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<strong>EXPLORER</strong> – IMPACTS ET RÉPONSES<br />

Fait religieux et radicalisation djihadiste : le tabou est-il brisé ?<br />

81<br />

QUEL EST LE MEILLEUR ENDROIT<br />

EN FRANCE POUR RÉUSSIR<br />

LE « VIVRE-ENSEMBLE » ?<br />

Thomas BOUVATIER<br />

Psychanalyste, écrivain, travaille à l’association Entr’Autres à la psychologie du jihadisme et analyse de la radicalisation<br />

À l’école, où l’autorité des professeurs est toujours<br />

plus contestée ? Dans les centres sportifs où essaiment<br />

de nombreux recruteurs islamistes ? Dans ces<br />

quartiers où la cohésion sociale est urgente mais<br />

que l’État semble ne plus pouvoir contrôler ? Enfin, dans<br />

les centres de déradicalisation, qui sont visiblement un<br />

échec ?<br />

Des solutions sont encore à trouver et à tester dans ces lieux<br />

publics, mais il y a forcément un autre espace en France<br />

pour apprendre une meilleure manière de cohabiter. Un<br />

espace de taille suffisamment importante, proche des gens et<br />

engendrant une véritable dynamique entre eux.<br />

Ce lieu existe depuis longtemps, c’est l’entreprise.<br />

Qu’elle soit publique ou privée, elle est le seul endroit<br />

politiquement et religieusement neutres, où des hommes<br />

et des femmes entrent en contact toute la journée,<br />

partagent leurs expériences au fils des ans, et unissent<br />

leurs efforts dans le but d’une réussite commune.<br />

L’entreprise est une société. Elle est très bien placée<br />

pour jouer le rôle d’une matrice de la citoyenneté, en<br />

accueillant des Français riches de leur diversité, qui<br />

peuvent s’y identifier et y trouver un moyen d’affermir<br />

le sens qu’ils donnent à leur vie.<br />

À cette vision vient s’opposer un obstacle de taille.<br />

À l’ère de la mondialisation et de la flexibilité, le milieu du<br />

travail a parfois évolué vers une forme d’inhumanité. C’est<br />

du moins ce qui est ressenti par certains employés dans les<br />

multinationales, qui disent ne plus être reconnus, être isolés,<br />

incapables de saisir l’utilité du but qu’ils poursuivent.<br />

Comment les individus les plus marginalisés pourraient être<br />

attirés par le monde de l’entreprise, eux qui ne sont pourtant<br />

pas dénués d’esprit d’entreprise, comme le montrent les<br />

réseaux clandestins de type mafieux ou jihadistes que certains<br />

montent avec succès ?<br />

Prenons deux exemples d’entreprises publique et privée<br />

pouvant intégrer au mieux ses membres les plus divers :<br />

l’armée française et la haute finance.<br />

Chez elles, l’importance attachée à la réussite des missions est<br />

telle, que leur direction recrute sans distinction de couleur de<br />

peau, de sexe ou de religion. En revanche, chacune attache un<br />

soin tout particulier à éviter celui ou celle qui est porteur d’une<br />

division potentielle, car, pour des raisons bien différentes, elle<br />

prône l’union absolue en son sein – au moins pour le temps de<br />

la mission en ce qui concerne la finance.<br />

Cette union de type fusionnel est essentielle car c’est ce type<br />

dont il est question dans la radicalisation.<br />

Qu’est-ce que recherche un jeune en voie de radicalisation ?<br />

Un lien sacré dans un groupe, une reconnaissance absolue,<br />

un but glorieux. Cette radicalisation n’est pas forcément<br />

religieuse, elle peut être politique comme on peut le voir dans<br />

les partis extrémistes, ou amicale comme dans les gangs. Mais<br />

la radicalisation peut être aussi professionnelle.<br />

Ce point est important, car il nécrose à sa manière le milieu<br />

du travail.<br />

Observons la clinique du burn-out par exemple.<br />

L’employé qui en est victime est celui qui a constaté sa<br />

non reconnaissance, son rejet et l’impossibilité d’atteindre<br />

le but qu’il s’était fixé, souvent disproportionné par rapport<br />

n°7 - 2016 › SOMMAIRE

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