Télécharger - IAU îdF
Télécharger - IAU îdF
Télécharger - IAU îdF
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
36<br />
Comprendre<br />
Les Cahiers de l’<strong>IAU</strong> <strong>îdF</strong><br />
n° 161 - février 2012<br />
La fermeture peut prendre<br />
des formes variées.<br />
Tetradtx/Flickr-CC<br />
Betacam/sxc.hu<br />
Scidmail/sxc.hu<br />
Habiter dans le périurbain<br />
production totale (5) . Qualitativement, l’analyse<br />
morphologique dégage un profil majoritaire :<br />
un petit ensemble de moins de vingt logements,<br />
composé de maisons en bande ou jumelées<br />
et construit dans un tissu urbain déjà<br />
constitué. 80 % des opérations observées ont<br />
ainsi correspondu au renouvellement du tissu<br />
urbain sur lui-même, et parfois à sa densification.<br />
On est donc loin des images initiales véhiculant<br />
de vastes ensembles pour une population<br />
aisée voulant se mettre à l’écart de la ville.<br />
Cette catégorie, qui existe néanmoins, ne représente<br />
qu’environ 10 % de la production fermée<br />
relevée. Alors pourquoi tant de préoccupation?<br />
L’enclavement, première<br />
des caractéristiques<br />
Des analyses plus fines sur le profil majoritaire<br />
identifié montrent des modèles récurrents : traduisant<br />
de petits ensembles denses s’intégrant<br />
ainsi bien à leur environnement, s’adaptant au<br />
parcellaire existant et se fondant dans leur paysage.<br />
Mais ils partagent aussi une position en<br />
retrait au sein de l’îlot. Leur fine insertion permet<br />
une certaine discrétion depuis la rue<br />
publique, et tout autant une intimité vécue<br />
depuis l’intérieur, mais elle produit également<br />
leur introversion et leur imperméabilité. Davantage<br />
que la fermeture, parfois plus un artifice<br />
qu’un véritable contrôle d’accès, c’est la forme<br />
même de l’opération qui produit cet enclavement<br />
et se trouve vecteur de son étanchéité.<br />
Or, cette mécanique se retrouve très clairement<br />
dans des formes résidentielles, elles, beaucoup<br />
plus courantes: les ensembles de maisons individuelles<br />
structurés sur le principe de l’impasse,<br />
de la boucle ou de la raquette. Parce qu’on ne<br />
peut pas les traverser, parce que leur morphologie<br />
marque la séparation avec leur environnement,<br />
on peut les qualifier d’« enclaves résidentielles<br />
». Généralement introverties, par la<br />
disposition des maisons vers l’intérieur de l’ensemble,<br />
parfois de grandes surfaces, composées<br />
d’une combinaison, générant de petites<br />
enclaves au sein d’une plus vaste, elles peuvent<br />
être aussi isolées géographiquement de la zone<br />
urbaine de référence, ce qui leur confère un<br />
degré d’enclavement supplémentaire. Or, ce<br />
type morphologique représente près de 40 %<br />
de la surface consacrée à l’habitat individuel<br />
francilien (6) . Enclaves et fermetures partagent<br />
donc des principes communs: le retrait, la séparation<br />
avec l’environnement voisin, l’introversion,<br />
l’exclusivité d’usage des espaces internes.<br />
Cependant, ils n’existent pas dans les mêmes<br />
proportions. L’enclavement est une forme dominante<br />
de l’habitat individuel groupé ; la fermeture,<br />
un phénomène mineur dans le paysage<br />
urbain, et pourtant, c’est la fermeture qui retient<br />
les discours et cristallise les débats.<br />
Le désir discuté de la tranquillité<br />
résidentielle<br />
Tous ces ensembles ne sont pas de taille, d’histoire,<br />
de situation identiques ni même habités<br />
de la même manière. Mais ces morphologies<br />
résidentielles témoignent néanmoins d’un désir<br />
résidentiel concentré sur la tranquillité, une<br />
volonté plus ou moins forte de mettre ce temps<br />
de l’habitat à l’écart de l’animation urbaine. Le<br />
« lotissement » permet en cela de créer des<br />
espaces intermédiaires entre l’espace domestique<br />
et l’espace de la ville, investis du rôle de<br />
transition et de passage, du chez-soi au dehors.<br />
Le « lotissement » enclavé, et encore plus celui<br />
fermé, a par sa composition morphologique un<br />
effet supplémentaire de valorisation des<br />
espaces intermédiaires, qui appuie d’autant<br />
plus cette fonction de protection entre le<br />
dedans et le dehors, le privé et le public.<br />
Certaines inquiétudes, certains risques même<br />
sont pointés. Enclaves et fermetures sont des<br />
espaces privés ou de logiques privatives. Ce sont<br />
des formes urbaines rigides, faiblement mutables,<br />
qui ont de fortes capacités de résistance<br />
face aux changements dans leur environnement.<br />
Elles sont aussi homogènes socialement,<br />
correspondent à des logiques d’appariement,<br />
de regroupements affinitaires. Néanmoins, elles<br />
correspondent à un objet désiré et légitime.<br />
Peut-être, dans cette métropolisation des modes<br />
de vie, représentent-elles même une fonction<br />
moderne. Pour l’élu, pris entre une demande<br />
légitime et une politique communale construite<br />
pour l’intérêt général (et aussi la logique<br />
de marché de l’opérateur), comment se positionner<br />
?<br />
La collectivité publique possède deux leviers<br />
forts pour encadrer ces objets urbains et maîtriser<br />
leurs impacts :<br />
- son projet urbain, fixé par le plan local d’urbanisme<br />
(PLU), qui doit faire référence dans<br />
ses relations avec le secteur privé (opérateur<br />
comme copropriétaires) ;<br />
- son espace public, et sa compétence en la<br />
matière qui lui permet de mettre en avant le<br />
principe d’une trame urbaine capable de maîtriser<br />
les «morceaux» de son développement<br />
urbain, dont les enclaves et les fermetures font<br />
partie.<br />
<strong>IAU</strong> île-de-France<br />
Wmjas/Flickr-CC<br />
(5) Ces résultats sont à prendre avec précaution, compte<br />
tenu des limites de la méthode expérimentale utilisée. Néanmoins,<br />
les proportions obtenues rendent compte d’une dynamique<br />
assez tranchée.<br />
(6) LOUDIER-MALGOUYRES, op.cit.