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comptes-rendus des séances - Savoirs Textes Langage - Lille 3

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Les points sont ainsi définis qu’en chacun d’eux, les relations algébriques entre les fonctions<br />

de Ω se spécialisent en un ensemble de relations numériques exactes qui respectent les liens<br />

algébriques <strong>des</strong> fonctions du corps.<br />

Emploi métaphorique du mot point Le point est un concept purement algébrique qui est<br />

néanmoins désigné par un terme géométrique. Dedekind et Weber explique ce choix lexical<br />

comme la possibilité de rendre sensible la conjonction de valeurs que désigne le point en<br />

se l’imaginant comme un point dans l’espace, c’est-à-dire un "vrai" point géométrique. Ils<br />

précisent néanmoins en note<br />

« Une visualisation géométrique du "point" n’est par ailleurs aucunement nécessaire, et<br />

contribue très peu à une conception plus facile. Il suffit de considérer le mot "point"<br />

comme une expression courte et agréable pour la coexistence de valeurs décrite. » 44<br />

Le terme de point ne serait donc qu’un raccourci, tout au plus une métaphore, selon Claude<br />

Blanckaert, une<br />

« image qui fait immédiatement sens (...) [et] témoigne, dans le caractère spontané de<br />

son usage, d’une faible articulation conceptuelle» 45<br />

Dedekind et Weber ont fait une théorie essentiellement algébrique. Faire abstraction de la<br />

référence géométrique du terme de point et le remplacer par un mot sans connotation géométrique,<br />

tel que système de valeur, ne diminuent en rien la rigueur et la validité <strong>des</strong> travaux<br />

<strong>des</strong> deux mathématiciens. Ceci résulte de leur volonté, accomplie, de travailler dans la<br />

sphère de l’algèbre sans avoir recours à l’intuition géométrique dans les fondements ou les<br />

démonstrations de leur théorie. Néanmoins, sans se compromettre vis-à-vis de cette ligne de<br />

conduite, Dedekind et Weber ne ferment pas totalement la porte à la géométrie : ils ne nient<br />

pas le rôle pédagogique <strong>des</strong> images géométriques, sorte de lunettes 3D qui donnent un relief<br />

géométrique (artificiel) à leur raisonnement algébrique abstrait.<br />

L’interprétation métaphorique du point se justifie donc parfaitement. Peut-être un peu<br />

trop au vu de la relative ambiguïté qui transparaît dans l’explication de ce choix lexical.<br />

Dans le corps du texte, Dedekind et Weber proposent de voir dans ce mot une visualisation<br />

du concept algébrique et en note, ils reculent devant cette interprétation géométrique pour<br />

n’y voir plus qu’une sorte d’abréviation. Ceci est d’autant plus étonnant que le point qu’ils<br />

définissent n’est pas n’importe quel point comme ils l’affirment : Dedekind et Weber définissent<br />

le correspondant algébrique du point de la surface de Riemann, ce qu’ils expliquent<br />

dans l’introduction de l’article et rappellent un peu plus tard.<br />

Emploi analogique du mot point Le principe de la surface de Riemann est de faire passer<br />

la multiformité d’une fonction à son support : Riemann dédouble le plan complexe en<br />

feuillets et les raccordent de façon à ce que la fonction qu’il considère y soit continue.<br />

En ayant à l’esprit la surface de Riemann, le choix lexical du mot "point" prend une<br />

toute autre dimension, plus profonde que celle métaphorique. On peut avancer l’hypothèse<br />

44 Dedekind u. Weber, "Theorie der algebraischen Functionen einer Veränderlichen", in Journal für die reine<br />

und angewandte Mathematik, vol. , 1882, p. 236.<br />

45 Claude Blanckaert, "Variation sur le darwinisme-Epistémologie et transfert lexical" in Transfert de Vocabulaire<br />

dans les sciences, sous la direction de Jacques Roger, Edition du CNRS, Paris, 1988, p. 11.<br />

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