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70 LES RELA TJONS DES /^SUITES [Vol. 44
eft6 feme de croix bien fafcheufes pour nous : mais
robeylTance m'y ayant engage, i'ay 6prouue que
Iesvs-Christ eft en la Croix, & qu'il la rend
aymable k ceux qui la veulent recherclier. le congeus
que ie deuois auoir beaucoup de peines en ce
voyage par le peu d'affedtion que ie remarquay
d'abord en nos Onontagheronnons pour I'embarquement
tant de nos Frangois que des pacquets, dont
nous fufmes obligez de quitter la plus grande partie
h cinq lieues au deffus de Montreal. I'eus de la
peine k trouuer qui vouluft [203] m'embarquer moymefme,
& ie me vis contraint de me letter dans vn
dernier canot abandonne fur le riuage, auec noftre
Frere Louis le Boefme, deux Frangois & deux
Sauuages, qu'il me fut difficile de gaigner: Pour
toutes prouifions ie ne pris qu'vn petit fac de farine.
Chaque iour i'ay eu de nouuelles difficultez, voyant
ou quelques-vns de nos Francois degradez en chemin,
ou des pacquets laillez: h. quoy il falloit que ie pourueuffe;
& n'euft eft6 nos bons Chreftiens Hurons,
qui eftoient mon refuge, ie ne trouuois par tout que
des froideurs. Nous craignions la rencontre de cent
Agnierronons, qu'on difoit nous attendre k I'entr^e
du grand Lac des Iroquois, pour fe rendre les Maiftres
de nos Chreftiens Hurons, & les faire captifs. Ie les
auois difpofez k tout ce qui pouuoit arriuer de ce
coft6-lk: tons s'eftoient confefTez, & leur coeur y
eftoit prepare. Les voyes de Dieu font adorables,
quoy qu'elles nous foient inconnues. Le malbeur de
nos Hurons eft arriue de la part de nos Onontagherronons
mefmes, aufquels ils s'eftoient [204] confiez,
& qui leur auoient promis vne fidelity 11 inuiolable par
tant de pourparlers de paix, tant d'ambaffades de
part & d' autre, & par tant de prefents fi folemnels.