Le docteur Dethève appelé en consultation par l'empereur ... - AFEC

Serge Franzini ——
Fils du Ciel ne relève pas des mesures des hommes ? » 50 S'il n'était pas
clair qu'il s'agit là d'un avatar romanesque de notre anecdote, sur le
second manuscrit, utilisé pour l'édition première de 1975, le passage
en question est précédé, en marge, de ces mots : « La ridicule
consultation Dethève. » 51
Enfin, détachés de leur contexte, certains éléments de l'anecdote
réapparaissent, déplacés ou à peine transformés, chez des auteurs de
second plan. Dès 1901, un chroniqueur de la presse quotidienne peut
amalgamer le personnage de Li Hongzhang à la prescription de diète
lactée par des médecins européens, sans abandonner le registre
moqueur :
Les nounous du vieux Li Hongzhang.
[...] Li Hongzhang avait des nourrices. Non pour ses petits-enfants
ou ses arrière-petits-enfants, mais pour lui-même. Il souffrait, depuis
quelques années, de l'ulcère de l'estomac qui l'a emporté [le 7 novembre
1901]. Et ses médecins — européens ou chinois ? — l'avaient mis
au régime... du lait de femme !
Li avait de la sorte chez lui, en permanence, quatre ou cinq nourrices
qui se relayaient. Et s'il ne payait pas les soldats qui entretenaient
ses rizières, il appointait fort convenablement ses nourrices.
Buvait-il à la mamelle ? Se contentait-il d'absorber un lait préalablement
et soigneusement recueilli ? Ce point demeure obscur. Espérons
qu'un jour ce menu, mais intéressant, petit problème de l'histoire
sera éclairci. 52
Plus tard, en 1941, et toujours incidemment dans un contexte littéraire
d'anecdotes de mœurs, c'est l'impératrice Cixi qui est atteinte de
« néphrite chronique » (Bright's disease dans le texte anglais). Le mot
« néphrite » s'appliquant en français soit à une maladie rénale, soit à
50 Victor Segalen, Le Fils du Ciel, Paris, Flammarion, 1975, p. 160-161.
51 Second manuscrit, troisième partie, f. 72 (Fonds Segalen, Département
des manuscrits, Bibliothèque nationale de France).
52 Ernest Beauguitte, « Machiavel chinois », La Lanterne, 12novembre 1901,
p. 1.
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