Libr@rsi

252 LES RELATIONS DES JJ^SUITES [Vol.44
gerbes d* vn bled defia coupp6
: mais la moiflon Euan-
gelique fe fait in patientia, auec patience, & dans les
fouffrances.
Pour donner courage aux enfans d'Ifrael, d'entrer
dans la terre qui leur auoit efte promife, on leur fit
voir des fruits de cette terre. Lifez les Relations
precedentes, & vous trouuerez que les Sauuages font
capables [85] de Dieu, aulTi-bien que les autres
peuples plus policez. Le don d'oraifon, I'amour des
fouffrances, la charite du prochain, fe trouuent dans
quelques-vns eminemment : ex vngue leonem, de
r^chantillon on connoift toute la piece.
I'ay appris tout nouuellement d'vne perfonne
venue de Canadas, au mois d'Odtobre, qu'vn Pere de
noftre Compagnie demandant ^ vne femme Huronne,
fi elle n' auoit pas efte touchee d'vne grande douleur,
apprenant les horribles tourmens, que les Iroquois
auoient fait fouffrir k fon mary. Non, dit-elle, ie
n'en ay receu aucune trifleffe. Le Pere tout furpris,
luy en demande la raifon. Fay reconnu, fit-elle,
que Dieu auoit accorde k mon mary, ce qu'il luy
demandoit depuis fix moix: car tout I'Hyuer il ne
faifoit quafi aucune priere, qu'il n'aiouta ces paroles :
Tu es le maiilre de la vie ; fi tu veux que les Iroquois
nous attaquent, ne permets pas que ie fois affomm^
d'vn coup de hache; mais fay-moy prendre, fay-moy
lier & garrotter; fay-moy traifner en leur pais, afin
que [86] ie fois brufl6, & grille tout vif. Ie fouffray
toutes leurs cruautez tres-volontiers, pour les pechez
que i'ay commis deuant & apr6s mon Baptefme. I'ay
tant de regret de t'auoir fafcli6, toy qui es fi bon, que
ie prendray plaifir d'endurer tous ces tourmens.
Voil^ la priere de mon mary. Dieu luy a accord^ ce