Enoncé Théorique de TPM - Pierre Cauderay.pdf - EPFL
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(1) Les cathédrales gothiques<br />
« La beauté hait l’enten<strong>de</strong>ment parce qu’il exige d’elle ce dont elle n’est pas<br />
capable. » Hegel.<br />
En réinterprétant les bâtiments religieux à l’ai<strong>de</strong> du principe soustractif, il<br />
en ressort une analyse radicale : Le volume extérieur – ajouté, construit –<br />
l’est à la gloire <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> l’homme ; malgré ce que l’on veut bien en dire. Il<br />
est en effet une addition bâtie dans le territoire, une construction réfléchie,<br />
cohérente, matérialisée. Tandis que le volume intérieur – soustrait –,<br />
A gauche: Image <strong>de</strong> synthèse <strong>de</strong> la cathédrale <strong>de</strong> Cologne<br />
le grand espace vi<strong>de</strong>, rappelle l’immatérielle gloire divine.<br />
La peau <strong>de</strong>s cathédrales résulte donc <strong>de</strong> cette contradiction totale entre<br />
l’espace intérieure et extérieure. Tout le développement <strong>de</strong> l’art gothique<br />
peut être interprété comme une lutte contre cette contradiction. Faire disparaître<br />
cette dichotomie contenue dans la construction, par la soustraction.<br />
La réduction <strong>de</strong> la matière au minimum nécessaire. Les cathédrales<br />
gothiques les plus ambitieuses, comme celle <strong>de</strong> Beauvais a même fini par<br />
s’écrouler à force <strong>de</strong> dématérialisation et <strong>de</strong> démesure intérieure. La cathédrale<br />
absolue est invisible et elle contient un espace irréaliste mais percevable.<br />
Cela rappelle l’image onirique du début <strong>de</strong> l’exposé: les églises en fil<br />
<strong>de</strong> fer.<br />
Résister à la matière serait une façon <strong>de</strong> la transfigurer, <strong>de</strong> la transformer<br />
pour faire surgir une autre matérialité. Il y avait déjà dans les mosquées du<br />
13ème siècle, une aspiration métaphysique similaire. Les « mouqarnas »,<br />
avec leurs <strong>de</strong>ntelles <strong>de</strong> stalactites ornant les principaux points <strong>de</strong> tension,<br />
contribuent à une négation <strong>de</strong> la matière. Le ciselage <strong>de</strong> la pierre et sa renaissance<br />
dans la lumière révèle l’Innommable, l’Invisible. »<br />
Salwa et Selma Mikou, Oraisons mo<strong>de</strong>rnes, Architecture d’aujourd’hui, No<br />
6.<br />
La vision extérieure d’une cathédrale n’est donc que le fruit <strong>de</strong> la gloire humaine,<br />
<strong>de</strong> sa capacité à contrôler le réel et à bâtir contre les lois <strong>de</strong> la gravitation<br />
<strong>de</strong>s tours toujours plus hautes. Tandis que l’espace intérieur est une<br />
mesure <strong>de</strong> la dimension mystique <strong>de</strong> l’homme.<br />
Dominique Logna-Prat dans La maison <strong>de</strong> Dieu, une histoire monumentale<br />
<strong>de</strong> l’Eglise au Moyen Age, retrace l’histoire passionnante et longue <strong>de</strong><br />
la pétrification <strong>de</strong> l’Eglise. Une progressive confusion du contenu (l’Eglisecommunauté)<br />
et du contenant (L’Eglise-bâtiment):<br />
« L’Eglise a été institutionnalisée dès le 4ème siècle, pour débloquer les résistances<br />
à sa pétrification et au besoin les refouler dans l’hérésie. […] [Puis au<br />
11ème siècle], la réforme grégorienne amplifie encore l’écho <strong>de</strong> la pétrification<br />
<strong>de</strong> l’Eglise. […] D’une part, la controverse sur l’eucharistie, dans laquelle<br />
les réalistes, partisans <strong>de</strong> la présence réelle, finissent par l’emporter sur les<br />
symbolistes : l’église/Eglise est désormais reconnue comme le lieu <strong>de</strong> la transformation<br />
réelle <strong>de</strong>s espèces du pain et du vin en corps du Christ, modèle<br />
d’une substantification généralisée qui affecte au premier chef la conception<br />
<strong>de</strong> l’Eglise. […] Et le <strong>de</strong>uxième aspect : la personnalisation <strong>de</strong> l’église, dont la<br />
consécration est même assimilée à un baptême, se double d’un discours sur<br />
la personne chrétienne, […] »<br />
A droite: Cathérale <strong>de</strong> Metz<br />
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