comptes-rendus des séances - Savoirs Textes Langage - Lille 3
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4) De lapide philosophico (la pierre philosophale)<br />
On ignore qui est le véritable auteur de ce poème alchimique de la fin du XVI e siècle dont<br />
l’édition dans le Musaeum hermeticum (1625, édition augmentée en 1678) est accompagnée<br />
de gravures représentant notamment le bestiaire alchimique : deux gros poissons dans la mer,<br />
le dragon Ourouboros (qui se dévore la queue) déjà représenté dans les manuscrits de l’alchimie<br />
gréco-alexandrine, les deux lions ailés, les chiens dévorants et la salamandre qui ne<br />
périt pas dans le feu. Le médecin chimiste Pierre-Jean Fabre a commenté ces images dans<br />
son Manuscriptum ad Fridericum, petit traité alchimique rédigé en 1653, mais seulement<br />
publié à la fin du XVII e siècle, en Allemagne.<br />
II - Une théorie sous-jacente qui rend possible le développement de l’analogie.<br />
Les théories (al)chimiques qui se développent au XVII e siècle ne sont certes pas homogènes,<br />
mais certains traits généraux peuvent être dégagés. On trouve en effet dans la plupart<br />
de ces traités :<br />
1) une philosophie naturelle fondée sur les correspondances entre le haut et le bas et la<br />
circulation d’un esprit universel qui se corporifie ;<br />
2) une théorie <strong>des</strong> métaux fondée sur l’opposition fondamentale <strong>des</strong> deux principes que<br />
sont le Mercure (féminin) et le Soufre (masculin), avec la doctrine d’une semence engendrant<br />
les métaux dans les mines ;<br />
3) l’idée selon laquelle l’art (le travail de laboratoire) peut reproduire et réparer les processus<br />
naturels ;<br />
4) une conception <strong>des</strong> opérations de laboratoire fondée sur l’observation <strong>des</strong> processus<br />
propres au domaine du vivant : une décomposition qui libère l’activité <strong>des</strong> principes ("anatomie<br />
<strong>des</strong> métaux"), une fécondation <strong>des</strong> métaux impurs (cuivre, plomb) par une semence qui<br />
les revivifie et les perfectionne (production de l’argent et de l’or) ;<br />
5) une correspondance entre la chimie et la médecine qui se décline sur plusieurs plans :<br />
le chimiste guérit les métaux avec une pierre philosophale qui est une médecine, l’homme<br />
est un être minéral qui peut être guéri avec <strong>des</strong> médicaments chimiques, le corps de l’homme<br />
fonctionne comme un alambic.<br />
Conclusions<br />
Rendre leur force rationnelle aux analogies de la philosophie chimique à l’âge classique<br />
conduit à mettre en évidence :<br />
1) l’illusion d’une histoire <strong>des</strong> sciences qui voudrait voir dans le développement de la<br />
chimie moderne le seul résultat de l’irruption de la pensée mécaniste et corpusculariste ;<br />
2) l’absurdité <strong>des</strong> approches contemporaines de l’alchimie qui la réduisent à un jeu<br />
d’images et de métaphores ;<br />
3) l’anachronisme de l’opposition chimie/alchimie en ce qui concerne le XVII e siècle ;<br />
4) le caractère évolutif <strong>des</strong> formes de la rationalité et de ses enjeux.<br />
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