JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLES 2005/4 - 173En référé, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse invoquait «son <strong>droit</strong> subjectif <strong>de</strong> poursuivre sonunique activité commerciale, <strong>droit</strong> qui serait protégé par la li<strong>be</strong>rté du commerceet <strong>de</strong> l’industrie». Le juge <strong>de</strong>s référés va rejeter la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au motif que «c’est àtort que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse croit pouvoir invoquer, pour justifier sa saisie du juge<strong>de</strong>s référés, l’atteinte portée à <strong>de</strong>s <strong>droit</strong>s subjectifs tels la li<strong>be</strong>rté <strong>de</strong> commerce etd’industrie et le préjudice grave et difficilement réparable qu’elle subirait en cas<strong>de</strong> fermeture. D’une part, l’existence d’un préjudice n’entraîne pasnécessairement l’existence d’un <strong>droit</strong> subjectif. D’autre part, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse nepeut invoquer la li<strong>be</strong>rté <strong>de</strong> commerce et d’industrie alors que l’activité qu’elleexerce est justement réglementée <strong>de</strong> façon très stricte et n’est absolument pascaractérisée par le principe <strong>de</strong> la li<strong>be</strong>rté. Le principe <strong>de</strong> la loi sur le jeu <strong>de</strong> hasard[…] est, en effet, l’interdiction d’exploiter sauf licence écrite préalablementoctroyée par la Commission <strong>de</strong>s jeux <strong>de</strong> hasard. L’octroi d’une telle licencerelève du pouvoir discrétionnaire <strong>de</strong> la Commission. En attaquant la décision <strong>de</strong>refus <strong>de</strong> licence <strong>de</strong>vant le Conseil d’Etat, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse ne poursuitaucunement le rétablissement ou la reconnaissance d’un <strong>droit</strong> subjectif, maisuniquement le rétablissement <strong>de</strong> la légalité, en faisant valoir un intérêt (pas un<strong>droit</strong>) légitime puisque l’acte attaqué lui porte préjudice. L’objet véritable <strong>de</strong> laprésente action est exactement le même, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse n’ayant pas davantagele <strong>droit</strong> subjectif à faire valoir <strong>de</strong>vant le juge <strong>de</strong>s référés qu’elle n’en a <strong>de</strong>vant leConseil d’Etat. La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ne relève dès lors pas <strong>de</strong> la juridiction du juge <strong>de</strong>sréférés».Outre ces considérations quant à l’objet réel du recours, le juge <strong>de</strong>s référésconstate, par ailleurs, que «la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse a assigné en référé après avoir saisile Conseil d’Etat <strong>de</strong> son recours en annulation et en suspension contre ladécision <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s jeux <strong>de</strong> hasard, uniquement <strong>de</strong>vant le constat quela procédure <strong>de</strong>vant le Conseil d’Etat n’allait pas assez vite. Elle souhaite àl’évi<strong>de</strong>nce obtenir par un référé <strong>judiciaire</strong>, une mesure provisoire à la mesureprovisoire <strong>de</strong> suspension sollicitée <strong>de</strong>vant le Conseil d’Etat. Elle entendd’ailleurs voir limiter les effets <strong>de</strong> l’ordonnance à intervenir à l’issue <strong>de</strong> laprocédure <strong>de</strong> suspension <strong>de</strong>vant le Conseil d’Etat». Face à cette situation, lejuge <strong>de</strong>s référés relève à juste titre que «nonobstant l’existence dans certains cas<strong>de</strong> compétence parallèle, la procédure <strong>de</strong> référé <strong>judiciaire</strong> ne peut, en aucun cas,se transformer en une sorte <strong>de</strong> «super-référé» du Conseil d’Etat. Le législateur ad’ailleurs prévu, en cas d’extrême urgence, un recours spécifique en suspensiond’extrême urgence <strong>de</strong>vant le Conseil d’Etat, que la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resse n’a pas crubon d’utiliser, alors que cette procédure aurait parfaitement pu lui apporter leremè<strong>de</strong> poursuivi actuellement» (Civ. Bruxelles (réf.), 2 novembre 2001,J.L.M.B. 01/1052, déjà citée).• Dans un litige opposant <strong>de</strong>ux adjudicataires à un bail <strong>de</strong> chasse, l’adjudicataireévincé avait introduit une action en référé en vue d’obtenir notamment qu’il soitfait «défense à l’adjudicataire sortant 85 <strong>de</strong> pénétrer sur le territoire <strong>de</strong> […] et d’ypratiquer la chasse». La partie défen<strong>de</strong>resse contestait la «compétence <strong>de</strong>sjuridictions <strong>judiciaire</strong>s à connaître d’un contentieux dont le juge naturel serait leConseil d’Etat». Le juge <strong>de</strong>s référés <strong>de</strong> Namur constate «qu’en l’espèce [le<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur] invoque la violation <strong>de</strong> son <strong>droit</strong> subjectif et être déclaré adjudicatairedu bail <strong>de</strong> chasse, conformément aux dispositions du cahier <strong>de</strong>s charges <strong>de</strong>la Région wallonne». Le juge estime toutefois «que l’article 3 du cahier général<strong>de</strong>s charges ne confère aucun pouvoir discrétionnaire au pouvoir adjudicatairelorsqu’il s’agit <strong>de</strong> constater qui a émis l’offre la plus élevée; qu’il n’est discutépar personne que l’offre [du <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur] était la plus élevée; attendu qu’enconséquence [le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur] justifie à suffisance l’existence d’un <strong>droit</strong> subjectif___________85. Qui avait obtenu le renouvellement <strong>de</strong> son bail.
174 – 2005/4JURISPRUDENCE DE LIEGE, MONS ET BRUXELLESqui fon<strong>de</strong> la compétence <strong>de</strong>s juridictions <strong>judiciaire</strong>s […]» (Civ. Namur (8 e ch.réf.), 19 septembre 2003, J.L.M.B. 03/956).3. Absence <strong>de</strong> juridiction du juge <strong>de</strong>s référés etdétermination <strong>de</strong> la compétence du juge <strong>judiciaire</strong> enfonction <strong>de</strong> l’objet <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> tel que li<strong>be</strong>llé dans l’acteintroductif d’instanceLa théorie <strong>de</strong> la détermination <strong>de</strong> l’objet réel <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> permet <strong>de</strong> régler lesconflits d’attribution entre les juridictions administratives et <strong>judiciaire</strong>s. Il nes’agit donc pas d’un problème <strong>de</strong> compétence stricto sensu (détermination dutribunal compétent au sein <strong>de</strong>s juridictions <strong>de</strong> l’ordre <strong>judiciaire</strong>) mais bien d’unproblème <strong>de</strong> juridiction. Les règles propres aux conflits <strong>de</strong> compétence (articles639 et 640 du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong>) ne sont donc pas d’application en cette matière.• «Il convient <strong>de</strong> souligner que si l’objet réel ne vise pas la protection d’un <strong>droit</strong>du subjectif, il ne convient pas <strong>de</strong> soulever une exception d’incompétence dujuge <strong>de</strong>s référés mais bien d’invoquer l’absence <strong>de</strong> juridiction du juge saisi»(Civ. Bruxelles (réf.), 2 novembre 2001, J.L.M.B. 01/1052, déjà citée).Ce principe étant rappelé, il me semble néanmoins qu’on ne peut pas exclured’autorité en ce domaine l’application d’une règle propre à la compétence <strong>de</strong>sjuridictions <strong>de</strong> l’ordre <strong>judiciaire</strong> selon laquelle la compétence du juge estdéterminée en fonction <strong>de</strong> l’objet <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> tel qu’il est li<strong>be</strong>llé dans l’acteintroductif d’instance. Cette règle, unanimement admise lorsqu’il s’agit <strong>de</strong>l’urgence, trouve à s’appliquer en toute matière. Ainsi, à mon sens, si une partieinvoque expressément en citation, <strong>de</strong>vant le juge <strong>de</strong>s référés, la violation d’un<strong>de</strong> ses <strong>droit</strong>s subjectifs par l’administration, il me semble que le juge <strong>de</strong>s référésest définitivement compétent pour connaître <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et ne pourra doncplus se déclarer sans juridiction. Dans ce cas, à mon sens, s’il constate à la suite<strong>de</strong> l’instruction <strong>de</strong> la cause que contrairement à ce que le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur affirmaiten citation l’objet réel et principal <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> est la contestation d’un acte oud’un règlement relevant du contentieux objectif, le juge <strong>de</strong>s référés, quoiquecompétent pour connaître <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, ne pourra que déclarer celle-ci nonfondée.• Le prési<strong>de</strong>nt du tribunal <strong>de</strong> première instance <strong>de</strong> Namur défend une positiondifférente dans une ordonnance du 12 juillet 2004. En l’espèce, les partiesdéfen<strong>de</strong>resses contestaient la compétence <strong>de</strong>s juridictions <strong>judiciaire</strong>s pourconnaître du litige «dans la mesure où les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>resses n’ont pas indiqué dansleur acte introductif d’instance en quoi consistait le <strong>droit</strong> subjectif dont ellesentendaient se prévaloir afin <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r la compétence <strong>de</strong> la juridiction <strong>de</strong>sréférés». A cette argumentation le juge <strong>de</strong>s référés répond que «la compétenced’une juridiction <strong>judiciaire</strong> s’apprécie, <strong>de</strong> manière générale, au moment <strong>de</strong>l’introduction <strong>de</strong> l’instance, au regard <strong>de</strong> l’objet <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> tel que li<strong>be</strong>llédans l’acte introductif, aucune disposition du co<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong> ne règle l’épineusequestion <strong>de</strong> la procédure à appliquer en ce qui concerne les conflits d’attributionentre les juridictions administratives et <strong>judiciaire</strong>s. L’article 639, alinéa 5, duco<strong>de</strong> <strong>judiciaire</strong> interdit simplement au tribunal d’arrondissement <strong>de</strong> connaîtred’un conflit relatif au pouvoir <strong>de</strong> juridiction <strong>de</strong>s cours et tribunaux. Face à cevi<strong>de</strong> législatif, la doctrine et la jurispru<strong>de</strong>nce ont considéré qu’il convenait <strong>de</strong>résoudre un conflit d’attribution en qualifiant l’objet réel <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> parrapport aux règles fondamentales <strong>de</strong> compétence fixées par la Constitution 86 . Ilest, dès lors, indifférent que l’acte introductif contienne ou non <strong>de</strong>s___________86. L’ordonnance cite les conclusions du procureur général VELU précédant Cass., 10 avril 1987, A.P.T.,1987, p. 280 et suivantes.
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