Document PDF - ECA - Enseignement catholique actualites

En Caec
Alsace : un projet d’unité
Se fédérer pour mieux se singulariser, c’est l’objectif de l’enseignement catholique alsacien,
qui n’en est pas à un paradoxe près…
AURÉLIE SOBOCINSKI
Petit, il a pourtant tout
d’un grand… L’enseignement
catholique
d’Alsace ne vit pas le
moindre des paradoxes : dans
une région où le très fort terreau
religieux aurait pu lui donner le
nombre, il ne rassemble qu’un petit
11-12 % d’élèves scolarisés – 27 500
au total, soit 8 % dans le premier
degré, 14-15 % dans le second
degré – Concordat oblige. « Ce
statut particulier, abrogé
partout en France
depuis 1905, sauf en
Alsace-Moselle, impose
l’enseignement
religieux obligatoire
dans toutes les écoles
publiques, explique
Patrick Wolff, directeur
diocésain de
Strasbourg. À cela il
faut ajouter, jusqu’à
l’année scolaire dernière,
la présence de
religieux à des postes d’enseignants
comme de chefs
d’établissement dans l’enseignement
public de la région. »
Conséquence de cette donnée
historique, l’enseignement catholique
est concentré dans les principales
agglomérations (Strasbourg, Haguenau,
Colmar et Mulhouse) et dans quelques
communes satellites. Ailleurs, y compris
dans des villes d’importance (Sélestat,
Saverne, Wissembourg), il est absent.
Autre singularité liée à l’histoire : le
poids et la multiplicité des congrégations.
Sur les 32 établissements catholiques
que compte l’Alsace, 25 sont sous
tutelle congréganiste 1 et 7 sous tutelle
diocésaine (quatre dépendent directement
de l’archevêque et trois du directeur
diocésain).
Difficile dans ces conditions plurielles
d’imaginer un modèle fédérateur de gouvernance
régionale. Et pourtant… « Faire
région en Alsace relève d’un processus
naturel », souligne Patrick Wolff. L’unité
géographique, juridique
et administrative
– une région, un diocèse, une
académie – y contribue fortement. Sans
oublier la croissance des effectifs et un
potentiel prometteur qui a permis à la
région de recevoir à la rentrée dernière
près de 15 emplois 2 . « En septembre,
deux classes ont été ouvertes à Haguenau
dans le premier degré et on fait le plein
dans la quasi-totalité de nos établissements
», se réjouit Luc Viehé, président
du Codiec d’Alsace.
Plus que sa petite taille, c’est « la volonté
de garder le cap du sens face aux
sirènes du succès, de continuer à singulariser
son projet et à en accroître la
visibilité au sein du paysage concordataire
alsacien, qui a permis de faire
émerger assez récemment la notion de
corps », analyse François
Frey, représentant de l’intersyndicale
des chefs
d’établissement et délégué
académique du
Snceel 3 . « Sans cesse il
nous faut répondre à la
question : qu’est-ce qui
légitime notre existence ?
La pastorale, ici, ne peut
se résumer à la catéchèse,
elle doit viser
beaucoup plus large »,
souligne Patrick Wolff.
Une première pierre a
été posée à la rentrée dernière
avec le lancement
officiel du projet diocésain commun,
aboutissement d’un travail de trois ans
qui a réuni tous les acteurs de l’enseignement
catholique alsacien.
Le directeur diocésain, en tant que défenseur
et gestionnaire garant du bien
commun de l’enseignement catholique,
y a trouvé une légitimité renforcée.
« Seul de son espèce » dans la région,
Patrick Wolff ne décide pour autant
« rien en solo ». « En Alsace, celui qui
s’amuse à jouer au petit chef est mort.
Sa force auprès des équipes tient à sa
capacité de persuasion et de mise en
lien », explique Karine Courtois-Delacroix,
présidente de l’Apel 4 académique.
Référence
Les ressources humaines au service de
l’enseignement catholique régional sont
limitées : l’équipe diocésaine est composée
de deux adjoints, d’un correspondant
Solfège à mi-temps et d’un chef d’établissement
en charge du Saar 5 une journée
par semaine... Le Codiec gère pour
sa part « tout en un » Caec et Codiec, la
superposition des niveaux décisionnels –
région, académie, diocèse – étant parfaite.
« En réalité le conseil d’administration
du Codiec, qui se retrouve une
fois par mois, sert de Caec, déclare
Patrick Wolff. C’est l’instance qui travaille
les dossiers et propose les décisions
à l’assemblée générale du Codiec,
réunie elle trois fois par an. »
41 Enseignement catholique actualités N° 337, juiN-juillet 2010