Le Sang du Rock Tome 2 - Index of

fois un croissant de lune dans le flanc gauche de Jacob.
Quand la plaie se referme, il recommence du côté droit.
Avec méthode et précision, Benjamin taillade la peau du vampire : son bras, sa poitrine, encore son cou,
et son visage.
Je ferme les yeux. Que vont-ils faire de ce sang de vampire ? Le boire dans un acte de vengeance
malsaine ? Ils doivent en avoir récupéré près de quatre litres, à présent. Il ne doit pas en rester beaucoup.
Peut-être souhaitent-ils simplement le saigner à blanc.
L'épais parfum cuivré du sang m'assaille les narines. Je plaque la main sur mon nez et ma bouche. Je me
tourne vers Ned, qui a enfoui son visage dans ses bras, les jambes repliées contre sa poitrine.
Je sors mon téléphone de mon sac à main et active la fonction vidéo. Au cas où Ned se déciderait à
rouvrir les yeux, je me penche en avant pour dissimuler l'appareil, puis je presse l'objectif contre une
fissure, près du sol, où l'on dirait qu'une souris a grignoté la cloison.
Par mon trou, je constate que Benjamin repose la dague sur le plateau d'argent.
Il s'agenouille au pied du piquet et brandit le petit récipient plein de sang, se joignant au chant sur une
ligne mélodique perçante qui me donne la chair de poule. Sa voix m'hypnotise comme jamais celle d'un
humain n'était parvenue à le faire depuis l'époque où, gamine, j'écoutais les sermons de mon père. Cet
homme a d'ailleurs à peu près l'âge que mon géniteur avait au summum de sa charismatique carrière.
Les autres doyens - dont une bonne partie sont nettement plus âgés que Benjamin - l'observent, avec un
mélange de fierté et de crainte.
L'homme au bouc s'empare du grand récipient et se tourne face au cercle. Il se dirige lentement, d'un air
cérémonieux, vers un homme d'âge mûr à la chevelure blond foncé, prenant soin d'éviter de renverser la
moindre goutte du sang qui clapote contre les bords du récipient de la taille d'un grand saladier.
Comme un seul homme, les doyens défont leurs tenues et ôtent les bras de leurs manches. Torse nu, ils
laissent tomber leurs robes, retenues à la taille par leurs ceintures.
Le premier type plonge les mains dans le récipient qui contient le sang du vampire. La température de la
cave étant pour le moins fraîche, le liquide émet une légère fumée. Je grimace, me figurant que l'homme
va le boire.
Il se contente de s'en asperger le visage et de s'abandonner avec délices au liquide, comme s'il s'agissait
d'eau pure. Du sang mouille ses cheveux, ses tempes, et dégouline de son menton. Il sourit.
Le doyen plonge de nouveau les mains dans le récipient. Cette fois, il se frotte la poitrine et les épaules,
badigeonnant sa peau de fluide écarlate, redonnant un sens à l'expression «bain de sang».
Mon Dieu! Je veux détourner le regard, mais si je me laisse guider par la peur, je vais m'évanouir ou
vomir. J'ai l'impression qu'on m'a collé les paupières en position ouverte pour que je sois témoin de ces
atrocités.