JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLES 2005/4 - 153Après avoir constaté que pour obtenir une telle mesure d’anticipation les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs<strong>de</strong>vaient justifier d’un <strong>droit</strong> évi<strong>de</strong>nt et d’une atteinte manifestementillicite à ce <strong>droit</strong>, ce qui selon le juge était loin d’être acquis en l’espèce, celui-ciprécise par ailleurs que «la balance <strong>de</strong>s intérêts n’est pas plus susceptible <strong>de</strong>justifier la voie choisie par les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs. A cet égard, il faut soulever – carc’est révélateur – que déjà lorsqu’il s’est agit pour le juge du fond <strong>de</strong> rencontrerla <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’exécution provisoire dans son jugement du 8 novembre 2000 26 ,celui-ci l’a rejetée au motif que «d’une part, les délais écoulés <strong>de</strong>puis le premiermanquement <strong>de</strong> la défen<strong>de</strong>resse sont tels que quelques mois <strong>de</strong> plus ou <strong>de</strong> moinsne sont pas <strong>de</strong> nature à nuire aux intérêts <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs et, d’autre part, parceque le préjudice que subirait la défen<strong>de</strong>resse en cas <strong>de</strong> réformation <strong>de</strong> la décision,si elle avait dû s’exécuter avant l’issue définitive du procès, serait sansaucune mesure avec <strong>de</strong>s avantages retirés par les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>urs d’une exécutionimmédiate». Cette appréciation du juge du fond 27 dans le contexte d’une utilisationdirecte et franche du nom Simenon justifie, a fortiori, la pru<strong>de</strong>nce que doits’imposer le juge <strong>de</strong>s référés 28 face à l’utilisation du nom «Si Mais Non» (Civ.Liège (réf.), 6 novembre 2003, J.L.M.B. 04/846, déjà citée).II.- L’urgence1. Conditions <strong>de</strong> compétence et <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>ment• «L’urgence en matière <strong>de</strong> référé est un élément constitutif <strong>de</strong> la compétencematérielle du juge» (Liège (1 ère ch.), 28 juin 2000, J.L.M.B. 00/1042, déjà citée).Comme on le sait, la compétence doit s’apprécier en fonction non pas <strong>de</strong> l’objetréel <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, mais bien <strong>de</strong> l’objet tel que formulé dans l’acte introductifd’instance 29 . «Dès lors, vu la référence à l’urgence [dans la citation], c’est à justetitre que le tribunal s’est déclaré compétent» (C.trav. Liège (10 e ch.), 1 er avril2003, J.L.M.B. 03/673, déjà citée).• «C’est à bon <strong>droit</strong> que le premier juge s’est déclaré compétent dès lors quel’urgence était invoquée en citation» (Bruxelles (9 e ch.), 20 septembre 2002,J.L.M.B. 02/1039).• C’est ce que confirme encore la Cour <strong>de</strong> cassation dans un arrêt du 10 avril2003 : «que lorsqu’il est saisi d’une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> présentée comme urgente dansl’acte introductif d’instance, le juge <strong>de</strong>s référés est compétent pour en connaître;que s’il ne reconnaît pas l’urgence <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, il la déclare non fondée» (Cass.(1 ère ch.), 10 avril 2003, J.L.M.B. 03/581).2. Notion et balance <strong>de</strong>s intérêts• «Il est généralement admis qu’il y a urgence dès que la crainte d’un préjudiced’une certaine gravité, voire d’inconvénients sérieux, rend une décision immédiatesouhaitable» (Liège (7 e ch.), 28 juin 2000, J.L.M.B. 00/1042 ,, déjà citée 30 ; Liège (7 ech.), 22 mai 2001, J.L.M.B. 01/685, déjà citée).• L’urgence est une question <strong>de</strong> fait, «ce qui laisse au juge <strong>de</strong>s référés un largepouvoir d’appréciation en fait et, dans une juste mesure, la plus gran<strong>de</strong> li<strong>be</strong>rté»(Liège (7 e ch.), 22 mai 2001, J.L.M.B. 01/685, déjà citée) 31 .___________26. Il s’agit du jugement par lequel le juge du fond enjoignait au défen<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> cesser tout emploi dupatronyme Simenon comme enseigne.27. Souligné dans le texte.28. Souligné dans le texte.29. Voy., «<strong>Inédits</strong>… », cette revue, 1992, p. 509, 1993, p. 1121 et 2000, p. 359.30. L’arrêt cite J. VAN COMPERNOLLE, "Actualité du référé", Ann. dr. Louvain., 1989, p. 143 à 147.31. L’arrêt cite Cass., 21 mai 1987, Pas., 1987, I, 1160.
154 – 2005/4JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLES• Ainsi, le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong> première instance <strong>de</strong> Bruxelles, saisi d’une<strong>de</strong>man<strong>de</strong> visant à obtenir la restitution d’un véhicule enlevé par une société <strong>de</strong>dépannage sur réquisition <strong>de</strong> la police, estime qu’il y a urgence dès lors que «lefait pour la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse d’être privée <strong>de</strong> son véhicule dont elle a <strong>be</strong>soinnotamment dans l’exercice <strong>de</strong> sa profession, constitue dans son chef uninconvénient sérieux justifiant le recours à la procédure en référé» (Civ.Bruxelles (réf.), 4 juin 2004, J.L.M.B. 04/562).• Pour la cour d’appel <strong>de</strong> Liège, «la circonstance qu’en raison d’un changement <strong>de</strong>conseil, l’appelante ait <strong>de</strong>mandé remise à l’audience d’introduction afin <strong>de</strong> pouvoirétablir <strong>de</strong>s conclusions additionnelles n’entraîne pas une disparition <strong>de</strong>l’urgence» (Liège (ch. vac.), 28 juillet 2003, J.L.M.B. 03/1219, déjà citée).• Il y a urgence «lorsque la procédure ordinaire serait impuissante à résoudre ledifférend en temps voulu». La cour d’appel <strong>de</strong> Liège estime, dans son arrêt déjàcité du 22 mai 2001, qu’il «faut toutefois ne pas négliger les possibilités offertespar la combinaison <strong>de</strong>s articles 19, alinéa 2, 735 et 708 du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong> 32 lorsquel’action au fond est déjà introduite ou en voie <strong>de</strong> l’être, l’urgence ne pouvantrésulter <strong>de</strong> l’inertie du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur» (sous entendu que l’inertie en l’espèce consisteraità ne pas s’être prévalu <strong>de</strong> ces dispositions, au fond, à l’audienced’introduction). La cour constate toutefois qu’en l’espèce «les possibilités d’undébat succinct organisé rapi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>vant le juge du fond ne sont pas réalistes etque le choix <strong>de</strong> la juridiction prési<strong>de</strong>ntielle ne doit pas être condamné» (Liège (7 ech.), 22 mai 2001, J.L.M.B. 01/685, déjà citée).• Le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong> commerce <strong>de</strong> Charleroi va plus loin en estimantque le tribunal <strong>de</strong>s référés «doit […] rejeter la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en référé-provision àdéfaut d’urgence, si le résultat recherché peut être obtenu <strong>de</strong>vant le juge du fonddans <strong>de</strong>s délais comparables en recourant à l’article 19 du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong>; […]en l’occurrence, le tribunal <strong>de</strong> commerce est en mesure <strong>de</strong> connaître au fonddans <strong>de</strong>s délais très rapprochés, <strong>de</strong> toute affaire dont la fixation lui serait <strong>de</strong>mandéepar les parties; la réclamation <strong>de</strong> la [<strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse] doit ainsi êtrerejetée, la mesure sollicitée pouvant être accordée en temps utile <strong>de</strong>vant le jugedu fond 33 » 34 (Comm. Charleroi (réf.), 11 décembre 2002, J.L.M.B. 02/1234, déjàcitée).Si le juge apprécie souverainement la réalisation <strong>de</strong> la condition <strong>de</strong> l’urgence, ilappartient néanmoins au <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur d’apporter la preuve <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong>scraintes d’un préjudice d’une certaine gravité, voire d’inconvénients sérieux.• Dans l’affaire déjà citée d’une mère qui s’opposait à l’inscription d’office par lacommune <strong>de</strong> son fils insolvable à son domicile, le juge <strong>de</strong>s référés <strong>de</strong> Mons relèvel’absence d’urgence au motif que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse «ne produit […] aux débatsaucun document, pas même une mise en <strong>de</strong>meure, qui nous permettraitd’apprécier la justesse <strong>de</strong> ces craintes» (qui résultaient du risque <strong>de</strong> mesuresd’exécution forcées sur le patrimoine <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse pour <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ttes <strong>de</strong> sonfils, insolvable) (Civ. Mons (réf.), 8 octobre 1999, J.L.M.B. 00/587, déjà citée) .Ce sera souvent par une balance <strong>de</strong>s intérêts en présence que le juge détermineras’il y a urgence ou non à ordonner la mesure sollicitée (Liège (7 e ch.), 14 janvier2000, J.L.M.B. 00/123, déjà citée).___________32. L’arrêt cite J.-F. VAN DROOGHENBROECK, "Aspect actuel du référé-provision", in Les procédures enréféré, Formation permanente C.U.P.- U.Lg., septembre 1998, vol. 25, p. 27.33. La décision cite J.-F. VAN DROOGENBROECK, "Aspect actuel du référé provision", op. cit. p. 29.34. Sur les réserves qui doivent être émises à l’égard <strong>de</strong> cette jurispru<strong>de</strong>nce, voy. J. ENGLEBERT, "Référé<strong>judiciaire</strong> : principes et questions <strong>de</strong> procédure", op. cit., p. 16 à 18.
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