JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLES 2005/4 - 163<strong>de</strong>s situations d’extrême urgence, lorsque même l’abrègement du délai <strong>de</strong> citationpermis par l’article 1036 du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong>, ne saurait suffire ou lorsque la mesuresollicitée impose l’utilisation d’une procédure unilatérale, la substitution <strong>de</strong> larequête à la citation, qui présente une garantie essentielle du débat contradictoire,étant prohibée chaque fois que la procédure bilatérale peut être utilisée efficacement»58 . Il constate ensuite qu’il n’y avait pas extrême urgence en l’espèce dèslors qu’il ressort <strong>de</strong>s pièces déposées par les tiers opposants à l’appui <strong>de</strong> leurrecours qu’une première version <strong>de</strong> la requête unilatérale avait été rédigée le 22octobre 2003, soit vingt-sept jours avant le dépôt <strong>de</strong> la requête. Le magistrat endéduit que la requérante aurait manifestement eu le temps <strong>de</strong> recourir, pendantcette pério<strong>de</strong>, à la procédure contradictoire, sur citation.La prési<strong>de</strong>nte du tribunal <strong>de</strong> commerce <strong>de</strong> Bruxelles ne se contente toutefois pas<strong>de</strong> ce constat pour déclarer la tierce opposition fondée et rétracter son ordonnance.Au contraire, relevant «qu’il s’agit en l’occurrence <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong> maisons <strong>de</strong>repos, il y a lieu pour le tribunal d’être très vigilant». Ainsi, après avoir constatéque le mari <strong>de</strong> la requérante originaire avait été acquitté <strong>de</strong> toutes les plaintesévoquées par son épouse dans la requête unilatérale, le magistrat relève toutefoisqu’il «n’a pas ses apaisements quant aux capacités <strong>de</strong> gestion du jeune [administrateurdélégué]» <strong>de</strong> toutes les sociétés (officiellement le fils <strong>de</strong>s parties en instance<strong>de</strong> divorce avait été nommé administrateur délégué). «Dans ces circonstances– estime la prési<strong>de</strong>nte – il incom<strong>be</strong> d’urgence au juge <strong>de</strong>s référés, dansl’intérêt <strong>de</strong> la sécurité <strong>de</strong>s différentes sociétés, <strong>de</strong> désigner un mandataire ad hocavec la mission […] - <strong>de</strong> mettre en place dans les différentes sociétés un organe <strong>de</strong>gestion régulier et donnant toutes les garanties nécessaires; - <strong>de</strong> contrôler lessituations comptables <strong>de</strong>s différentes sociétés; - <strong>de</strong> déterminer quels sont lesactionnaires réels <strong>de</strong>s différentes sociétés […]; - <strong>de</strong> prendre toutes les mesuresnécessaires pour assurer qu’aucune action ni aucun bien appartenant aux différentessociétés ne seront donnés, aliénés ou mis en gage». A cette fin, la prési<strong>de</strong>nterenomme le même administrateur provisoire que celui initialement désigné parl’ordonnance rendue sur requête unilatérale et fixe d’autorité la cause à un moisplus tard pour que l’administrateur provisoire fasse rapport, non sans avoir aupréalable mis à néant l’ordonnance rendue sur requête unilatérale en raison <strong>de</strong>l’irrecevabilité <strong>de</strong> celle-ci à défaut d’extrême urgence.L’analyse <strong>de</strong> cette ordonnance n’est pas aisée car sa lecture ne permet pas <strong>de</strong>déterminer avec certitu<strong>de</strong> si la défen<strong>de</strong>resse sur tierce opposition s’était contentée<strong>de</strong> solliciter la confirmation pure et simple <strong>de</strong> l’ordonnance attaquée ou si, à titresubsidiaire, elle avait <strong>de</strong>mandé au juge saisi <strong>de</strong> la tierce opposition <strong>de</strong> constater,par l’effet dévolutif qu’aurait la tierce opposition, à tout le moins l’existence <strong>de</strong>l’urgence à prononcer à nouveau la même mesure, au moment où il était amené àstatuer sur la tierce opposition.Il reste évi<strong>de</strong>mment à régler, ce que la prési<strong>de</strong>nte ne fait pas (en aurait-elle eu lacompétence, cela ne lui était en toute hypothèse pas <strong>de</strong>mandé), le sort <strong>de</strong>s acteséventuellement posés par l’administrateur ad hoc dans le cadre <strong>de</strong> sa premièremission, invalidée par la secon<strong>de</strong> ordonnance par l’effet même <strong>de</strong> la mise à néant<strong>de</strong> la décision ordonnant sur requête unilatérale cette mesure provisoire. En effet,la <strong>de</strong>uxième nomination du même administrateur provisoire n’a évi<strong>de</strong>mmentaucun effet rétroactif antérieur à la date du prononcé <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> ordonnance 59 .• Après avoir constaté l’absence d’extrême urgence, le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong>première instance <strong>de</strong> Namur, saisi d’une tierce opposition relève qu’«il y a lieu <strong>de</strong>s’interroger sur le point <strong>de</strong> savoir si, dans le cadre <strong>de</strong> la présente procédure aujourd’huicontradictoire, le bien-fondé <strong>de</strong> la décision auquel a conduit la procédure___________58. La décision cite Comm. Bruxelles (réf.), 14 septembre 1995, J.T., 1995, p. 830.59. H. BOULARBAH, ibi<strong>de</strong>m, p. 118.
164 – 2005/4JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLESinitiale se trouve aujourd’hui infirmé» (Civ. Namur (réf.), 20 décembre 2002,J.L.M.B. 02/1253, déjà citée).3.- Recours contre une ordonnance rendue sur requête unilatérale– tierce oppositionUne controverse subsiste sur le point <strong>de</strong> savoir si le délai <strong>de</strong> citation pour la tierceopposition est le délai <strong>de</strong> <strong>droit</strong> commun <strong>de</strong> huit jours ou s’il convient d’appliquerl’article 1035, alinéa 2, qui prévoit un délai <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jours en référé. On sait que lacontroverse vient <strong>de</strong> ce que l’article 1035 ne parle que <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en référé. Orla tierce opposition est une voie <strong>de</strong> recours et non une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sensu stricto 60 .• Suivant les conseils <strong>de</strong> la doctrine 61 , un plai<strong>de</strong>ur pru<strong>de</strong>nt dépose une requête enabréviation du délai <strong>de</strong> citer <strong>de</strong>vant le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong> première instance<strong>de</strong> Tournai, en vue d’obtenir l’abréviation du délai <strong>de</strong> citer <strong>de</strong> huit jours à <strong>de</strong>uxjours pour introduire une tierce opposition contre une ordonnance rendue, surrequête unilatérale, par le même prési<strong>de</strong>nt. Le magistrat déclare la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> nonfondée au simple motif «qu’en matière <strong>de</strong> référé, le délai normal <strong>de</strong> citation est <strong>de</strong><strong>de</strong>ux jours». Il est vrai que le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur s’était contenté dans sa requête <strong>de</strong>préciser que sa «citation [en tierce opposition] ne peut être introduite selon lesformes ordinaires et, notamment en respectant le délai <strong>de</strong> citation <strong>de</strong> dix jours(sic)» sans autre commentaire sur la controverse précitée. Ce qui conduit le juge àconclure que par cette argumentation le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur «ne justifie pas la nécessitéd’augmenter (re-sic) ce délai 62 » (Civ. Tournai (prés.), 11 juin 2004, J.L.M.B.04/1008).4.- Référé unilatéral et conflit collectif <strong>de</strong> travailLe recours à la requête unilatérale trouve <strong>de</strong> longue date un champ d’actionprivilégié en matière <strong>de</strong> conflit collectif du travail, essentiellement comme armeentre les mains <strong>de</strong>s employeurs pour combattre les piquets <strong>de</strong> grève. Ce délicatcontentieux donne lieu à une jurispru<strong>de</strong>nce contrastée.• Le fabriquant <strong>de</strong> pralines Léonidas, engagé dans un conflit collectif avec unepartie <strong>de</strong> son personnel, avait saisi le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong> première instance <strong>de</strong>Bruxelles, sur requête unilatérale, en vue d’obtenir la levée <strong>de</strong>s piquets <strong>de</strong> grèvequi, constat d’huissier à l’appui, entravaient <strong>de</strong> façon violente le libre accès <strong>de</strong>sclients, <strong>de</strong>s fournisseurs et <strong>de</strong>s employés non grévistes à l’entreprise. L’actionvisait plus précisément à faire interdiction à quiconque d’entraver le libre accès àl’ensemble <strong>de</strong>s locaux <strong>de</strong> l’entreprise. La liste complète <strong>de</strong>s différents sièges(vingt-six répartis dans toute la Belgique) était reprise dans le dispositif <strong>de</strong> larequête.Suivant une jurispru<strong>de</strong>nce aujourd’hui généralement admise (même si elle continueà faire l’objet <strong>de</strong> pertinentes critiques 63 ), le prési<strong>de</strong>nt a fait <strong>droit</strong> à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>au motif que «ces entraves constituent non seulement une atteinte au <strong>droit</strong> <strong>de</strong>propriété <strong>de</strong> l’employeur, au <strong>droit</strong> du travail <strong>de</strong>s non-grévistes et au <strong>droit</strong> d’accès<strong>de</strong>s tiers, clients <strong>de</strong> l’entreprise mais risquent aussi d’entraîner la dégradation <strong>de</strong>s<strong>de</strong>nrées périssables produites par la requérante» 64 (Civ. Bruxelles (prés.), 13janvier 2000, J.L.M.B. 00/82).___________60. Voy., sur cette controverse, H. BOULARBAH, op. cit., p. 115 à 117; J. ENGLEBERT, "<strong>Inédits</strong>… ", cetterevue, 2000, p. 357.61. H. BOULARBAH, ibi<strong>de</strong>m.62. L’ordonnance renvoie à l’article 1035, in fine , qui prévoit l’augmentation du délai <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux jours enapplication <strong>de</strong> l’article 55 du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong>., lorsque la partie adverse rési<strong>de</strong> à l’étranger, ce qui n’étaitnullement le cas en l’espèce.63. Voy. notamment les références citées par H. BOULARBAH, op. cit., p. 97, n° 29, spéc. notes 168 et 169.64. On peut évi<strong>de</strong>mment s’interroger sur l’intérêt que pourrait encore avoir une grève dans le cadre d’unconflit collectif, si cette action n’occasionne aucun <strong>de</strong>s effets ici dénoncés par le juge…
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