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LE JURISTE D'ENTREPRISE FACE AUX CONTENTIEUX - AFJE

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vrer une autorisation de mise en place<br />

des dispositifs d’alertes éthiques de<br />

manière anonyme au risque d’instituer<br />

« un système organisé de délation<br />

professionnelle », et de renforcer<br />

« le risque de dénonciation calomnieuse<br />

» (Délib. CNIL n° 2005-110, 26<br />

mai 2005), elle a, par la suite, adopté<br />

une délibération portant autorisation<br />

unique de traitement, dès réception<br />

d’une déclaration de conformité, sans<br />

autorisation préalable (Délib. CNIL n°<br />

2005-305, 8 déc. 2005, JO 4 janv.). La<br />

CNIL est ainsi parvenue à une situation<br />

de compromis, excluant tout devoir<br />

généralisé de dénonciation tout en<br />

légitimant la pratique de l’alerte professionnelle<br />

: « cette autorisation impose<br />

de ne pas inciter à des dénonciations<br />

anonymes (…), mais au contraire de<br />

susciter l’identification du donneur<br />

d’alerte en assurant sa confidentialité<br />

(…) » (Barrière F., Les dispositifs<br />

d’alertes professionnelles : le temps<br />

de l’apaisement ?, Rev. sociétés 2011,<br />

p. 276).<br />

Ainsi, l’impératif de protection des données<br />

personnelles du donneur d’ordre<br />

assorti de la protection de la vie privée<br />

de(s) personne(s) susceptible(s) d’être<br />

dénoncée(s) encadrent la pratique de<br />

la dénonciation, jusqu’à l’ériger en<br />

véritable droit.<br />

II – Vers la consécration d’un droit<br />

Les personnes dénoncées dans le<br />

cadre d’alertes professionnelles ne<br />

peuvent être mises en cause que pour<br />

des faits précis (A), et disposent de<br />

recours contre des dénonciations<br />

calomnieuses ou mensongères (B).<br />

A – circonscription de<br />

l’objet de la dénonciation<br />

La CNIL précise les dispositifs pouvant<br />

faire l’objet d’un engagement<br />

de conformité dans le cadre d’une<br />

alerte professionnelle : « [les traitements]<br />

répondant à une obligation<br />

législative ou réglementaire de droit<br />

français visant à l’établissement de<br />

procédures de contrôle interne dans<br />

les domaines financier, comptable,<br />

bancaire et de la lutte contre la corruption<br />

» (Délib. CNIL n° 2005-305,<br />

8 déc. 2005, JO 4 janv., art. 1) ; Elle<br />

précise également : « (…) Des faits qui<br />

ne se rapportent pas à ces domaines<br />

peuvent toutefois être communiqués<br />

aux personnes compétentes de l’organisme<br />

concerné lorsque l’intérêt vital<br />

de cet organisme ou l’intégrité physique<br />

ou morale de ses employés est<br />

en jeu » (Délib. CNIL n° 2005-305, 8<br />

déc. 2005, art. 2). Un syndicat a sollicité<br />

l’annulation d’un code de conduite<br />

permettant aux salariés de dénoncer<br />

POINT DE VUE<br />

des faits autres que ceux prévus à<br />

l’article 1 ; la Cour de cassation a fait<br />

droit à cette demande (Cass. soc., 8<br />

déc. 2009, n° 08-17.191 ; Desbarats<br />

I., Alertes, codes et chartes éthiques<br />

à l’épreuve du droit français, D. 2010,<br />

p. 548). La CNIL a en conséquence,<br />

supprimé toute référence à l’intérêt vital<br />

ou à l’intégrité physique ou morale des<br />

salariés dans sa décision d’autorisation<br />

unique (Délib. CNIL, 2010-369, 14 oct.<br />

2010, JO 8 déc.). Cette évolution met<br />

en évidence le contrôle de l’autorité<br />

judiciaire et de la CNIL, gardiennes des<br />

libertés, garde-fous contre les dénonciateurs<br />

abusifs tentés de s’immiscer<br />

dans la vie privée des salariés.<br />

B – la sanction de l’abus<br />

du droit de dénoncer<br />

L’autorité judiciaire prévoit des sanctions<br />

spécifiques pour le dénonciateur<br />

abusif. La dénonciation « d’un<br />

fait qui est de nature à entraîner des<br />

sanctions judiciaires, administratives<br />

ou disciplinaires et que l’on sait totalement<br />

ou partiellement inexact » est<br />

qualifiée de calomnieuse (C. pén., art.<br />

L. 226-10 et s.). A titre de récente<br />

illustration sur ce droit de recours, les<br />

plaintes déposées par les cadres de<br />

chez Renault mis en cause dans une<br />

affaire d’espionnage (AFP, La plainte<br />

pour dénonciation, Le Figaro, 19 janv.<br />

2011). Par ailleurs, la dénonciation<br />

mensongère est également incriminée<br />

(C. pén., art. 434-26).<br />

Ainsi, la dénonciation n’est pas considérée<br />

comme un devoir, ce qui n’est<br />

pas le cas, aux Etats-Unis, où les donneurs<br />

d’alerte sont érigés en « héros<br />

publics » (Bailly E., Daoud E., le whistleblowing<br />

et la protection des données<br />

à caractère personnel : le compromis<br />

américano-européen, AJ pénal 2010,<br />

p. 269). Or, avant d’engager une<br />

réflexion autour de l’opportunité de<br />

la remise en cause de la conception<br />

française, il convient de s’interroger<br />

sur l’utilité de la dénonciation. Permetelle<br />

de lutter efficacement contre les<br />

atteintes au droit des affaires ?<br />

■<br />

Juriste d’Entreprise Magazine N°11 – Novembre 2011<br />

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