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DOSSIER MALI<br />

Économie<br />

L’étonnante résilience<br />

Malgré les tensions,<br />

le pays affiche des indicateurs<br />

PLUTÔT POSITIFS.<br />

par Fatoumata Maguiraga<br />

Malgré les crises sécuritaire, institutionnelle et sanitaire<br />

qu’elle a connues ces dernières années, l’économie<br />

malienne affiche plutôt des indicateurs<br />

positifs : une croissance régulière du produit intérieur<br />

brut (PIB) autour de 5 %, une inflation contenue et des<br />

engagements internationaux tenus. Une résistance aux chocs qui<br />

n’occulte pas la fragilité d’une économie ayant du mal à amorcer<br />

le développement. Selon la Banque mondiale, le ratio des<br />

Maliens défavorisés en fonction du seuil de pauvreté national est<br />

de 42,1 % de la population, en 2019. Un chiffre qui tranche avec<br />

le taux de croissance positif de la richesse nationale.<br />

Mais il traduit en réalité « une situation économique actuelle »<br />

qui se caractérise par « une forme de résilience », note Boubacar<br />

Ouologuem, chef de section Suivi du marché financier à la Direction<br />

nationale du trésor et de la comptabilité<br />

publique. Malgré la crise institutionnelle née<br />

de celle postélectorale, en 2018, ainsi que<br />

les grosses difficultés liées à la pandémie de<br />

Covid-19 en 2020, « les objectifs de recettes<br />

fiscales ont été atteints. Le budget a presque<br />

été dans les normes », constate ce spécialiste.<br />

Sur le marché financier, le Mali continue<br />

d’émettre normalement. En moyenne, il a<br />

enregistré 200 % de taux de soumissions<br />

aux émissions. Une « confiance des investisseurs<br />

» qui « tient aux potentialités du pays à<br />

rembourser ses dettes ».<br />

En 2020, 906 milliards de francs CFA<br />

ont été mobilisés sur le marché financier<br />

sur 830 milliards demandés, contre 543 milliards en<br />

2019. En 2021, avant la clôture de l’année, les fonds mobilisés<br />

ont atteint 810 milliards de FCFA, l’objectif étant<br />

905 milliards. Malgré la situation, l’engouement des investisseurs<br />

est démontré par un engagement des banques dont<br />

« les propositions tournent autour de 220 % du montant »,<br />

ajoute Boubacar Ouologuem. Les coups d’État du 18 août 2020<br />

et du 24 mai 2021 ont provoqué le retrait des partenaires,<br />

QUELQUES DONNÉES<br />

2020 (% du PIB)<br />

Dette globale : 44,7<br />

Taux d’investissement : 22,6<br />

Croissance du PIB réel : -1,6<br />

Poids secteurs<br />

Primaire : 37 %<br />

Secondaire : 20,6 %<br />

Tertiaire : 42,4 %<br />

Taux de pauvreté : 42 (en 2019)<br />

Taux d’inflation : 1,9 (juillet 2021)<br />

qui, aujourd’hui, commencent à revenir. Alors que l’inflation,<br />

estimée à 1,9 % (juillet 2021), reste aussi maîtrisée. Évaluée<br />

à 4,7 en 2018 et 2019, la croissance du PIB a enregistré un recul<br />

de 1,6 en 2020, en raison de la pandémie, mais les projections<br />

de 2021 tablent sur un taux positif, autour de 4 %. Le Mali fait<br />

encore office de « bon élève » en matière de partenariat, parce<br />

qu’il continue d’honorer ses engagements, malgré les difficultés.<br />

Les réformes pour redynamiser les recettes fiscales et le respect<br />

des normes font partie des facteurs de cette confiance.<br />

Dans le domaine du marché financier, la crise sanitaire a<br />

même eu un impact positif, selon les acteurs, « grâce » à la « surliquidité<br />

au niveau des banques qui ont investi beaucoup au<br />

niveau de l’État ». Il y a eu également les réformes entreprises<br />

par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest pour<br />

booster l’économie – avec leurs effets positifs sur les taux –,<br />

permettant d’emprunter moins cher.<br />

L’épidémie de Covid-19 n’a cependant pas épargné le Mali,<br />

qui a enregistré ses premiers cas en mars 2020. La crise a frappé<br />

de nombreux secteurs, dont ceux des services et du commerce<br />

(représentant environ 40 % de l’économie), qui ont particulièrement<br />

souffert. Près de 75 % des petites et moyennes entreprises<br />

(PME) ont subi les impacts négatifs de la pandémie. Cela<br />

s’explique par la fermeture de certains services<br />

liés au voyage, comme les agences, les<br />

courtiers d’assurance, les restaurateurs, ou<br />

encore les transporteurs. « Le problème est<br />

que les PME n’ont pas eu droit aux mesures<br />

d’accompagnement pour leur permettre<br />

de refaire surface », regrette Sanou Sarr,<br />

le président du réseau des PME. Contrairement<br />

à d’autres pays où les gouvernements<br />

ont injecté de l’argent pour aider certaines<br />

sociétés à se relever. Au Mali, les soutiens<br />

annoncés n’ont pas été à la hauteur. L’État a<br />

mobilisé 20 milliards de FCFA pour épauler<br />

ces entreprises, à travers le Fonds de garantie<br />

du secteur privé. Mais les « conditions<br />

n’ont pas permis de faciliter l’accès à ce fonds », ajoute Sanou<br />

Sarr. « Si le pays est encore debout, c’est grâce aux PME », insistet-il.<br />

Elles ont su s’adapter pour « maintenir la tête hors de l’eau ».<br />

L’absence de sources pérennes de financement, l’accès à la<br />

commande publique qui, malgré un décret de 2018, n’est pas<br />

encore effectif, continuent d’être un frein pour les sociétés.<br />

L’inexistence de ce marché potentiel les empêche de se développer.<br />

Les acteurs pointent aussi du doigt certaines pratiques<br />

Sources : Banque mondiale, BCEAO.<br />

64 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>422</strong> – NOVEMBRE 2021

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