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<strong>EXPLORER</strong> – IMPACTS ET RÉPONSES<br />

Quelles responsabilités pour l’entreprise?<br />

fin de sa réaction de stress adapté, le sujet se sent à la<br />

fois soulagé et épuisé. Il va s’en remettre en quelques<br />

heures, éventuellement au terme d’un dialogue avec un<br />

secouriste ou un soignant. Mais il peut s’agir aussi d’un<br />

stress dépassé (25 % des cas), dans une des quatre formes<br />

d’inhibition stuporeuse, d’excitation incoordonnée, de<br />

fuite panique ou d’action automatique. Alors que le<br />

stress adapté se caractérise par la lucidité et le sang-froid,<br />

le stress dépassé se traduit par un vécu traumatique<br />

(traumatisme psychique) avec frayeur, horreur,<br />

désorientation, arrêt de la pensée (« trou noir »), orage<br />

neurovégétatif, sentiment d’impuissance et détresse.<br />

Phase post-immédiate (du 2 e au 30 e jour)<br />

Cette phase recouvre deux éventualités : ou bien tout rentre<br />

dans l’ordre dès la première semaine, les symptômes<br />

gênants du stress adapté s’effacent, l’esprit du sujet n’est<br />

plus accaparé en permanence par les images et souvenirs<br />

de l’événement, et il est disponible pour reprendre ses<br />

activités d’avant ; ou bien au contraire les symptômes<br />

du stress dépassé persistent (surtout les symptômes de<br />

déréalisation), l’esprit demeure obnubilé par les images<br />

de l’événement (donnant lieu à des ruminations mentales<br />

incessantes), et le sujet est incapable de reprendre ses<br />

occupations (professionnelles, familiales et loisirs)<br />

d’avant, tandis que de nouveaux symptômes – psychotraumatiques<br />

– apparaissent, tels que reviviscences<br />

intrusives de l’événement, cauchemars, état d’alerte,<br />

sursauts et peurs phobiques liées à l’événement. Nous<br />

sommes alors dans la phase de latence ou d’incubation<br />

d’une névrose traumatique.<br />

Phase différée-chronique (au-delà du 30 e jour)<br />

Dans cette phase, on constate le tableau clinique d’une<br />

pathologie psycho-traumatique durable, correspondant<br />

au diagnostic de névrose traumatique de la nosographie<br />

européenne, ou à son équivalent américain « trouble stress<br />

post-traumatique », appellation adoptée – l’hégémonisme<br />

de la langue anglo-saxonne y aidant – par la communauté<br />

scientifique internationale. Cette pathologie comporte<br />

trois volets : primo, des symptômes de reviviscence de<br />

l’événement (visions hallucinatoires, flash back, impression<br />

subite que l’événement va se reproduire, cauchemars) ;<br />

secundo, des symptômes généraux d’asthénie, de<br />

dépression, d’anxiété, de somatisations (algies et troubles<br />

psychosomatiques) et des troubles des conduites<br />

(boulimie, anorexie, addictions, agressions contre autrui<br />

ou contre soi-même) ; et tertio, sous-jacente au plan des<br />

symptômes, une altération de la personnalité, sans cesse<br />

en état d’alerte et luttant le soir contre l’endormissement<br />

(car s’abandonner au sommeil c’est risquer d’être attaqué<br />

par surprise), ayant perdu son intérêt pour le monde et<br />

pour l’avenir, et ayant perdu aussi sa capacité de relation<br />

affective équilibrée avec autrui (impression d’être séparé<br />

des autres par une membrane invisible, impression de<br />

n’être ni compris, ni soutenu). Ce trouble de stress posttraumatique<br />

peut se résorber – avec l’aide d’un thérapeute<br />

ou spontanément, en fonction des capacités de résilience<br />

du sujet - en trois à six mois ; mais il peut perdurer, plus<br />

ou moins intense et avec des reviviscences de plus en plus<br />

espacées, pendant des années. Il peut connaître aussi des<br />

relances à l’occasion d’autres expositions traumatiques<br />

ou de nouvelles d’événements violents. Enfin, la mise à<br />

la retraite, privant le sujet du dérivatif que lui procurait<br />

son activité professionnelle et le laissant seul face à ses<br />

souvenirs, peut être l’occasion de rechutes.<br />

Prise en charge thérapeutique<br />

et sociale<br />

Instauré au lendemain de l’attentat de la station RER Saint-<br />

Michel du 25 juillet 1995, le réseau national des cellules<br />

d’urgence médico-psychologique (CUMP), couvrant les<br />

101 départements du territoire, est chargé d’assurer<br />

les soins médico-psychologiques aux blessés psychiques<br />

des attentats (et catastrophes et incidents à forte<br />

répercussion psychosociale) lors des phases immédiate et<br />

post-immédiate (et aussi pendant la phase chronique si le<br />

dispositif habituel de soins psychiques s’avère insuffisant).<br />

Dans l’immédiat, véhiculées sur le terrain par les SAMU,<br />

les équipes CUMP de psychiatres, de psychologues et<br />

d’infirmiers spécialement formés à la psychiatrie d’urgence,<br />

de guerre et de catastrophe, assurent le tri et les soins des<br />

victimes psychiques. À cette phase, la procédure de soins est<br />

dénommée « defusing », mot anglais signifiant déchocage<br />

ou désamorçage (préventif des évolutions pathologiques).<br />

Il s’agit d’apporter une présence « contenante » (contre<br />

toute nouvelle menace d’effraction psychique et contre<br />

les débordements émotionnels), et d’inciter le sujet à sortir<br />

de son inhibition et de son silence pour exprimer son<br />

ressenti, ce qui est déjà récupérer une activité et esquisser<br />

une maîtrise de l’événement. On rassure et calme la<br />

victime, et on lui remet (en la commentant) une fiche<br />

explicative de ses symptômes présents ou à venir, avec<br />

invite à contacter la CUMP en cas de besoin, et à participer<br />

à une séance de « debriefing », ou bilan psychologique<br />

d’événement, pendant la phase post-immédiate.<br />

Pendant la phase post-immédiate, les CUMP assurent le<br />

suivi des victimes qui ont été vues dans l’immédiat ; et<br />

sont même contactées par d’autres victimes qui, dans<br />

l’euphorie d’être rescapées, avaient refusé l’offre de<br />

soins proposée sur le terrain, mais se sont décompensées<br />

ensuite au terme du classique temps de latence. Beaucoup<br />

de ces consultants tardifs avaient reçu en mains<br />

propres, sur le terrain, la fiche d’information. C’est lors<br />

de cette phase post-immédiate, vers le 8 e ou 15 e jour,<br />

qu’est proposée (toute victime peut décliner cette offre)<br />

l’opération de debriefing. Effectué en individuel ou en<br />

› SOMMAIRE<br />

n°7 - 2016

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