<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>À la fin <strong>de</strong> l’année 2000, j’ai rejoint mes par<strong>en</strong>ts à Québec, pour une premièrefois, laissant mon passé <strong>de</strong>rrière moi. Je me disais qu’une nouvelle viecomm<strong>en</strong>çait. Depuis <strong>plus</strong>ieurs années, j’étais victime d’intimidation et <strong>de</strong>manipulation. Je me suis dit que j’avais une chance <strong>de</strong> tout repr<strong>en</strong>dre à zéro.J’avais <strong>de</strong>s échecs scolaires à répétition et, quand j’essayais <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r untravail, je n’y arrivais pas et j’étais incapable d’expliquer cela à mes par<strong>en</strong>ts.Puis un jour, j’ai r<strong>en</strong>contré un gars séduisant et att<strong>en</strong>tionné et j’ai décidé <strong>de</strong>le fréqu<strong>en</strong>ter. Ça ne m’était jamais arrivé avant qu’une personne soit aussig<strong>en</strong>tille avec moi, mais ce n’était qu’une appar<strong>en</strong>ce. C’était un piège etj’étais prise <strong>de</strong>dans.2001 fut le début d’un calvaire. J’étais forcée <strong>de</strong> vivre dans un mon<strong>de</strong> où lediable <strong>en</strong> personne régnait et m’obligeait à y rester. Drogues, alcool, tout yétait. Cette mauvaise fréqu<strong>en</strong>tation m’a poussée à consommer pour m’éva<strong>de</strong>ret aussi pour m’imaginer dans un mon<strong>de</strong> meilleur. Je travaillais 7 jourssur 7, 15 heures par jour et l’arg<strong>en</strong>t que je gagnais, je ne pouvais pas legar<strong>de</strong>r. Si je le gardais ou si j’<strong>en</strong> cachais, je recevais <strong>de</strong>s m<strong>en</strong>aces. Je travaillaistellem<strong>en</strong>t que je m’épuisais physiquem<strong>en</strong>t et moralem<strong>en</strong>t. Après cinqans, un beau jour, je me suis dit : « Cela suffit <strong>de</strong> vivre ainsi ! », et j’ai réussià m’<strong>en</strong>fuir <strong>de</strong> cet <strong>en</strong>fer qui me gardait prisonnière et me détruisait tant.En 2007, j’arrive <strong>en</strong> sanglots chez mes par<strong>en</strong>ts. Je suis v<strong>en</strong>ue pour une bonneraison, me remettre sur le droit chemin. Après <strong>plus</strong>ieurs années d’abs<strong>en</strong>ce<strong>de</strong>s bancs d’école, je déci<strong>de</strong> donc d’y rev<strong>en</strong>ir. J’ai été référée à un organismeoù il n’y a que <strong>de</strong>s petits groupes, car à l’école <strong>de</strong>s adultes, il y avait trop <strong>de</strong>mon<strong>de</strong> et j’ai fait une crise d’angoisse. Dans cet organisme, j’ai comm<strong>en</strong>céà suivre <strong>de</strong>ux cours par semaine. Par la suite, comme je continuais d’êtreanxieuse et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s cauchemars, mes par<strong>en</strong>ts et moi, nous sommes alléschercher <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>. La démarche a été longue, mais finalem<strong>en</strong>t j’ai pu avoirun r<strong>en</strong><strong>de</strong>z-vous avec une psychiatre. Elle nous a donné le diagnostic suivant: agoraphobie, phobie sociale, syndrome d’alcoolisme fœtal et trouble<strong>de</strong> déficit <strong>de</strong> l’att<strong>en</strong>tion/hyperactivité (TDAH). Pour m’ai<strong>de</strong>r, elle m’aconseillé <strong>de</strong> pr<strong>en</strong>dre <strong>de</strong>s médicam<strong>en</strong>ts au quotidi<strong>en</strong> et <strong>de</strong> la voir <strong>de</strong>ux foispar mois, pour comm<strong>en</strong>cer. Avant la prise <strong>de</strong>s médicam<strong>en</strong>ts, je n’osais passortir <strong>de</strong> chez moi ni abor<strong>de</strong>r les g<strong>en</strong>s, car je faisais <strong>de</strong>s crises d’anxiété. J<strong>en</strong>’avais aucune vie sociale.De 2009 à aujourd’hui, ma vie a beaucoup changé : je me suis fait un nouveaugroupe d’amis et ma confiance <strong>en</strong> moi a énormém<strong>en</strong>t augm<strong>en</strong>té. Enjuin 2009, j’ai déménagé dans une maison avec trois <strong>de</strong> mes amis. Deux ans<strong>plus</strong> tard, j’étais prête à vivre seule dans un petit appartem<strong>en</strong>t avec Inouk,131
<strong>Ma</strong> <strong>plus</strong> <strong>belle</strong> <strong>histoire</strong>mon chat. Par la suite, j’ai fait partie du conseil d’administration <strong>de</strong> l’organismep<strong>en</strong>dant <strong>de</strong>ux ans. Chaque année, je suis bénévole au Salon du livreet je collabore actuellem<strong>en</strong>t à un projet <strong>de</strong> spectacles pour les g<strong>en</strong>s <strong>en</strong> santém<strong>en</strong>tale. Grâce au programme FAIT, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux étés, je travaille bénévolem<strong>en</strong>tdans une serre, car j’aime bi<strong>en</strong> le parfum <strong>de</strong>s fleurs et j’aime égalem<strong>en</strong>tjouer dans la terre. <strong>Ma</strong> patronne et mon équipe <strong>de</strong> travail sont très compréh<strong>en</strong>siveset l’ambiance y est familiale. P<strong>en</strong>dant l’année scolaire, je vais àl’école quatre jours par semaine. Yoga-dét<strong>en</strong>te et escala<strong>de</strong> font partie <strong>de</strong> mesloisirs. Le yoga me fait du bi<strong>en</strong>, car il <strong>en</strong>lève mes t<strong>en</strong>sions et l’escala<strong>de</strong> mepermet <strong>de</strong> me défouler. Aujourd’hui, je connais mes limites. Si j’<strong>en</strong> fais trop,ce qui arrive parfois, je <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>s épuisée et je peux dormir une journée complètela fin <strong>de</strong> semaine.Ainsi, c’était mon <strong>histoire</strong>. J’ai eu la chance d’avoir mes par<strong>en</strong>ts et mes amisces <strong>de</strong>rnières années, car je n’aurais pu passer au travers <strong>de</strong> tout cela sanseux. Ils m’ont énormém<strong>en</strong>t aidée et m’ont <strong>en</strong>couragée à poursuivre mesdémarches. Égalem<strong>en</strong>t, ils m’ont am<strong>en</strong>ée à me préserver <strong>de</strong>s cauchemarsquand nous avons appris, à <strong>de</strong>ux reprises, que le mauvais ange était <strong>en</strong>cavale. Finalem<strong>en</strong>t, tout s’est arrangé et il a été remis <strong>en</strong> prison. Je suis tellem<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>due fière <strong>de</strong> ce que j’ai accompli et <strong>de</strong> ce que je suis <strong>de</strong>v<strong>en</strong>ue.Alors, maint<strong>en</strong>ant je comm<strong>en</strong>ce à revivre !Laura Sivuarapik, AlphabétisationFormation Clef Mitis/Neigette (Rimouski), CS <strong>de</strong>s PharesEnseignantes : Janine Gagnon et Sylvaine Gesseaume,Syndicat <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> la Mitis43. <strong>Ma</strong>int<strong>en</strong>antEst-ce que je peux vous parler quelques minutes ? Votre temps est-il précieux? Allez-vous p<strong>en</strong>ser qu’<strong>en</strong> écrivant ce texte j’ai perdu mon temps etqu’<strong>en</strong> le lisant vous gaspillez le vôtre ? Peut-être voulez-vous, au contraire,qu’un peu <strong>de</strong> temps passe ? Certains, peut-être <strong>plus</strong> agressifs, parlerontmême <strong>de</strong> tuer le temps ! Je n’ai pas l’arrogance d’affirmer pouvoir vous expliquerquoi que ce soit sur le temps, mais nous pourrions quand même <strong>en</strong>parler un bref mom<strong>en</strong>t, si vous voulez bi<strong>en</strong> me donner quelques instants.132