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Laetitia FONTAINE et Romain ANGER<br />
Cohésion capillaire dans un mur en terre [ill. 9]<br />
Un pâté de sable fin est beaucoup plus résistant qu’un pâté de sable grossier :<br />
la pression capillaire entre deux grains de sable augmente énormément lorsque<br />
la taille des grains diminue et que la courbure du pont capillaire augmente. Entre<br />
les plaquettes d’argiles, environ mille fois plus petites qu’un grain de sable, les<br />
ponts capillaires ont une dimension extrêmement petite (2 nm environ) : à cette<br />
échelle la pression capillaire devient gigantesque et suffisamment intense pour<br />
construire des édifices de taille importante. Pour un type particulier d’argile, la<br />
kaolinite, il a été montré que la cohésion est essentiellement due aux forces<br />
capillaires : l’eau est le véritable liant, la taille et la forme des plaquettes d’argile<br />
permettant à la cohésion capillaire d’être beaucoup plus importante que dans un<br />
château de sable.<br />
Si l’eau est la colle de la terre, pourquoi un mur en terre ne s’effondre pas quand il<br />
sèche, comme un château de sable A l’échelle nanométrique du pont capillaire<br />
entre les particules d’argile, l’eau ne s’évapore jamais complètement et c’est<br />
même l’inverse qui se produit parfois : l’humidité de l’air peut venir se condenser<br />
entre les plaquettes d’argile, en formant des ponts capillaires microscopiques<br />
de quelques nanomètres et en enrobant les plaquettes d’un film de molécules<br />
d’eau encore plus mince. Ainsi un mur en terre n’est jamais complètement sec : il<br />
contient toujours un peu d’eau entre les plaquettes d’argile, eau qui ne s’évapore<br />
pas car elle est en équilibre avec la vapeur d’eau contenue dans l’air.<br />
Gonflement et retrait des argiles [ill. 10]<br />
Cette physique du château de sable, où la cohésion capillaire n’est possible<br />
qu’à la condition que de l’eau et de l’air soient simultanément présents entre<br />
les grains, n’est d’aucun secours pour comprendre le matériau terre à l’état<br />
plastique, visqueux ou liquide. Dans ces trois états hydriques, la terre est<br />
un mélange de grains saturé d’eau, sans air : il n’existe donc plus de forces<br />
capillaires. Une autre discipline, la physico-chimie des boues d’argile, est alors<br />
davantage adaptée pour décrire et comprendre la terre. Il existe de nombreux<br />
types d’argile qui présentent en particulier des propriétés de gonflement et de<br />
retrait très différentes. Les argiles gonflantes, comme la smectite, sont capables<br />
d’absorber énormément d’eau entre leurs feuillets : elles fissurent énormément<br />
au séchage. Ce n’est pas le cas des argiles non-gonflantes, comme la kaolinite.<br />
La différence principale entre ces deux argiles est que les feuillets de smectite<br />
portent une charge électrique négative tandis que le feuillet de kaolinite est<br />
neutre.<br />
Boues d’argile [ill. 11]<br />
Les propriétés électriques de surface des particules colloïdales gouvernent les<br />
propriétés rhéologiques des boues d’argile. Celles-ci présentent par exemple<br />
la propriété de se transformer en gel au repos ou de se fluidifier lorsqu’elles<br />
sont malaxées. La phase aqueuse dans laquelle sont dispersées les particules<br />
argileuses joue un rôle prépondérant dans les propriétés macroscopiques des<br />
boues. Un mélange argile/eau peut être liquide en milieu basique ou plastique<br />
en milieu acide, pour une teneur en eau identique. La concentration en sel<br />
modifie également la viscosité d’une boue d’argile de manière spectaculaire. La<br />
composition chimique de l’eau modifie la nature des interactions entre particules<br />
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