la revue des juristes de sciences po - AJSP
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BZ : Pour en revenir à <strong>la</strong> perspective <strong>de</strong> l’op<strong>po</strong>sition<br />
entre Etats et investisseurs, dans<br />
quels cas peut-on arguer <strong>de</strong> <strong>la</strong> vio<strong>la</strong>tion par<br />
un Etat <strong>de</strong> ses engagements internationaux ?<br />
FQ : Les TBI com<strong>po</strong>rtent <strong><strong>de</strong>s</strong> dis<strong>po</strong>sitions<br />
indiquant aux Etats un com<strong>po</strong>rtement à<br />
suivre : si ce com<strong>po</strong>rtement n’a pas été suivi, il<br />
y a vio<strong>la</strong>tion du TBI, et donc <strong><strong>de</strong>s</strong> engagements<br />
internationaux <strong>de</strong> l’Etat. Par exemple, un<br />
TBI va c<strong>la</strong>ssiquement protéger l’investisseur<br />
contre toute expropriation, ou encore va<br />
im<strong>po</strong>ser à l’Etat qui accueille l’investissement<br />
<strong>de</strong> traiter l’investisseur <strong>de</strong> façon juste et<br />
équitable.<br />
Il faut bien noter que le TBI ne fait pas obstacle<br />
à <strong>la</strong> volonté <strong>de</strong> l’Etat : en cas <strong>de</strong> vio<strong>la</strong>tion<br />
du TBI, ce <strong>de</strong>rnier permet seulement à l’investisseur<br />
d’activer une procédure d’arbitrage. Il<br />
y a quelque part une réserve <strong>de</strong> souveraineté,<br />
mais le droit <strong><strong>de</strong>s</strong> investissements internationaux<br />
et les TBI y mettent un prix. L’Etat qui<br />
commet une expropriation s’ex<strong>po</strong>se ainsi à<br />
une procédure arbitrale et à ses conséquences<br />
fi nancières.<br />
La protection <strong><strong>de</strong>s</strong> TBI s’étend également à <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
mesures beaucoup plus discrètes qui peuvent<br />
être prises à l’encontre d’un investisseur. L’affaire<br />
« AES c/ Hongrie » est un bon exemple,<br />
puisque les mesures en question étaient <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
mesures tarifaires assez subtiles. Cette aff aire<br />
se ramène à <strong>la</strong> problématique européenne<br />
que nous avons mentionnée précé<strong>de</strong>mment<br />
puisque <strong>la</strong> Commission européenne est intervenue<br />
par le biais d’un mémoire d’amicus<br />
curiae [intervention d’une personne ou entité<br />
extérieure au litige mais ayant un intérêt dans<br />
<strong>la</strong> question, NDLR]. Cette intervention s’explique<br />
par l’existence d’un confl it entre, d’un<br />
côté, les droits issus du Traité sur <strong>la</strong> Charte <strong>de</strong><br />
l’Energie, sur lequel était fondée <strong>la</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
Revue <strong><strong>de</strong>s</strong> JuRistes <strong>de</strong> <strong>sciences</strong> Po - HiveR 2012 - n°5<br />
Enquêtes<br />
d’arbitrage, et <strong>de</strong> l’autre côté, <strong><strong>de</strong>s</strong> normes<br />
européennes <strong>de</strong> droit <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence. En<br />
un mot, l’investisseur <strong>de</strong>vait recevoir une<br />
certaine somme <strong>de</strong> par son contrat et ce <strong>de</strong>rnier<br />
avait été modifi é uni<strong>la</strong>téralement par <strong>la</strong><br />
Hongrie qui prétendait agir sous l’infl uence<br />
du droit européen.<br />
BZ : Certaines décisions du CIRDI, regroupées<br />
par certains auteurs sous l’appel<strong>la</strong>tion<br />
<strong>de</strong> « Local remedies cases » ont re<strong>po</strong>ussé <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
recours <strong>de</strong>vant le tribunal arbitral au motif<br />
que les voies <strong>de</strong> recours internes n’avaient<br />
pas été épuisées. Ces décisions ne semblentelles<br />
pas entrer en contradiction avec l’esprit<br />
même <strong>de</strong> l’arbitrage ?<br />
FQ : L’un <strong><strong>de</strong>s</strong> fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> l’arbitrage est le<br />
consentement <strong>de</strong> chaque partie. En matière<br />
d’investissements, les Etats peuvent choisir<br />
<strong>de</strong> conditionner leur consentement à l’arbitrage<br />
à l’épuisement <strong><strong>de</strong>s</strong> recours administratifs<br />
ou judiciaires internes. Cette faculté<br />
leur est d’ailleurs expressément accordée par<br />
<strong>la</strong> Convention <strong>de</strong> Washington [article 26,<br />
NDLR]. Ce<strong>la</strong> donne à l’Etat l’op<strong>po</strong>rtunité <strong>de</strong><br />
corriger le dommage invoqué par l’investisseur.<br />
On peut comparer ce<strong>la</strong> à l’obligation<br />
<strong>po</strong>sée par certaines c<strong>la</strong>uses compromissoires<br />
<strong>de</strong> respecter un dé<strong>la</strong>i d’attente avant <strong>de</strong><br />
recourir à l’arbitrage, ou d’engager <strong><strong>de</strong>s</strong> négociations<br />
au préa<strong>la</strong>ble.<br />
De plus, dans les cas particuliers où l’investisseur<br />
invoque une vio<strong>la</strong>tion du TBI du<br />
fait <strong><strong>de</strong>s</strong> tribunaux locaux (par exemple, si<br />
l’investisseur invoque un déni <strong>de</strong> justice), il<br />
est normal qu’il ne puisse pas commencer<br />
une procédure CIRDI avant que les voies <strong>de</strong><br />
recours internes dis<strong>po</strong>nibles n’aient été épuisées<br />
au préa<strong>la</strong>ble.<br />
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