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Enoncé Théorique de TPM - Pierre Cauderay.pdf - EPFL

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«Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas»<br />

Cette phrase continue à faire couler <strong>de</strong> l’encre et à provoquer <strong>de</strong>s controverses<br />

plus d’un quart <strong>de</strong> siècle plus tard, alors que nous sommes effectivement<br />

arrivés au 2 ème siècle. Les uns la contestent, prétendant qu’une telle<br />

phrase ne peut pas être <strong>de</strong> Malraux (Malraux lui-même a parfois nié l’avoir<br />

prononcée); d’autres abon<strong>de</strong>nt dans son sens, quitte à ergoter sur le terme<br />

exact que Malraux aurait employé entre religieux, spirituel ou mystique;<br />

d’autres encore s’interrogent tout simplement sur le sens et la portée <strong>de</strong><br />

cette phrase si controversée et problématique. Dans une interview pour Le<br />

Point du 0 décembre 7 , Malraux nie avoir prononcé la fameuse phrase,<br />

déclarant:<br />

«On m’a fait dire que le XXIe siècle sera religieux. Je n’ai jamais dit cela, bien<br />

entendu, car je n’en sais rien. Ce que je dis est plus incertain. Je n’exclus pas<br />

la possibilité d’un événement spirituel à l’échelle planétaire.»<br />

Malgré cela, plusieurs auteurs, qui se sont personnellement entretenu avec<br />

Malraux, jurent l’avoir entendu plusieurs fois <strong>de</strong> leurs propres oreilles. Malraux<br />

l’a donc certainement dite, mais réfute probablement la portée que sa<br />

phrase a prise, et les mauvaises interprétations qui pourraient en être tirées.<br />

Quoiqu’il en soit, cette phrase est <strong>de</strong>venu un vrai lieu commun, sans doute<br />

la formule la plus célèbre et la plus répandue <strong>de</strong> toute l’oeuvre <strong>de</strong> Malraux,<br />

ce qui démontre bien son adéquation à notre époque et sa pertinence. Alors<br />

puisqu’il nie l’avoire dite, qu’a-t-il donc bien voulu sous-entendre par cette<br />

fomule?<br />

Hugues <strong>de</strong> Jouvenel parle dans Futuribles <strong>de</strong> la phrase attribuée à Malraux,<br />

pour souligner que « si les institutions religieuses, comme tous les prêts-àpenser,<br />

sont en déclin, en revanche, le besoin <strong>de</strong> croire n’a pas disparu. »<br />

La Cathédrale invisible, p. 04, Boucq - Jodorowsky ( 2)<br />

Le Dalaï-lama, interrogé en juin 8 à l’Assemblée nationale sur la phrase<br />

<strong>de</strong> André Malraux, répondit que « le XXIe siècle sera sans doute plus spirituel<br />

que religieux. Gran<strong>de</strong> est la réticence actuelle à l’égard <strong>de</strong> l’appartenance<br />

à une Église. Mais immense et extraordinairement divers apparaît l’univers<br />

<strong>de</strong>s croyances échappant à la raison ».<br />

Pour Malraux, la religion n’est pas essentiellement une question d’institutions,<br />

ni <strong>de</strong> co<strong>de</strong> moral. Dans un texte <strong>de</strong> , il écrit :<br />

« L’homme ne se construit qu’en poursuivant ce qui le dépasse [...] toute la<br />

civilisation mo<strong>de</strong>rne [...] a substitué un fantôme aux profon<strong>de</strong>s notions <strong>de</strong><br />

l’homme qu’avaient élaborées les gran<strong>de</strong>s religions. Chacune <strong>de</strong> celles-ci<br />

rendait compte à sa manière <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur humaine. La science, non [...]<br />

Le drame <strong>de</strong> la civilisation du siècle <strong>de</strong>s machines n’est pas d’avoir perdu les<br />

dieux, car elles les a perdus moins qu’on ne dit: c’est d’avoir perdu toute notion<br />

profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’homme. [...] Depuis cinquante ans, la psychologie réintègre<br />

les démons dans l’homme. Tel est le bilan sérieux <strong>de</strong> la psychanalyse. Je pense<br />

que la tâche du prochain siècle, en face <strong>de</strong> la plus terrible menace qu’ait connue<br />

l’humanité, va être d’y réintégrer les dieux ».<br />

A Tokyo quatre ans plus tard il dit:<br />

« Existe-t-il <strong>de</strong>s valeurs sur lesquelles la survie du mon<strong>de</strong> peut se poser?… Il<br />

est nécessaire que les anciennes civilisations se comprennent, non pour retrouver<br />

leur passé, mais pour faire ensemble l’avenir. En attendant ce sera le<br />

temps <strong>de</strong>s limbes—jusqu’à l’époque où quelque chose <strong>de</strong> sérieux surgira—ou<br />

bien un nouveau type d’humain, ou bien un nouveau fait religieux, ou bien<br />

quelque chose <strong>de</strong> totalement imprévisible—la libre disposition <strong>de</strong> la mort, par<br />

exemple… […] la civilisation <strong>de</strong> la science et <strong>de</strong>s machines peut presque<br />

tout apporter à l’homme, sauf une raison <strong>de</strong> vivre. ». « Notre civilisation<br />

sera contrainte <strong>de</strong> trouver sa valeur fondamentale ou elle se décomposera».<br />

Un an plus tard, dans L’Actualité <strong>de</strong> mai 70, il soulignera <strong>de</strong> nouveau<br />

l’opposition entre notre civilisation technologiquement avancée et le vi<strong>de</strong>,<br />

le manque <strong>de</strong> sens à son centre:<br />

« […] notre crise est celle <strong>de</strong> la civilisation la plus puissante que le mon<strong>de</strong> ait<br />

connue. Quelques hommes, à la fin du XVIIIe siècle, ont posé <strong>de</strong> façon saisissante<br />

la question : «Qu’est-ce que l’homme?» En face <strong>de</strong> nous, ce n’est pas la<br />

nature <strong>de</strong> l’homme qui est en cause, c’est sa raison d’être, singulièrement plus<br />

dramatique que les gauchismes ou les droitismes qui l’accompagnent. Et notre<br />

réponse, c’est: «A quoi bon conquérir la Lune, si c’est pour s’y suici<strong>de</strong>r?».<br />

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