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Revista de Psicanálise

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146par peur <strong>de</strong> la contagion, il incarne le signifiant cadavre, son nom <strong>de</strong> jouissance, la fixion duRéel <strong>de</strong> son symptôme. «La mort, je l’ai digérée et rejetée, m’étant beaucoup nourri d’imageslugubres…En proie à <strong>de</strong>s terreurs incontrôlées, je forçais, je fouillais mon cadavre. Je voyais, jesentais <strong>de</strong>s vers grouillants dans ma chair pourrie. Quand l’épouvante me prenait, il me fallait lasurpasser, traverser l’enfer <strong>de</strong> ma propre putréfaction pour trouver le calme. Mais la vraie paix n’estpas dans l’oubli, elle est au contraire dans l’extrême attention constante (j’ajoute: que la jouissancene débor<strong>de</strong> pas). Une extrême présence <strong>de</strong> ma mort est présence d’esprit».On pourrait dire que Dali est profondément lacanien, à la recherche <strong>de</strong> «la structureabsolue», qui n’est pas la structure du langage, à travers les liens qui pourraient unir les formes,structures, entre elles: par exemple l’emblème du corps glorieux dans une punaise hétéroptère oul’harmonie universelle dans le grain <strong>de</strong> beauté sur le lobe <strong>de</strong> l’oreille gauche, qui le fascine chezGala comme chez Picasso. Dieu est «le réellement réel», non pas Dieu le Père mais le dieu <strong>de</strong> lajouissance. Doté d’une mémoire prodigieuse, il son<strong>de</strong> férocement tous les domaines <strong>de</strong> laConnaissance à la recherche <strong>de</strong> l’absolu <strong>de</strong> la jouissance qu’il appelle le ciel, un ciel qui n’est ni enhaut, ni en bas mais au creux <strong>de</strong> l’estomac, «dans l’aisselle épilée d’une femme, j’ai cherché le ciel,quand j’ai remué avec ma béquille le tas putréfié et grouillant <strong>de</strong> vers <strong>de</strong> mon hérisson crevé, j’aicherché le ciel».Pour Louis Pauwels, celui qui, pour Dali, est celui qui l’a le mieux entendu, «il est le seulpossédé, je crois, qui a su s’exorciser lui-même», possédé par le réel <strong>de</strong> la jouissance <strong>de</strong>s sensations.La vie secrète <strong>de</strong> Salvador Dali par Salvador Dali, «ce long livre <strong>de</strong>s secrets <strong>de</strong> ma vie» est àentendre «non comme le jeu provocateur d’un pervers polymorphe, phénoménalement retardé,conservant intactes toutes les réminiscences <strong>de</strong>s paradis érotogènes du nourrisson» mais comme unessai <strong>de</strong> rigueur d’atteindre un savoir sur le réel d’une jouissance monstrueuse. « J’ai toujours suavec précision ce que je désirais obtenir <strong>de</strong> mes sens (l’essentiel pour lui est dans la jouissance <strong>de</strong>simages). Il n’en est pas <strong>de</strong> même pour mes sentiments légers et fragiles comme <strong>de</strong>s bulles <strong>de</strong> savoncar je n’ai jamais pu prévoir le cours hystérique et saugrenu <strong>de</strong> ma conduite. Bien plus encore ledénouement final <strong>de</strong> mes actes me surprend le premier, comme si chaque fois, parmi les mille bullesirisées <strong>de</strong> mes sentiments, l’une d’elle sauvée d’une chute mortelle réussissait miraculeusement àatterrir en pleine réalité, se métamorphosant à cette secon<strong>de</strong> en un <strong>de</strong> ces actes décisifs aussimenaçant que l’explosion d’une bombe…», bouts <strong>de</strong> réel, fragments d’existence qui suspen<strong>de</strong>nt letemps dans un sentiment d’éternité qui annule la mort.La Connaissance (avec un grand C) est donc pour Dali une affaire <strong>de</strong> jouissance absolue.Lacan dans la Présentation <strong>de</strong>s Mémoires d’un névropathe, articule l’esthétique à la Connaissancequ’il nommait à l’époque paranoïaque «thème favorable à toutes les modalités <strong>de</strong> l’esthétique…ceque savait dérouler notre ami Dali».Louis Pauwels, salue le regard d’une «acuité héroïque» que Dali a su porter sur son cas.«Comme il m’est donné <strong>de</strong> pouvoir m’exprimer en peignant, je peins. Mais je suis d’abord unhomme qui a une vision du mon<strong>de</strong> et une cosmogonie, qui est habité par un génie capabled’entrevoir la structure absolue, soit la jouissance Autre, le (S(A barré), la jouissance non limitéepar la jouissance Une qu’est la jouissance phallique. C’est un génie qui le sait et n’en jouit pas.«Depuis 1929 (Dali a 25 ans, année <strong>de</strong> sa rencontre avec Gala), j’ai eu la conscience nette <strong>de</strong> mongénie et je dois avouer que cette conscience <strong>de</strong> plus en plus enracinée dans mon esprit ne m’ajamais procuré <strong>de</strong>s émotions du genre appelé sublime (peut on parler <strong>de</strong> mégalomanie?). Cela luidonne seulement le sentiment d’une «constance», d’une consistance, soit son nom <strong>de</strong> sinthome,«Dali, le génie». C’est du reste le titre <strong>de</strong> son autre récit autobiographique: Le journal d’un génie.Héroïque en effet ce temps d’efforts asymptotiques pour «s’accomplir en tant quesymptôme», pour se renommer et un nom propre, fut il <strong>de</strong> symptôme, souligne Colette Soler, esttoujours solidaire d’un lien social.

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