ACTUELLES III. Chroniques algériennes, 1939-1958
ACTUELLES III. Chroniques algériennes, 1939-1958
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Albert Camus, <strong>ACTUELLES</strong> <strong>III</strong>. <strong>Chroniques</strong> <strong>algériennes</strong>, <strong>1939</strong>-<strong>1958</strong> (<strong>1958</strong>) 104<br />
Il me semble alors que personne, Français ou Arabe, ne peut dési-<br />
rer entrer dans la logique sanglante d'une guerre totale. Personne, ni<br />
d'un côté ni de l'autre, ne devrait se refuser à donner au conflit les<br />
limites qui l'empêcheront de dégénérer. Je propose donc que les deux<br />
parties en présence prennent, simultanément, l'engagement publie de<br />
ne pas toucher, quelles que soient les circonstances, aux populations<br />
civiles. Cet engagement ne modifierait pour le moment aucune situation.<br />
Il viserait seulement à enlever ait conflit son caractère inexpiable<br />
et à préserver, dans l'avenir, des vies innocentes.<br />
Comment cette double déclaration pourrait-elle être provoquée ? Il<br />
serait souhaitable, [155] pour des raisons évidentes, que l'initiative en<br />
revint à la France. Le gouverneur général de l'Algérie, ou le gouvernement<br />
français lui-même, pourrait, sans rien engager d'essentiel, prendre<br />
cette initiative à son compte. Mais il est possible aussi qu'au nom<br />
de considérations purement politiques, les deux parties souhaitent une<br />
intervention moins politisée. Dans ce cas, l'initiative pourrait être prise<br />
par les chefs religieux des trois grandes. communautés d'Algérie.<br />
Ceux-ci n'auraient pas à obtenir, ni à négocier un accord qui se situe<br />
au-delà de leur compétence, mais simplement à susciter, hors de toute<br />
équivoque, et sur un point précis, une double déclaration qui, sans vaine<br />
querelle sur le passé, engagerait l'avenir.<br />
*<br />
* *<br />
Ce n'est pas assez de dire qu'un tel engagement faciliterait la recherche<br />
d'une solution. Sans lui, il n'y a pas de solution possible. La<br />
grande différence entre la guerre de destruction et le simple divorce<br />
armé, c'est que la première ne mène à rien, qu'à plus de destruction<br />
encore, tandis que le second peut amener un jugement de réconciliation.