Untitled - Free

êve chaque nuit depuis lors, et chaque nuit il devient plus
net. Je crois même que je sais que je vais faire le même
rêve et qu’il sera encore plus fort et beaucoup plus
angoissant.
D’un air pensif, je tirais sur le bout de mon nez. C’est
une habitude chez moi, chaque fois que je réfléchis à
quelque chose. Cela est dû sans doute à la longueur de
mon appendice nasal. Certaines personnes se grattent la
tête lorsqu’elles réfléchissent, et ont des pellicules. Moi, je
tire sur ma trompe d’auto, tout simplement.
— Mademoiselle Tandy, beaucoup de gens font des
rêves récurrents. Cela signifie ordinairement qu’ils sont
préoccupés par un même problème qui se présente sans
cesse à eux et les obsède. Je ne pense pas que cela soit
très inquiétant.
Elle me regarda de ses grands yeux profonds brun
chocolat.
— Ce n’est pas ce genre de rêve, monsieur Erskine,
j’en suis sûre. C’est trop réel. Lorsque vous faites un rêve
ordinaire, vous sentez que cela se passe dans votre tête.
Mais, avec celui-ci, il semble avoir lieu tout autour de moi,
en dehors de moi, aussi bien qu’à l’intérieur de mon
cerveau.
— Bien, dis-je, et si vous me racontiez ce rêve ?
— Il commence toujours de la même façon. Je rêve que
je me trouve sur une île que je ne connais pas. C’est l’hiver,
et un vent très froid souffle sur cette île. Je sens ce vent,
même si les fenêtres de ma chambre à coucher sont
toujours fermées. C’est la nuit, et la lune est levée, là-bas,