CONNECT septembre 2019
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L’avis de l’expert // Droit des Sociétés<br />
BUSINESS MEDIA<br />
09.<strong>2019</strong><br />
En effet, il est très fréquent que les clauses<br />
contractuelles d’un marché public prévoient<br />
plusieurs sortes de sanctions de<br />
l’adjudicataire, comme par exemple, des<br />
pénalités de retard. Dans ce contexte, la<br />
défaillance de l’un des associés peut avoir<br />
des conséquences importantes.<br />
Il est dès lors vivement recommandé de<br />
soigner la rédaction du contrat de société,<br />
en y prévoyant de manière précise<br />
et détaillée les obligations des associés,<br />
la participation des associés à la société,<br />
les organes de gestion de la société momentanée,<br />
le mandataire, les finances et<br />
les éventuels apports, les assurances, les<br />
délais d’exécution, les conséquences de la<br />
défaillance d’un associé, le mécanisme de<br />
règlement des litiges, la sortie de l’un des<br />
membres de la société momentanée, la fin<br />
de la société momentanée etc.<br />
Concernant plus particulièrement le cadre<br />
des marchés publics, il peut, par exemple,<br />
être utile de déterminer dans le contrat de la<br />
société momentanée, les fonctions de chaque<br />
associé dans l’exécution des différents lots du<br />
marché et les ressources utilisées.<br />
Le Centre de Ressources des Technologies<br />
et de l’Innovation pour le Bâtiment (CR-<br />
TI-B) a élaboré un modèle de contrat type<br />
« d’association momentanée », destiné à être<br />
utilisé par les opérateurs économiques [3] . Ce<br />
modèle a pour ambition de définir une base<br />
pour les relations entre les associés, base<br />
susceptible d’être adaptée en fonction de la<br />
spécificité du marché public visé.<br />
LE RESPECT DU DROIT<br />
DE LA CONCURRENCE<br />
L’échange d’informations avant<br />
le résultat de l’appel d’offres<br />
En matière de marchés publics, il est généralement<br />
admis que l’existence d’une<br />
entente prohibée est subordonnée à la<br />
preuve, soit que des opérateurs économiques<br />
ont convenu de coordonner leurs<br />
offres, soit qu’ils ont échangé des informations<br />
antérieurement à la date où<br />
le résultat de l’appel d’offres est connu<br />
ou peut être connu. De telles pratiques<br />
visent à fixer par avance les prix proposés<br />
ou à s’arranger pour désigner par avance<br />
le futur adjudicataire.<br />
Or, la constitution d’une société momentanée<br />
en vue de participer à un marché<br />
public nécessite un échange d’informations<br />
portant sur le nom, l’importance,<br />
les ressources en personnel et en matériel,<br />
« LORS D’UN APPEL D’OFFRES, LES SOCIÉTÉS MOMENTANÉES<br />
DEVRAIENT AINSI VEILLER À RESPECTER LES EXIGENCES<br />
DU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE [4] ET DU DROIT<br />
DE LA CONCURRENCE LUXEMBOURGEOIS [5] IMPOSANT<br />
DES CONDITIONS DANS LESQUELLES LES ACCORDS À L’OBJET<br />
OU À L’EFFET ANTICONCURRENTIEL SONT POSSIBLES »<br />
les prix et l’intérêt pour le marché en question<br />
d’entreprises concurrentes.<br />
Les conditions de l’organisation<br />
en société momentanée<br />
Lors d’un appel d’offres, les sociétés momentanées<br />
devraient ainsi veiller à respecter<br />
les exigences du droit de l’Union européenne<br />
[4] et du droit de la concurrence<br />
luxembourgeois [5] imposant des conditions<br />
dans lesquelles les accords à l’objet ou à<br />
l’effet anticoncurrentiel sont possibles.<br />
Aussi, sont théoriquement admis les accords<br />
et pratiques concertées entre opérateurs<br />
économiques qui contribuent à améliorer<br />
la production ou la distribution des<br />
produits ou à promouvoir le progrès technique<br />
ou économique, tout en réservant<br />
aux utilisateurs une partie équitable du<br />
profit qui en résulte, et sans imposer aux<br />
entreprises intéressées des restrictions qui<br />
ne sont pas indispensables pour atteindre<br />
ces objectifs, ni donner à des entreprises<br />
la possibilité, pour une partie substantielle<br />
des produits en cause, d'éliminer la<br />
concurrence.<br />
Dans le cadre de la célèbre affaire des carreleurs<br />
de la Cité judiciaire, le Conseil de la<br />
concurrence a eu l’occasion de rappeler que :<br />
« toute collaboration entre entreprises par<br />
le biais d’associations momentanées ou<br />
d’autres structures n’est pas ipso facto<br />
admise comme échappant à l’application<br />
du droit de la concurrence, mais que cette<br />
collaboration, dans la mesure où elle comporte<br />
un objet ou un effet anticoncurrentiel,<br />
n’échappe à toute sanction que sous<br />
la condition nécessaire qu’elle entraîne par<br />
ailleurs des effets proconcurrentiels qui<br />
prévalent sur les effets anticoncurrentiels,<br />
et que cette appréciation doit se faire d’une<br />
façon globale en prenant en compte tout<br />
le contexte juridique et économique dans<br />
lequel s’inscrit la collaboration » [6] .<br />
Le Conseil de la concurrence a encore retenu<br />
qu’une coopération entre entreprises<br />
au stade de la soumission à un marché<br />
public pouvait comporter la poursuite<br />
d’un objectif proconcurrentiel lorsqu’elle<br />
était dictée par exemple par des nécessités<br />
économiques ou techniques, notamment<br />
en permettant aux entreprises participantes<br />
d’atteindre ensemble une taille<br />
critique pour répondre aux exigences de<br />
la soumission publique, de réduire leurs<br />
coûts par une optimisation de l’allocation<br />
des ressources, de mettre en commun des<br />
connaissances techniques différentes requises<br />
pour la réalisation du marché ou<br />
encore d’acquérir des compétences qui<br />
leur font défaut.<br />
Le succès de la pratique du regroupement<br />
d’entreprises en société momentanée<br />
en vue de participer à un marché public<br />
n’est plus à démontrer. Un tel groupement<br />
constitue en effet un moyen simple et efficace<br />
pour plusieurs entreprises de pouvoir<br />
remplir ensemble des critères de participation<br />
qu’elles ne pourraient satisfaire à<br />
elles seules. La technique semble d’autant<br />
plus intéressante depuis le renforcement<br />
de l’importance des critères sociaux<br />
et environnementaux dans l’attribution<br />
des marchés publics [7] .<br />
[3] http://www.crtib.lu/fr/marches-publics-contrats-types/<br />
contrats-types, à noter que le document n’est pas à jour<br />
et ne comprend pas le changement de terminologie issu<br />
de la modification de la loi du 10 août 1915<br />
concernant les sociétés commerciales.<br />
[4] En particulier de l’article 101 § 3 du Traité<br />
sur le fonctionnement de l’Union européenne.<br />
[5] Notamment de l’article 4 de la loi modifiée<br />
du 23 octobre 2011 relative à la concurrence.<br />
[6] Conseil de la concurrence, 5 mars 2010,<br />
décision no 2010-FO-01 concernant une procédure<br />
au fond pour violation du droit de la concurrence,<br />
spé. paragraphe numéro 113.<br />
[7] Loi modifiée du 18 avril 2018 sur les marchés publics.<br />
44 - <strong>CONNECT</strong><br />
Le magazine de la Confédération luxembourgeoise du commerce