de marie de hongrie aux gilles de binche - Mémoires du Hainaut ...

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domaine étroit de nos recherches, de nos connaissances particulières. Notre crédulité
est infinie s'il s'agit de nos coutumes festives, comme notre puissance imaginative à
laquelle rien ne résiste. Le géant athois Mam'zelle Victoire, prétendument né, pour
l'historien Fourdin (1869), à l'époque de Marie-Thérèse, a été créé en 1860, par Henri
Hanneton et Henri Ouverleaux fils. Mais la fable d'une Mam'zelle, fille de l'âge d'or
thérésien, continuera longtemps à se colporter dans l'univers athois et les feuillets touristiques
(cf. Christian CANNUYER, Miettes sur la ducasse d'Ath, dans Tradition wallonne,
t. IV, Bruxelles, 1987, p. 80. C'est à Jean-Pierre Ducastelle, le spécialiste
wallon des géants que l'on doit cette trouvaille, cf. ibidem, p. 79). Il en est de même
pour les légendes historisantes qui prétendent, avec une désinvolture que n'arrête aucun
sens critique, expliquer les origines du carnaval de Cerfontaine qui eut son heure
de célébrité; les Bobelurons de Spa, aujourd'hui disparus; les Blanc Moussis de la
Laetare stavelotaine, légende créée ou diffusée par le notaire Philippart et le journaliste
Walter Fostier; les Haguètes qui seraient des lépreux; Andenne et ses ours... Le
phénomène est général en Europe. Il se trouve toujours quelque pseudo-érudit pour
faire montre de ses connaissances historiques et une masse populaire qui fait
confiance, adopte l'affabulation en s'imaginant que, puisqu'elle provient de tel milieu
élitaire, c'est un fait, une théorie avérée. A Mohacs, en Hongrie, où l'époux de la reine
Marie de Hongrie trouva la mort en combattant les Turcs, circulent, au carnaval, des
masques aux faces de bois terribles, vêtus de peaux et armés de bâtons. Cet aspect terrifiant
suffira pour susciter une fable explicative historisante : ces habitants de Mohacs
se seraient habillés et masqués de la sorte afin d'effrayer les Turcs dont la menace pesa
sur le pays, durant des siècles. On pourrait multiplier les exemples européens, que
reproduisent, à l'envi, maints dépliants touristiques ou publicitaires. Notre crédulité est
incommensurable. Aux objections que la simple logique suscite, répond l'adage populaire,
«Il n'y a pas de fumée sans feu».
177. Patrice de la Tour du Pin : «Les pays qui n'ont plus de légendes seront
condamnés à mourir de faim». L'imagination du poète élabore des chimères plaisantes.
La vérité scientifique qui fonde la vraie connaissance se forge par l'exigence
du travail et la sévérité critique de la méthode. Faut-il, au nom de la poésie, continuer,
malgré les Bollandistes ou autres historiens sérieux, à croire à saint Expédit ou à sainte
Philomène, deux personnages vénérés de ma prime jeunesse ?
178. Dans ces lignes, lorsque je parlerai de Binche, il s'agira de la ville ancienne.
Autour du centre urbain, à partir de janvier 1977, une loi a groupé les communes de
Bray, Buvrinnes, Epinois, Levai, Péronnes, Ressaix, Waudrez, en créant une entité administrative
qui conserve le nom de l'ancienne ville. Chacune de ces localités rurales
ou à demi industrialisées a gardé son autonomie carnavalesque.
179. En attendant une histoire du carnaval, dont, grâce à plusieurs amis et confrères,
j'ai réuni les éléments mais que je ne pourrai peut-être pas, à cause de mon âge, mener
jusqu'à son terme, je me permets de renvoyer le lecteur à certaines de mes études qui
tentent une approche rapide du sujet : Samuel GLOTZ, Les origines de la tradition du
masque en Europe, dans Le masque dans la tradition européenne, catalogue d'une exposition
qui s'est tenue au Musée International du Carnaval et du Masque, à Binche,
du 13 juin au 6 octobre 1975, rédigé sous la direction de S. Glotz, par dix-neuf ethnologues
d'Europe, pp. 1-43, le catalogue comporte XXXI-474 p.; Le souvenir napoléonien
dans le carnaval athois, en 1841 et 1842, dans le volume des Mélanges
J. Dugnoille et R. Sansen, Autour de la ville en Hainaut, dans Cercle d'Histoire et