Le Sang du Rock Tome 2 - Index of

— Hé ! Si je me fais tuer ici, au moins je n'aurais pas à aller bien loin pour me faire enterrer!
—Détends-toi. (Il pose sa main sur la mienne, celle qui tient le levier de vitesse, et la laine de ses
mitaines chatouille ma peau gercée.) Je sais que ça n'a aucune importance, mais tu ne pourrais pas te faire
enterrer ici, puisque tu n'es pas catholique.
Ralentissant afin de respecter la limitation de vitesse à 10 kilomètres-heure, nous dépassons une famille
de Mexicains en train d'installer une couverture de pique-nique.
—C'est là que tu aurais été enterré, toi ?
Ma voix vacille, et je retiens mon souffle en imaginant son corps inerte.
— Ouais. Avant, il y avait une règle qui interdisait d'inhumer les morts par suicide en terre consacrée,
mais elle a été supprimée.
Le silence s'installe, jusqu'à ce que je ne parvienne plus à me retenir de poser la question :
— Tu as laissé une lettre ?
Il glousse.
— C'était pathétique. Regina m'a épargné cette honte quand elle m'a converti.
Nous l'avons brûlée avant de partir pour Pittsburgh.
—Qu'est-ce que tu as dit à ta famille ?
—Rien. Je suis simplement parti. Rompre tout contact. C'est l'un des inconvénients majeur, lorsque l'on
devient vampire.
—Sur ordre du Contrôle.
—Pas vraiment. Le Contrôle préfère que les vampires coupent les ponts, mais proprement. La fuite est
une source de complications, parce qu'on est alors considéré comme une personne disparue, et des
recherches sont lancées. (Pour la trentième fois, il change la position de ses jambes trop longues sous le
tableau de bord de la voiture.) Quand le Contrôle est intervenu, ma famille a perdu ma trace.
—Pourquoi?
—Mon père et moi nous détestions. Je n'étais pas le fils qu'il espérait, et il n'était pas le père idéal :
j'aurais préféré qu'il ne soit pas un crétin fini.
—Comme tout le monde, non ?
Je refrène ma propre rancœur et continue à l'écouter.
— Ça faisait plusieurs années qu'on ne s'était pas parlé. Les membres du Contrôle ont rédigé une lettre à
mon père en imitant mon écriture, dans laquelle ils lui demandaient de venir me voir avant l'un de mes