ACTUELLES III. Chroniques algériennes, 1939-1958
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Albert Camus, <strong>ACTUELLES</strong> <strong>III</strong>. <strong>Chroniques</strong> <strong>algériennes</strong>, <strong>1939</strong>-<strong>1958</strong> (<strong>1958</strong>) 100<br />
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L’Algérie déchirée<br />
LES RAISONS<br />
DE L'ADVERSAIRE<br />
Avant d'en venir, sinon aux solutions du problème algérien, du moins<br />
à la méthode qui les rendrait possibles, il me reste à m'adresser aux<br />
militants arabes. À eux aussi, je demanderai de ne rien simplifier et de<br />
ne pas rendre impossible l'avenir algérien.<br />
Je sais que, du bord où je suis, ces militants ont l'habitude d'entendre<br />
des discours plus encourageants. Si j'étais d'ailleurs un combattant<br />
arabe et que des Français vinssent m'assurer de leur appui<br />
inconditionnel, il va sans dire que j’accueillerais avec empressement ce<br />
renfort. Mais Français de naissance et, depuis 1940, par choix délibéré,<br />
je le resterai jusqu'à ce qu'on veuille bien cesser d'être allemand<br />
ou russe : je vais donc parler selon ce que je suis. Mon seul espoir est<br />
que les militants arabes qui me liront voudront réfléchir au moins aux<br />
arguments d'un [149] homme qui, depuis vingt ans, et bien avant que<br />
leur cause soit découverte par Paris, a défendu sur la terre algérienne,<br />
dans une quasi-solitude, leur droit à la justice.<br />
Qu'ils fassent d'abord, et soigneusement, la différence entre ceux<br />
qui soutiennent la cause algérienne, parce qu'ils souhaitent, là comme<br />
ailleurs, la démission de leur propre pays, et ceux qui demandent réparation<br />
pour le peuple algérien parce qu'ils veulent que la France soit<br />
grande aussi de sa justice. L'amitié des premiers, je dirai seulement<br />
qu'elle a prouvé déjà son inconstance. Quant aux seconds qui sont et