Magazin von FRAGILE Suisse - Nummer 1, März 2011

Les victimes de lésions cérébrales ont des compétences. Le tout est de trouver des postes adaptés.
Travailler après une lésion cérébrale ?
Texte : Carine Fluckiger, Photos : Robert Hofer
Bien des victimes de lésions cérébrales sont fauchées en pleine vie active. Quelles
sont leurs chances de retravailler à long terme ? La question mérite d’être éclairée du
point de vue des victimes, mais aussi des employeurs. Réalité économique oblige, les
capacités résiduelles des unes ne répondent pas toujours aux exigences des autres.
Une réalité que FRAGILE Suisse tient à rappeler à l’heure des débats sur la VIe révision
de l’assurance-invalidité.
Demandez à un cérébro-lésé quel est son
vœu le plus cher : il vous répondra certainement
qu’il espère retravailler. Selon
une enquête réalisée en 2004 auprès de
25 traumatisés sévères à la Clinique romande
de réadaptation (CRR) à Sion, la
réinsertion professionnelle figure ainsi
en bonne place parmi leurs principaux
critères de qualité de vie.
tences et à qui on a envie de donner une
chance. Mais elles ont parfois de la peine
à avoir un projet réaliste et à reconnaître
leurs difficultés. »
Le contexte conditionnera également
les chances d’un retour au travail : la
conjoncture économique (et donc la situation
sur le marché du travail), le soutien
dont peut bénéficier la victime de la
part de sa famille ou de son entourage,
et la mise en place de programmes de
réinsertion spécifiquement adaptés aux
cérébro-lésés.
Un fossé entre désir et réalité
Mais entre désir et réalité, il peut y avoir
un fossé que les victimes tardent parfois à
reconnaître. Conseillère chez IPT intégration
pour tous, une fondation privée spé- Le plus invalidant
cialisée dans le placement de personnes Restent les impondérables, à savoir les
atteintes dans leur santé, Cathy Barraud troubles fonctionnels qui découlent
a eu l’occasion de l’observer à plusieurs d’une lésion. Parmi ceux-ci, les troubles
reprises sur le terrain : « Ce sont des per- cognitifs et comportementaux sont les
sonnes volontaires, qui ont des compé- plus grands obstacles à une réinsertion à
long terme. « Quelqu’un qui présente des
troubles de l’attention aura toujours des
problèmes au travail, et cela quelle que
soit sa profession », souligne ainsi le Dr
Philippe Vuadens, responsable du Service
de réadaptation de la CRR.
Dans un contexte économique de plus
en plus axé sur la performance et le rendement,
d’autres difficultés courantes chez
les victimes s’avèrent particulièrement
invalidantes : fatigabilité, faible résistance
au stress, manque de flexibilité, etc.
Actif à 90 % en tant que menuisier,
David* a sollicité en 2009 la Helpline
de FRAGILE Suisse pour participer à une
séance de réseau avec son employeur. But
de la réunion : réaménager le temps de
travail de l’employé pour lui accorder plus
de temps de repos. « Je dois me limiter à
une ou deux choses importantes par jour ;
après, je dois débrancher », explique-til.
Son employeur, qui a dû le licencier
entretemps pour raisons économiques,
témoigne : « Il travaillait bien, même trop
bien. Mais il était très lent et son rendement
variait selon les jours. Comme
il a l’air sain, on est tenté de le secouer,
surtout en période de stress. Pendant que
ses collègues se dépensaient, il donnait
l’impression de ne pas mettre le même
cœur à l’ouvrage. Ce n’est pas facile pour
l’esprit d’équipe. »
24 FRAGILE Suisse 01 | 2011