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Revista de Psicanálise

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157en tant qu’il n’y a pas <strong>de</strong> sujet conscient qui puisse s’en approprier – mais qui est: non seulementcomme sujet <strong>de</strong> l’inconscient, mais aussi comme jouissance diffuse <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> l’activitépsychique dans le corps. Dans l’Introduction à l’édition alleman<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Écrits (1973), Lacanrésumera ainsi «la découverte <strong>de</strong> Freud»: l’inconscient travaille sans y penser, ni calculer, juger nonplus, et pourtant le fruit est là: un savoir qu’il ne s’agit que <strong>de</strong> déchiffrer puisqu’il consiste dans unchiffrage 4 . Mais, dans les mêmes jours, dans le résumé du séminaire Ou pire…, il y met son grain <strong>de</strong>sagesse: Ce qui pense, calcule et juge, c’est la jouissance 5 .La question <strong>de</strong> l’inconscient est, dès le début, la question du rapport entre la pensée et lecorps, parce que – dira Lacan en 1966 aux étudiants <strong>de</strong> philosophie 6 , en polémique avec beaucoup<strong>de</strong> leur maîtres – ce n’est pas à sa conscience que le sujet est condamné, c’est à son corps. Lacan aconsacré au rapport épistémo-somatique sa première réponse dans Télévision. L'inconscient, dit-il,c’est l'ex-sistence d'un autre sujet à l'âme, qui est la supposition <strong>de</strong> la somme <strong>de</strong> ses fonctions aucorps; et le sujet <strong>de</strong> l'inconscient ne touche à l'âme que par le corps 7 . C’est le même parcours,centrifuge et puis centripète qui fait l’inconscient freudien <strong>de</strong>s origines, et que Freud développeradans sa métapsychologie.Corps e pensée inconsciente font corps. Dans un <strong>de</strong> ses premiers textes explicitementconsacrés à la question res cogitans/res extensa, Propos sur la causalité psychique, Lacan opposaità Henry Ey qu’il faut entendre le dualisme cartésien comme un dualisme entre pensée et extension,et non entre organique et psychique 8 . Le corps n’est pas caractérisé par la dimension <strong>de</strong> l’étendue –il dira après, dans son Discours aux mé<strong>de</strong>cins 9 – un corps est quelque chose qui est fait pour jouir,jouir <strong>de</strong> soi-même. Mais cela – il ajoutera dans Encore – ne se jouit que <strong>de</strong> le corporiser <strong>de</strong> façonsignifiante 10 .Le corps n’est pas limité à un seul registre. Lacan dira dans L’insu…: il y a un corps <strong>de</strong>l'Imaginaire; un corps du Symbolique, et un corps du Réel 11 . Du corps <strong>de</strong> l’imaginaire, là, il ne ditrien, mais nous le connaissons bien: c’est le supporte qui nous offre le corps comme imagespéculaire, en tant que matrice où le je se précipite en une forme primordiale. Du corps dusymbolique il nous dit: c'est lalangue – un autre corps, où les mots font corps en tant que substancejouissante. C’est le corps morcelé <strong>de</strong> la relation <strong>de</strong> représentation du sujet dans un essaim <strong>de</strong> traceslaissées par l’Autre, cet Autre que dans le séminaire XI il appelait «la nature», ce qui fournit lessignifiants, qui ensuite organisent et structurent les rapports humains 12 . Du corps du Réel, Lacan ditlà que «on ne sait pas comment il sort». L’année avant, il avait dit: c’est ce rapport, si imperfectchez tous les êtres humains, avec ce qui se passe dans son corps, mais dont l’ignorance – ilajoute, en contradiction avec le premier Freud – n’a rien à faire avec l’inconscient, qui est unsavoir qui procè<strong>de</strong> du signifiant 13 . Le corps du réel c’est la tentative <strong>de</strong> donner corps à lajouissance <strong>de</strong> l’autre absente – ce qui marque bien, à mon avis, la différence entre le réel <strong>de</strong> lapsychanalyse et le réel <strong>de</strong> la science. Le corps du réel n’est pas la matière, parce que le réel estplutôt l’obscure «autoperception du royaume extérieur au moi, le ça» dont nous parlait Freud,encore dans ses notes finales 14 .Dans les <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong> son enseignement, Lacan a souvent dit: l’homme a un corps.4 Lacan J. (2001), Introduction à l’édition alleman<strong>de</strong> d’un premier volume <strong>de</strong>s Écrits, Autres Écrits, Seuil, Paris, p. 556.5 Lacan J., …Ou pire., Compte rendu du Séminaire 1971-1972 , Autres écrits, cit., p. 551.6 Lacan J. (1975), Réponses a <strong>de</strong>s étudiants en philosophie sur l’objet <strong>de</strong> la psychanalyse, Cahiers pour l’analyse, 3,Seuil, Paris.7 Lacan J. (1973), Télévision, Autres écrits, cit., pp. 511-512.8 Lacan J. (1966), Propose sur la causalité psychique, Écrits, Seuil, Paris, p. 157.9 Lacan J. (1966), Conférence et débat du Collège <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine à La Salpetrière, Cahiers du Collège <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine, pp.761-774.10 Lacan J. (1975) , Le Séminaire livre XX. Encore (1972-1973), Seuil, Paris , p. 26.11 Lacan J., Le Séminaire livre XXIV. L’insu que sait d’l’une bévue s’aile à mourre (1976-1977), inédit, leçon16/11/1976.12 Lacan J. (1973), Le Séminaire livre XI. Les quatre concepts fondamentaux <strong>de</strong> la psychanalyse (1964), Seuil, Paris p.26.13 Lacan J. (2005), Le Séminaire livre XXIII. Le sinthome (1975-1976), Seuil, Paris, p. 149.14 Freud S., «Résultats, idées, problèmes» (1938), Œuvres complètes, XX, cit., p. 320 [GW XVII 152; SE XXIII 300].

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