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Tableau 2 : Evaluation du genre des femmes trans par un jury<br />
d’écoute<br />
Par ailleurs, quand on propose, au jury d’auditeurs de classer ces voix selon<br />
une échelle de masculinité-féminité, les voix des MtF semblent rarement présenter une<br />
position « extrême ». Spencer note que les voix des transsexuelles perçues comme<br />
femmes sont jugées peu féminines, nettement moins féminines que celles des femmes<br />
non transsexuelles du groupe contrôle. Wolfe & al. qui proposent une échelle de<br />
masculinité-féminité de 7 points (1 = voix très masculine, 7 = voix très féminine),<br />
suggèrent que les MtF ont globalement des voix jugées plutôt en accord avec le sexe<br />
qu’on leur attribue : celles qui sont perçues comme hommes ont des voix jugées plutôt<br />
masculines (moyenne = 2,4), celles qui sont perçues comme femmes ont des voix<br />
jugées féminines (moyenne = 4,9). Les évaluations particulières invitent, cependant, à<br />
nuancer cette première approximation. Tout d’abord, les évaluations des voix des MtF<br />
vues comme hommes sont contrastées: certaines apparaissent très masculines (classées<br />
1) renforçant (voire déterminant) la catégorisation des locutrices dans le genre<br />
masculin ; d’autres, en revanche, sont jugées plutôt féminines (classées 4,3) inscrivant<br />
les MtF dans une figure d’hommes à voix féminine. Pour les transsexuelles perçues<br />
comme femmes, les évaluations sont plus homogènes (elles prennent place dans un<br />
intervalle de 4,4 à 5,1) mais elles suggèrent finalement une féminité plus moyenne<br />
qu’extrême. Quant aux expériences de Pausewang-Gelfer et Schofield, elles montrent<br />
que les évaluations de la féminité-masculinité des voix ne distinguent pas<br />
véritablement les MtF perçues comme hommes de celles perçues comme femmes : sur<br />
une échelle de 7 points (1 = voix très féminine, 7 = voix très masculine), les premières<br />
se positionnent à 4,5 et les secondes à 4 (avec des intervalles semblables : 2-5 pour les<br />
premières et 2-4 pour les secondes) dressant des portraits de MtF en hommes à voix<br />
moyennement masculine ou bien en femmes à voix plutôt masculine.<br />
Pour ce qui concerne les mesures de la fréquence fondamentale, les auteurs<br />
insistent, à la suite de Spencer, sur la définition d’une sorte de « hauteur-seuil »<br />
orientant l’évaluation sexuée de la voix et du locuteur : les femmes trans ayant une<br />
fréquence fondamentale inférieure à 155-160 Hz auront tendance à être perçues<br />
comme des hommes ; inversement, celles ayant une fréquence fondamentale<br />
supérieure seront plutôt perçues comme des femmes. Pausewang-Gelfer et Schofield<br />
nuancent tout de même le propos en soulignant que si le passage de cette fréquence est<br />
nécessaire pour être perçue comme femme, il n’est pas suffisant puisque certaines<br />
femmes trans ayant des fréquences fondamentales plus élevées (181 Hz) sont tout de<br />
même perçues comme des hommes. Ce qui est une façon de rappeler tout à la fois<br />
l’importance et l’insuffisance de ce seul critère pour l’évaluation sexuée des voix.<br />
Spencer<br />
1988<br />
Wolfe & al.<br />
1990<br />
Pausewang-Gelfer & Schofield<br />
2000<br />
Femmes trans (MtF)<br />
perçues comme hommes<br />
Femmes trans (MtF)<br />
perçues comme femmes<br />
F0 < 160 Hz<br />
F0 > 160 Hz<br />
57 – 140 Hz 156 – 195 Hz<br />
112 – 181 Hz 164 – 199 Hz<br />
Tableau 3 : Evaluation du genre des femmes trans en fonction de la<br />
fréquence fondamentale<br />
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