La Libération : les Canadiens en Europe - Chef - Personnel militaire
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communicative dépassait tout ce que nous avons<br />
pu observer auparavant ou depuis.<br />
Deux jours plus tard, le 3 septembre, la 2 e Division<br />
célèbre son retour à Dieppe par une prise d’armes<br />
afin d’honorer la mémoire des plus de 3 000 hommes<br />
qu’elle a perdus lors du raid désastreux contre la<br />
ville portuaire <strong>en</strong> août 1942.<br />
P<strong>en</strong>dant que la 2 e Division savoure Dieppe et<br />
absorbe des r<strong>en</strong>forts dont elle a le plus grand besoin,<br />
la 3 e Division la contourne pour gagner Boulogne.<br />
De son côté, la 4 e blindée approche de la Somme —<br />
p<strong>en</strong>dant que le commandant allemand de l’<strong>en</strong>droit<br />
« écoute personnellem<strong>en</strong>t <strong>les</strong> émissions de la BBC afin<br />
de prév<strong>en</strong>ir ses troupes du prochain mouvem<strong>en</strong>t de<br />
cette formation ». Le général Simonds ordonne aux<br />
Polonais de se frayer un passage à travers la Somme<br />
à Abbeville avant que <strong>les</strong> Allemands ai<strong>en</strong>t le temps<br />
de préparer leurs déf<strong>en</strong>ses. Les Polonais mèn<strong>en</strong>t<br />
<strong>en</strong>suite la progression vers Hesdin, Saint-Omer, Ypres<br />
et Gand. Le matin du 6 septembre, après le bref<br />
répit qui lui a été accordé, la 4 e Division, ayant reçu<br />
une provision de 30 cartes d’état-major différ<strong>en</strong>tes<br />
« dont le pliage a pris le plus clair de la nuit », 14 se<br />
met <strong>en</strong> marche vers Saint-Omer, où <strong>les</strong> unités se<br />
déploi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> év<strong>en</strong>tail sur la gauche des Polonais et<br />
se dirig<strong>en</strong>t vers Eecloo et Bruges. El<strong>les</strong> jug<strong>en</strong>t très<br />
réconfortant, après avoir vu la Normandie, de traverser<br />
<strong>en</strong>fin une contrée qui n’a pas été marquée par <strong>les</strong><br />
combats. Le chroniqueur de l’Argyll and Sutherland<br />
décrit ainsi le trajet :<br />
Les armées riva<strong>les</strong> pass<strong>en</strong>t si rapidem<strong>en</strong>t que<br />
c’est à peine si el<strong>les</strong> agit<strong>en</strong>t le cours paisible de<br />
l’exist<strong>en</strong>ce. Les Allemands sont partis comme<br />
ils sont v<strong>en</strong>us <strong>en</strong> 1940, <strong>en</strong> un clin d’œil et à<br />
l’improviste. En 1944, comme quatre ans plus<br />
tôt, cette région de France, si cruellem<strong>en</strong>t ravagée<br />
<strong>en</strong> 1914-1918, a pratiquem<strong>en</strong>t échappé à tout<br />
dommage, <strong>en</strong> guise de récomp<strong>en</strong>se négative pour<br />
cette autre guerre... nous avançons sans relâche,<br />
jour et nuit, doublant de petites vil<strong>les</strong> françaises<br />
et des panneaux où on lit « Abbeville, 15 km »,<br />
« Saint-Omer, 6 km »; puis le bleu de la Belgique<br />
remplace le blanc des panneaux de signalisation<br />
français : « Bruges, 10 km. » 15<br />
Approvisionner <strong>les</strong> chars <strong>en</strong> carburant, <strong>les</strong> armes<br />
<strong>en</strong> munitions et <strong>les</strong> hommes <strong>en</strong> vivres impose<br />
une dure tâche aux quartiers-maîtres, car <strong>les</strong> points<br />
d’approvisionnem<strong>en</strong>t se déplac<strong>en</strong>t constamm<strong>en</strong>t.<br />
L’officier <strong>en</strong> chef de l’administration de la 4 e Division<br />
explique que « chaque fois que <strong>les</strong> chars comm<strong>en</strong>c<strong>en</strong>t<br />
à tirer, mes camions de munitions dépos<strong>en</strong>t leur<br />
cargaison et vont se réapprovisionner à l’arrière.<br />
Si <strong>les</strong> troupes fonc<strong>en</strong>t, ils dépos<strong>en</strong>t leurs munitions<br />
et retourn<strong>en</strong>t chercher de l’ess<strong>en</strong>ce ». 16<br />
Le commandant des colonnes d’approvisionnem<strong>en</strong>t<br />
divisionnaires du Corps royal de l’int<strong>en</strong>dance de<br />
l’Armée canadi<strong>en</strong>ne, le lieut<strong>en</strong>ant-colonel M.L. Br<strong>en</strong>nan,<br />
racontera comm<strong>en</strong>t <strong>les</strong> plans <strong>les</strong> plus soigneusem<strong>en</strong>t<br />
conçus peuv<strong>en</strong>t parfois échouer. Après avoir roulé<br />
plusieurs jours, <strong>les</strong> unités de chars ont distancé leurs<br />
points d’approvisionnem<strong>en</strong>t, obligeant <strong>les</strong> chauffeurs<br />
de camion à faire des aller et retour de 400 kilomètres<br />
pour <strong>les</strong> approvisionner <strong>en</strong> carburant. Les réserves<br />
d’ess<strong>en</strong>ce sont parfois réduites à quelques litres et tout<br />
le monde est exténué. Lorsque Br<strong>en</strong>nan rejoint<br />
son poste de commandem<strong>en</strong>t après une journée<br />
particulièrem<strong>en</strong>t épuisante, son officier principal<br />
de l’approvisionnem<strong>en</strong>t lui annonce que <strong>les</strong> chars<br />
sont <strong>en</strong> train de s’arrêter et qu’après la livraison<br />
du soir ils disposeront d’une réserve d’<strong>en</strong>viron<br />
30 000 gallons (125 000 litres). Rassuré, Br<strong>en</strong>nan<br />
est sur le point de s’abandonner à un sommeil dont<br />
il a bi<strong>en</strong> besoin, lorsque son capitaine-adjudant le<br />
prévi<strong>en</strong>t que des officiers polonais vi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t d’arriver<br />
dans une jeep et un fourgon et qu’ils ont besoin<br />
d’ess<strong>en</strong>ce :<br />
Ma foi, j’étais très fatigué. Je <strong>les</strong> regarde par la<br />
f<strong>en</strong>être et je me dis : « Ce sont <strong>les</strong> véhicu<strong>les</strong> pour<br />
<strong>les</strong>quels ils veul<strong>en</strong>t de l’ess<strong>en</strong>ce. » Je demande<br />
donc au capitaine-adjudant de leur donner une<br />
autorisation pour le point d’ess<strong>en</strong>ce et de leur<br />
dire de pr<strong>en</strong>dre ce dont ils ont besoin.<br />
Je retourne me coucher et je m’<strong>en</strong>dors — oh,<br />
j’ai bi<strong>en</strong> dû dormir 15 ou 16 heures. Le l<strong>en</strong>demain<br />
matin, je me lève <strong>en</strong> pleine forme. Le soleil<br />
brille. Je m’habille, je me rase, je sors et je me<br />
trouve nez à nez avec mon officier principal<br />
de l’approvisionnem<strong>en</strong>t, qui est pratiquem<strong>en</strong>t au<br />
bord des larmes. Il me demande : « Savez-vous<br />
ce qui s’est passé, monsieur? »<br />
« Non, répliquai-je, pour l’amour de Dieu, ne me<br />
dites pas qu’il est arrivé quelque chose cette nuit. »<br />
« Je vous crois, qu’il est arrivé quelque chose,<br />
me répond-il. Il y a une espèce de crétin dans<br />
ce poste de commandem<strong>en</strong>t qui a donné une<br />
autorisation aux Polonais pour le point d’ess<strong>en</strong>ce,<br />
et ils ont ravitaillé la brigade blindée de<br />
28 000 gallons. » 17<br />
Le système D permet de surmonter <strong>les</strong> difficultés<br />
à mesure qu’el<strong>les</strong> se prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t, par exemple dans<br />
le transport des munitions. <strong>La</strong> 65 e Compagnie de<br />
porte-chars dispose de 100 grosses semi-remorques<br />
Diamond-T de 40 tonnes qui ont pour fonction<br />
principale de transporter <strong>les</strong> chars, évitant ainsi<br />
14 Cassidy, G.L. Warpath: The Story of the Algonquin<br />
Regim<strong>en</strong>t, 1939-1945, Toronto, Ryerson, 1948, p. 128.<br />
15 Jackson, H.M. (dir. de publ.), The Argyll and Sutherland<br />
Highlanders of Canada (Princess Louise’s), 1928-1953,<br />
Montréal, le régim<strong>en</strong>t, 1953, pp. 107-108.<br />
16 Foster, Tony, Meeting of G<strong>en</strong>erals, Toronto, Methu<strong>en</strong>,<br />
1986, p. 384.<br />
17 Warr<strong>en</strong>, A. Wait for the Waggon: The Story of the Royal<br />
Canadian Army Service Corps, Toronto, McClelland and<br />
Stewart, 1961, pp. 308-309.<br />
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