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Enoncé Théorique de TPM - Pierre Cauderay.pdf - EPFL

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La soustraction<br />

« Après tout si Icare est tombé, n’est-ce pas pour avoir oublié l’Autre élément<br />

? » G.Picon, Le vol d’Icare <strong>de</strong> Picasso.<br />

Au début <strong>de</strong> cet exposé, j’ai donc tenté un parallèle entre le mon<strong>de</strong><br />

d’aujourd’hui et le symbole <strong>de</strong> Babel. Tour qui représente pour Hegel le symbole<br />

<strong>de</strong> l’architecture symbolique. Si l’on considère le symbole <strong>de</strong> la Tour <strong>de</strong><br />

Babel sans préjugés. Le fait qu’elle puisse être le symbole <strong>de</strong> l’architecture<br />

symbolique nous montre qu’elle est représentative d’un principe qui est une<br />

qualité humaine: la propension à additionner, à cumuler dans un mouvement<br />

<strong>de</strong> construction linéaire. Chaque pièce, chaque pério<strong>de</strong> s’ajoute aux<br />

précé<strong>de</strong>ntes, dans une dynamique qui tend traditionnellement vers le meilleur,<br />

le Progrès. Certains <strong>de</strong>s auteurs cités précé<strong>de</strong>mment discutent cette<br />

connotation ; ils mettent en gar<strong>de</strong> contre les dérives actuelles d’un emballement<br />

<strong>de</strong> ce système. Georges Bataille conteste, lui, ce sens positif. Pour<br />

lui, cette propension perpétuellement productrice d’excé<strong>de</strong>nt génère la<br />

guerre. Car la consommation <strong>de</strong> ce surplus <strong>de</strong> productivité aiguise la gourmandise.<br />

Régis Debray, lui, accuse un amalgame entre ce principe cumulatif<br />

Cathédrale <strong>de</strong> Metz<br />

du développement scientifique et technique et celui répétitif <strong>de</strong> l’univers<br />

politico-symbolique. Néanmoins cette conception directionnelle, cumulative<br />

domine notre société actuelle. Il s’agit là du principe du Progrès, dont<br />

la science, summum <strong>de</strong> cette logique rationnelle constructive, est l’outil le<br />

plus puissant.<br />

Mais « La science n’occupe pas en fait les mêmes lobes cérébraux que la croyance.<br />

Il n’y a pas <strong>de</strong> concurrence entre les <strong>de</strong>ux. Sinon tous les croyants seraient<br />

<strong>de</strong>s imbéciles et tous les savants seraient <strong>de</strong>s incroyants. » Auguste<br />

Comte considère que «la science ne peut pas assurer l’unité spirituelle d’un<br />

peuple»; ni la science, ni le Progrès, ni la logique additive matérialiste. Par<br />

contre, selon Régis Debray, l’unité d’un groupe dépend du sacré collectif. Un<br />

principe spirituel, immatériel qui est la représentation <strong>de</strong> ce que le groupe<br />

estime être le meilleur. Pour lui, cette transcendance est naturelle est nécessaire<br />

à la cohésion sociale et donc à l’équilibre <strong>de</strong> ses individus.<br />

C’est à partir <strong>de</strong> ce constat que l’on découvre une contradiction dans<br />

l’architecture à vocation spirituelle. Si le Progrès est cumulatif. Si le mon<strong>de</strong><br />

contemporain aiguise chaque jour un peu plus ses capacités d’orgueil à défier<br />

le surnaturel dans un principe linéaire. Si ce que les hommes <strong>de</strong> Babel<br />

tentaient en voulant se rassurer <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>stin leur a coûté si cher. Si tenter<br />

<strong>de</strong> soumettre l’invariant collectif à notre enten<strong>de</strong>ment pétrifie les valeurs<br />

transcendantale. Comment mettre en espace la spiritualité sans procé<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> ces principes constructif?<br />

Par opposition: par soustraction.<br />

Selon le philosphe italien Agamben :<br />

« Il faut que le médium disparaisse dans ce qu’il nous donne à voir, dans<br />

l’absolu qui se montre, qui resplendit en lui. »<br />

Générer un espace spirituel ne relève donc pas <strong>de</strong> l’addition, mais <strong>de</strong> la<br />

soustraction d’éléments, quels qu’ils soient.<br />

Ce qui dépasse l’ordre <strong>de</strong> la réalité soumise à l’enten<strong>de</strong>ment doit être une<br />

déconstruction <strong>de</strong> l’orgueil matérialiste <strong>de</strong> l’homme. Générer l’unité sans<br />

s’inscrire dans un processus cumulatif. Un principe soustractif.<br />

La construction d’une église ou d’un espace spirituel possè<strong>de</strong> donc cette<br />

tension incroyable d’une lutte babylonienne entre l’orgueil <strong>de</strong> l’homme<br />

et la dimension humaine transcendantale. Plus un édifice est plein, au<br />

sens du symbole <strong>de</strong> Hegel, plus sa vocation sert les aspects matériels profanes.<br />

Plus l’édifice est, par opposition, vi<strong>de</strong>, plus sa vocation transcendantale<br />

est renforcée.<br />

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