale, IX, 610 (in mediis sitiebant dipsa<strong>de</strong>s undis « au<br />

milieu <strong>de</strong>s eaux les assoiffantes étaient assoiffées », lat. sitis « soif »<br />

correspondant à grec dipsa), 718 : torrida dipsas (cf. Commenta<br />

Bernensia, ad IX, 718 [Usener 1869 : 309, l. 21] : « parce qu’elle<br />

fait mourir <strong>de</strong> soif ceux qu’elle a frappés »), 737-762 (sur torridus<br />

épithète <strong>de</strong> prester en IX, 790, voir ci-<strong>de</strong>ssous, 4.3.1.2 : Lucain,<br />

ad n. 289). Cf. Raschle 2001 : 172-173 (en particulier, sur le<br />

sens actif <strong>de</strong> dipsas et le jeu <strong>de</strong> mots du vers 610 ; référence au<br />

muthos <strong>de</strong> Ther., 343-358), 237-238 (ad 718), 251-266 (ad 737-<br />

762) ; Wick, II, 2004 : 239-240 (ad 610, dans le même sens que<br />

Raschle), 299 (ad 718), 311-322 (ad 737-762).<br />

75. Cf. Martial, III, 44, 7 (cf. Fusi 2006 : 324) ; Celse, V, 27, 7 et 10.<br />

76. Lucain, Phars., IX, 610, 738, 754 (sur l’itinéraire suivi par<br />

Caton et son armée dans le désert bordant la Gran<strong>de</strong> Syrte, voir<br />

Aumont 1968b : 317-319 et carte ad p. 304) ; Lucien, Dipsa<strong>de</strong>s,<br />

1-3, 6, 9 ; Solin, 27, 28 et 31 (Mommsen 1895 : 122, l. 3, 17) ;<br />

Isidore <strong>de</strong> Séville, Étym., XII, 4, 32 (implicitement par la citation<br />

<strong>de</strong> Lucain). Cf. Polémius Silvius, Laterculus, 3 (Mommsen 1892 :<br />

543, l. 32) : « dipsas » (dans une liste mêlant les noms <strong>de</strong> serpents<br />

européens et africains). Les glossaires latins et gréco-latins, d’où<br />

les synonymes sont absents, définissent dipsas (avec <strong>de</strong>s variations<br />

orthographiques) : « nom <strong>de</strong> serpent, genre <strong>de</strong> serpent ».<br />

L’ophionyme est assorti, dans plusieurs articles, <strong>de</strong> l’épithète (avec<br />

ANTHROPOZOOLOGICA • 2012 • 47. 1. 83

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