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Bilan des acquisitions de 1984 - Musée des Augustins

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trouvera d'autant plus facilement réalisable" (Archives<br />

<strong>de</strong> la mairie <strong>de</strong> Saint-Rustice, Lettre d'Esquié au Préfet).<br />

L'église <strong>de</strong> Fitte ne fut bâtie qu'en 1865-1866 et une<br />

partie seulement <strong><strong>de</strong>s</strong> éléments indiqués par Esquié y<br />

furent remployés.<br />

Et le souvenir <strong>de</strong> l'église romane se perdit au point que,<br />

<strong>de</strong> nos jours, l'on n'en connaissait plus l'aspect. Heureusement,<br />

les archives <strong>de</strong> la mairie <strong>de</strong> Saint-Rustice conservent<br />

encore le plan <strong>de</strong> cet édifice relevé par Esquié le<br />

11 juin 1863. Une absi<strong>de</strong> majeure <strong>de</strong> 7 m d'ouverture et<br />

<strong>de</strong>ux absidioles marquaient vers l'Est l'achèvement <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

trois nefs <strong>de</strong> cette église parfaitement romane. Sur le<br />

collatéral méridional se greffait une tour d'escalier qui<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong>servait probablement le clocher et les combles.<br />

Des <strong>de</strong>mi-colonnes adossées recevaient les retombées<br />

<strong>de</strong> l'arc triomphal ou <strong><strong>de</strong>s</strong> gran<strong><strong>de</strong>s</strong> arca<strong><strong>de</strong>s</strong> séparant la<br />

nef principale <strong><strong>de</strong>s</strong> collatéraux. Seule une pile paraît,<br />

sur le plan, avoir gardé sa structure cruciforme<br />

complète d'origine. Elle correspond à un édifice voûté.<br />

Les trois autres ont été modifiées ou remplacées et ce<br />

probablement à la suite <strong><strong>de</strong>s</strong> dévastations que connut<br />

l'église en février 1567. Cette année-là, <strong><strong>de</strong>s</strong> troupes<br />

calvinistes <strong>de</strong> Montauban la pillèrent et l'incendièrent.<br />

Le registre <strong><strong>de</strong>s</strong> délibérations du conseil municipal nous<br />

apprend en 1849 "que le plafond qui est en planches<br />

tombe en morceaux..." et, en 1860, un procès-verbal<br />

du conseil <strong>de</strong> fabrique précise : "les colonnes <strong>de</strong> cette<br />

église sont couronnées <strong>de</strong> chapiteaux très remarquables<br />

dont quelques-uns sont cachés par un plancher..." (Archives<br />

communales <strong>de</strong> Saint-Rustice). La voûte n'existait<br />

probablement plus. Un document <strong>de</strong> 1615 indique<br />

par ailleurs que l'église était bâtie sur trois côtés <strong>de</strong><br />

pierres <strong>de</strong> taille et <strong>de</strong> briques ; la faça<strong>de</strong> où se trouvait<br />

l'entrée principale se présentait sous la forme d'un amalgame<br />

<strong>de</strong> " paroits en torchis et bois estant en prou<br />

mauvais estat". On remarquera, sur le plan, qu'a<br />

l'épaisseur <strong><strong>de</strong>s</strong> murs <strong><strong>de</strong>s</strong> absi<strong><strong>de</strong>s</strong> et <strong><strong>de</strong>s</strong> collatéraux —<br />

aux maçonneries bien romanes s'oppose la minceur<br />

du mur <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> auquel s'articule un porche. Il est<br />

permis <strong>de</strong> penser que cette église, inscrite selon le plan<br />

d'Esquié dans un carré <strong>de</strong> 20 m <strong>de</strong> côté, était plus<br />

développée ou avait été prévue plus longue vers l'Ouest.<br />

Le mur <strong>de</strong> torchis et le plafond <strong>de</strong> planches seraient la<br />

réparation hâtive faite après les <strong><strong>de</strong>s</strong>tructions <strong><strong>de</strong>s</strong> protestants.<br />

Seules <strong><strong>de</strong>s</strong> fouilles permettraient en fait <strong>de</strong><br />

reconnaître le plan complet primitif <strong>de</strong> l'édifice.<br />

Nous noterons surtout ici qu'en <strong>de</strong>hors <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux fenêtres<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> absidioles les six autres baies <strong>de</strong> cette église, ébrasées<br />

vers l'intérieur et vers l'extérieur comprenaient<br />

chacune quatre colonnes. Ces <strong>de</strong>rnières portaient <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

chapiteaux qui furent remployés, sans doute dans leur<br />

majorité, dans les baies <strong>de</strong> l'église construite par Fitte.<br />

Dans celles-ci, qui sont au nombre <strong>de</strong> treize, on disposa,<br />

à raison <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux par baie, vingt-cinq chapiteaux romans<br />

<strong>de</strong> même gabarit ; le vingt-sixième n'était qu'une pierre<br />

hâtivement et grossièrement taillée afin <strong>de</strong> faire la paire<br />

dans la <strong>de</strong>rnière fenêtre. Or, vingt-quatre chapiteaux<br />

seulement ornaient les six fenêtres <strong>de</strong> l'église romane.<br />

C'est un <strong>de</strong> trop. Il faut en déduire que ce chapiteau<br />

supplémentaire et même quelques autres — on ne récupéra<br />

peut-être que vingt-cinq chapiteaux en 1865-66,<br />

les autres étant alors détruits ou en mauvais état —<br />

28<br />

avaient pris place ailleurs, lors <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong><br />

l'église romane. Il n'est pas exclu qu'ils soient originaires<br />

d'une porte. Un seuil est bien indiqué, sous la<br />

fenêtre du collatéral <strong>de</strong> droite, près <strong>de</strong> la tourelle<br />

d'escalier<br />

Exposés durant plus d'un siècle aux intempéries, ainsi<br />

que les colonnes, bases et morceaux d'impostes remployés<br />

avec eux, la plupart <strong>de</strong> ces chapiteaux sont<br />

arrivés jusqu'à nous dans un état <strong>de</strong> dégradation très<br />

avancé. Les maladies <strong>de</strong> la pierre n'ont que trop largement<br />

accompli leur oeuvre <strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>truction. Fort heureusement,<br />

la municipalité <strong>de</strong> Saint-Rustice, sur l'impulsion<br />

luci<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Otal, adjoint au maire, prit conscience <strong>de</strong><br />

ce phénomène irréversible et décida <strong>de</strong> confier ces sculptures<br />

au musée <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>Augustins</strong>. C'était adopter sagement<br />

la <strong>de</strong>rnière mesure susceptible <strong>de</strong> les sauver <strong>de</strong> l'anéantissement<br />

total. L'atelier <strong>de</strong> restauration <strong><strong>de</strong>s</strong> musées <strong>de</strong><br />

Toulouse procéda à leur enlèvement et à leur consolidation.<br />

Des moulages <strong><strong>de</strong>s</strong> oeuvres les mieux conservées<br />

ont été remis dans les baies afin <strong>de</strong> ne pas appauvrir et<br />

dénaturer l'architecture <strong>de</strong> l'église du village.<br />

Tous ces chapiteaux, décrits ci-<strong><strong>de</strong>s</strong>sous, sont taillés dans<br />

une même pierre. Les blocs d'origine, sciés, avaient<br />

environ 30 cm <strong>de</strong> hauteur, 25 cm <strong>de</strong> largeur et <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur.<br />

Leur abaque est toujours marquée par les<br />

cornes et petits modillons centraux dérivant du chapiteau<br />

corinthien antique. Ces remarques montrent la<br />

gran<strong>de</strong> unité technique <strong>de</strong> la série. Ils se répartissent<br />

en trois catégories : chapiteaux à décor végétal (11),<br />

ceux où apparaissent animaux et monstres (10 ou 11),<br />

enfin ceux qui portent <strong><strong>de</strong>s</strong> figures humaines (3). Dans<br />

cette classification on n'a retenu que le thème dominant,<br />

les différents sujets pouvant se mêler sur une même<br />

oeuvre. Ces décors, par l'iconographie comme le style,<br />

sont à rattacher aux créations du cloître <strong>de</strong> Moissac et,<br />

à Toulouse, à celles du cloître <strong>de</strong> la Daura<strong>de</strong> et <strong>de</strong> la<br />

basilique Saint-Sernin vers 1100. A quelques exceptions<br />

près ils n'atteignent pas toujours la qualité <strong><strong>de</strong>s</strong> plus<br />

belles créations sculpturales <strong>de</strong> ces édifices. On peut<br />

supposer que l'un <strong><strong>de</strong>s</strong> sculpteurs <strong>de</strong> Moissac fut le<br />

maître <strong>de</strong> Saint-Rustice, suivi par un ou plusieurs<br />

compagnons <strong>de</strong> moindre talent qui cherchèrent à imiter<br />

<strong>de</strong> leur mieux ses réalisations.<br />

Il ne nous semble pas souhaitable d'envisager un long<br />

étalement dans le temps <strong>de</strong> ces travaux étant donné la<br />

relative mo<strong><strong>de</strong>s</strong>tie <strong>de</strong> l'entreprise par rapport au cloître<br />

<strong>de</strong> Moissac, à celui <strong>de</strong> la Daura<strong>de</strong> ou au chantier <strong>de</strong><br />

Saint-Sernin. L'étu<strong>de</strong> du plan <strong>de</strong> l'édifice a révélé sa<br />

gran<strong>de</strong> unité. On la retrouve dans les caractères techniques<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> chapiteaux. La datation peut être assez sûre<br />

et nous proposons l'année 1107 ou les années suivantes.<br />

Le cloître <strong>de</strong> Moissac était achevé en 1100. Ses artistes<br />

se dispersèrent ensuite vers plusieurs chantiers dont les<br />

prieurés <strong>de</strong> la Daura<strong>de</strong>, <strong>de</strong> Saint-Michel <strong>de</strong> Lescure<br />

(Tarn) et <strong>de</strong> Saint-Rustice.<br />

Bibi. : ESCUDIER (Adrien), Monographie <strong>de</strong> Saint- Rustice, Toulouse, 1935;<br />

PARADIS (Magella), La restauration au XIXe siècle <strong><strong>de</strong>s</strong> églises romanes, rurales,<br />

non classées, du département <strong>de</strong> la Haute-Garonne d'après les archives départementales,<br />

D.E.A., mémoire dactylographié, Université <strong>de</strong> Toulouse-Le Mirait,<br />

juin 1977, p. 12-29; DURLIAT (Marcel), Haut-Languedoc roman, coll.<br />

Zodiaque, La Pierre-qui-vire, 1978, p. 41.<br />

D.C.

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