Les cahiers de Rhizome : La Effets mondialisation psycho-sociaux est un de déterminant la mondialisation social sur de la santé mentaleLa maternité adolescente :au carrefour de la subjectivitéet du social•Ema Poncede LeónPsychologue,Psychanalyste,Membre Titulairede l’AssociationPsychanalytiqued’UruguayTout au long de l’histoire, la plupart des femmes se sont initiées comme mèresdans la tranche d’âge qui correspond avec ce qu´on appelle aujourd’huil’adolescence. L’OMS définit l’« adolescence » comme la période située entrel’enfance et l’âge adulte, c’est à dire environ entre 10 et 20 ans. Ce n´est pas pourautant un phénomène nouveau. Les changements sociaux et économiques quiont eu lieu au XX ème siècle, parmi lesquels se trouve l’apparition du conceptd’« Adolescence », nous apportent un nouveau regard sur la maternité danscette étape de la vie.[Texte traduit parBéatrice Bossé]1. CristinaPalomar Merea,dans son articleMaternidad, Historiay Cultura, LaVentana, N22/205,Mexico, signalel’existence d’unimaginaire maternel“transhistoriqueet transculturel”qui est en relationavec des argumentsbiologiques etmythologiques.| 34La maternité et l’adolescence ont une dimensionsubjective singulière, et sont en mêmetemps des constructions sociales. En effet, cequi est spécifique à la maternité adolescente serapportera aux déterminants socioculturels dechaque époque, ainsi qu’à ceux de chaque régionet couche sociale particulière.Comme psychanalystes, nous étudierons lecarrefour entre la subjectivité et l’entouragesocio-culturel dans lequel le sujet est plongé.Etant donné le poids des déterminants sociauxsur la « Maternité Adolescente » nous situeronsnotre tâche clinique dans le contexte social.Comment se positionner en santé mentaleface à la maternité adolescente ?• Saisir et déconstruire les déterminantsidéologiques et culturels, les mythes présentsdans l’imaginaire social, autant les nôtres queceux des sujets que l’on prétend aiderLa maternité est un phénomène complexe et nonunivoque qui a évolué dans ses pratiques et dansl’imaginaire social au cours de l’histoire et dansles différentes cultures. Ce que nous voulonssignaler c’est que l’évolution historique, bienqu´elle produise progressivement des changementsradicaux dans l’exercice du rôle maternel,n’efface pas ce qui la précède. Cependant,un patrimoine transhistorique 1 se constitue, unsédiment fait de mythes et d’expériences transmisde générations en générations au traversd’images, de discours et de représentations quinourrissent l’inconscient.Même si chaque époque fabrique ses impératifspour régler les relations sociales en conjonctionavec les situations historiques particulières, cethéritage du passé se transmet parallèlement defaçon latente. Les sujets de chaque époque, dechaque culture et de chaque couche sociale sontles porte-paroles de conflits entre les injonctionssocioculturelles actuelles et ce qui émerge de lapropre histoire subjective et transgénérationnelle(dans une dimension familiale et égalementsociale).Ces conflits expriment la tension entre deséléments culturels actuels et du passé. Quelleest la valeur de la maternité dans la société ? Quesous-entend le rôle maternel, que comprend-il ?Quelle est la fonction du père dans la structurefamiliale ? Comment les fonctions maternelleset paternelles sont-elles en lien ? La maternitécomme une mission d’ordre social ou commeun choix ? Quel est le rôle des institutions, de lasociété et de l’État par rapport à la maternité ?,etc.Les questions et les hypothèses que nous posonssont fortement orientées au niveau idéologiqueen fonction de la culture dans laquelle noussommes immergés. Nous ne devons pasperdre de vue que nous sommes constammentconfrontés avec ce qui est différent, et quenous devons laisser en suspend notre savoirprofessionnel pour “apprendre” d’une réalitéinconnue et complexe, et, à partir de là, dessinerles formes des interventions.Dans le contexte socioculturel du mondeglobalisé dans lequel la femme de classemoyenne s´est consacrée au milieu éducatif et
| La maternité adolescente : au carrefour de la subjectivité et du socialau travail presque à égalité avec l’homme, etdans lequel la maternité apparaît comme uneoption, la maternité adolescente est montréecomme un problème à éviter, idée qui s´appuiesur des discours concrets de la littératuresociologique qui soulignent un risque du pointde vue médical, social et psycho-affectif. Lesmythes en vigueur dans notre société nourrissentune vision problématique de la grossesse àl’adolescence, avec une approche de risque etnon de situation.Révision des mythes 2Mythe 1 : La grossesse à l’adolescence est lerésultat de la négligence et/ou est mal acceptéeLa plupart des interviewées déclarent avoir planifiéla grossesse, ayant un couple stable. Lesexpériences vécues qui dominent sur la maternitépotentielles sont positives. Après la naissancedu bébé, les expériences vécues positivesdominent aussi.Mythe 2 : Le père n’est pas présentDans la plupart des cas, il existe une relationde deux années ou plus avec le père de leur enfant.La distribution des rôles de genre est traditionnelle: l’homme assure la subsistance etla femme est responsable de l’éducation et dela reproduction. Il y a une frustration des hommesdue aux difficultés d’accès au marché detravail.Mythe 3 : L’abandon des études par la mèreadolescente se produit à cause de la grossesseDans les faits, celui-ci arrive plutôt avant lagrossesse et il est lié à des circonstances familiales,sociales et aux centres éducatifs.Mythe 4 : Il existe des antécédents degrossesses à l’adolescence dans la familleCes antécédents ne se trouvent que dans lamoitié des cas, ce qui ne permet ni d’affirmer nide nier ce mythe. L’âge apparaît plus lié au momentde l’initiation sexuelle et de la constitutiondu couple stable qu’aux antécédents familiaux.Pourtant, chaque situation mérite un regardparticulier. Nous ne pouvons pas anticiperle fait que la maternité à l’adolescence aurades conséquences négatives, sans perdre devue la complexité que signifie conjuguer deuxprocessus critiques en même temps : “...la crisenormale de la grossesse se superpose à la crisenormale de l’adolescence, qui elle, suppose unelutte conjointe entre des exigences biologiqueset psychologiques » (Vives y Lartigue de Vives,1991), bien que le plus grand risque prenne formelorsqu’une situation de pauvreté et d’exclusionsociale antérieure à la grossesse s’ajoute à cesfacteurs.Selon Peña y Buchwald, dans la clinique avec desadolescentes enceintes, bien que l’on observedes scènes psychiques très différentes, on peutdistinguer quelques situations récurrentes :- Des manques dans le processus de séparationindividuationde la propre mère. L’adolescenterevivra à travers l’enfant l’impossibilité de lacoexistence de l’union et de la séparation.- Un manque de narcissisation lors despremières périodes de construction de l’appareilpsychique, pendant lesquelles l’enfant et/ou lecouple restaurent l’union perdue, au travers d’un« être avec l’autre ».- La tentative de vérifier la fécondité et unecomplétude imaginaire à travers la grossesse.La crise surviendra avec la naissance etl’allaitement.La non résolution de ces conflits donne lieu àdes tableaux régressifs dans lesquels l’enfantest vécu comme un frère avec lequel la mère setrouve en concurrence vis à vis de ses besoins desoins maternels, et donc dans une impossibilitéà se séparer de sa famille d’origine. Il existecependant des adolescentes qui ont un niveaude maturité suffisant qui leur permet d’intégrerle rôle maternel dans leur identité, ce qui amènedes situations paradoxales à plusieurs niveaux.Les motivations subjectives des adolescentesqui tombent enceintes ont souvent un rapportavec la quête d’équilibre narcissique dont nousavons déjà parlé qui, dans cette circonstance,peuvent devenir la meilleure alternative pourl’homéostasie psychique. Nous ne devons pasoublier que ces grossesses posent fréquemmentla question de l’avortement et qu’il a été choisiconsciemment ou inconsciemment de continuerla grossesse. Toutefois, étant donné les conditionssociales défavorables dans lesquelles évoluent,pour la plupart, ces jeunes filles, celles-ci ontsouvent des difficultés importantes pour éleverleurs enfants.L’“approche de situation” permet d’intégrerla perspective subjective qui se réfère auxexpériences vécues et aux circonstances2. Ces donnéesproviennent d’uneétude à caractèrequalitatif réalisée àpartir d’interviewsde 30 mèresadolescentes quiont participé àun programmed’accompagnementpendant 11 moisavec 8 agentssocio-éducatifs(ASSE/MSP/Infamilia-Uruguay).| 35